I should've told you what you meant to me

T'es là depuis trop longtemps. La moto garée sur le trottoir d'une rue comme une autre. Toi posé dessus à tirer sur les pans de ta veste à la recherche d'un peu de chaleur. Le jour tombe et l'automne deviendra vite hiver. Le temps n'est pas idéal pour hésiter dehors durant des heures. Mais t'en es tout de même là. Et c'est logique quelque part. Elle était dans les sommets de ta liste et c'est la dernière que tu vas voir. Parce que tu sais à quel point tu lui as fais du mal. La culpabilité est lourde et t'en souffres depuis un bout de temps. Toi, tu le mérites bien. Pas elle. C'est une étape par laquelle tu dois passer. Dernière marche obligatoire avant d'arriver enfin au palier suivant. Il y a beaucoup d'égoïsme dans la démarche. Tu en es conscient. Toi qui vient t'excuser, qui revient dans sa vie sans qu'elle n'ait rien demandé. Tu vas peut-être gêné. Faire remonter des mauvais souvenirs. Ou peut-être qu'elle s'en foutra. Que pour elle tu ne seras que ce gars avec qui il s'est passé des trucs des années plus tôt. Juste une vieille blessure dont elle ne se soucie déjà plus. Logique. Après tant d'années. Tant d'occasions de se construire une vie. Même toi tu as fini par le faire. La tâche n'a pas été aisée mais tu es quelque part aujourd'hui. Tu es quelqu'un dont tu peux croiser le regard dans le miroir. Tu exhales difficilement dans le froid. Avant de te décoller enfin de la selle de ta moto. Il faut que tu fasses un truc. A force on va te prendre pour un mec louche et les flics vont se pointer. Et t'es plus ce type là depuis longtemps. Tu traverses la rue avec les mains fourrées dans les poches. Trottinant presque jusqu'à la petite allée bordée de buissons tués par le gel. Trois marches et te voilà sur le porche. Il te faut encore quelques instants pour appuyer sur la sonnette. Et tu recules aussitôt. Au bord de l'escalier, les bras le long de corps, les mains inutiles et les doigts qui se crispent et se décrispent à cause du stress. Il faut un moment pour que la porte s'ouvre mais tu entends de la vie là-dedans. Un escalier dévalé. Des bruits de pas. Un aboiement étouffé. Et puis elle est là. Yulia. Elle n'est pas celle de ton souvenir. Cela vaut pour toi aussi. Les années ont passées. La vie t'a amochée comme elle le fait si bien. La barbe est récente, les cheveux plus sobres. Yulia est toujours aussi jolie. Plus mature. Les courbes d'une femme. L'œil sage. Une coupe plus courte, les cheveux qui dégringolent à peine jusqu'en bas de sa nuque. Ca la change. « Salut. » Tu parviens à bredouiller.