à croire que tu es la seule personne dans cette ville
Année 41, saison intermédiaire (jour 73)

La logique derrière tout ça est sombre. Tu es Membre, pas éboueur. Tu n'as pas signé pour te coltiner des bouts de bois pour permettre au clan de se chauffer. Qu'est-ce que c'est que cette tâche d'ailleurs ? On aurait pas pu laisser le sale boulot aux Soumis plutôt ? Bien sûr la raison de ta présence est simple. Elle tient en un nom. Le nouveau malheur de ton existence. Kaz. Ce salaud qu'on appelle mentor pour faire joli t'en fait voir de toutes les couleurs et ne loupe pas une occasion de te traiter comme de la merde. C'est son rôle, paraît-il. Aujourd'hui il s'est néanmoins offert des vacances. Il t'a refourguée aux ramasseurs sans plus d'explication. Un ordre, un petit geste dédaigneux de la main et il t'a envoyée avec eux comme un vulgaire chien. Tu le détestes. Profondément. La nuit, tu rêves d'en faire des bouts de viande pour les pigeons. Pas ceux du ciel, les abrutis qui vivent sur votre territoire. Au moins ça lui aurait fait une utilité à sa hauteur, à ce Kaz. Si seulement tu n'avais pas peur de lui. C'est plus fort que toi, c'est instinctif. Il réveille un sale truc dans tes entrailles qui te donne envie de prendre la fuite. Ta seule victoire actuellement c'est de ne pas l'avoir encore fait. A cause de tout ça, tu es d'une humeur encore plus massacrante que d'habitude. Prête à aboyer sur tout ce qui t'approche. Peut-être que c'est vraiment le plan. Te transformer en clébard montrant les crocs et beuglant devant toute menace. Ridicule. Il faut vraiment que tu trouves un moyen de te débarrasser de lui. Maudite Noâ et ses idées stupides. Tu n'oublieras jamais cette trahison de sa part. « Bouge t'es dans mon chemin. » Après le trajet et les explications, tu t'es isolée un peu sur le côté pour faire tes recherches. Loin des autres tu pouvais ruminer tout haut sans qu'ils ne se foutent de ta gueule. C'est comme ça quand tu as la haine. Tu tournes en rond, tu râles tout haut et tu as envie de tirer sur des trucs. Sauf que bien sûr quelqu'un avait eu cette même idée. Et bien sûr, il faut que ce soit elle. C'est toujours elle. A croire qu'elle a fait un pacte avec Kaz pour te pourrir la vie. Tu ne serais même pas étonnée. « J'ai vu cette planche avant toi. » C'est con d'en être réduite à ça mais t'en es là. Tu es prête à te friter avec elle pour une planche. Il faut dire que cette planche compléterait ta pile de combustibles à ramener à la remorque. Après ça tu pourrais patrouiller tranquillement dans le coin, un effort bien moindre. Est-ce qu'on te croirait si tu disais l'avoir descendue par accident, la prenant pour un ennemi potentiel ? Non. Trop risqué. Mais tentant.

à croire que tu es la seule personne dans cette ville
Année 41, saison intermédiaire (jour 73)

« Si c'était le cas, tu l'aurais déjà en main. Va voir ailleurs, ce ne sont pas les planches qui manquent. » Oui mais c'est celle-là que je veux. Tu retiens difficilement des mots ridicules. Tu commences à apprendre que beaucoup utilisent tes remarques contre toi et ça te déplaît. Tu ne veux donc pas lui donner cette occasion. Tu la regardes qui ramasse la planche, furieuse. Son tas est presque aussi gros que le tien, tu ferais sûrement une bonne affaire en le lui volant. Ce qui te donne une idée. « Et si c'était toi qui allait voir ailleurs plutôt ? » Tu lui sers ton sourire le plus mielleux. « Je peux ramener tout ça pour toi. T'épargner un aller-retour. » On ne sait jamais. Peut-être que jouer les gentilles peut te rapporter quelque chose. Alessandra n'est vraiment pas maline comme fille. C'est la cible parfaite pour une telle tentative.

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Année 41, saison intermédiaire (jour 73)

« Arrête ce truc que tu fais avec ton visage. Tu fous la trouille. » Tes sourcils se froncent dès qu'elle commence à gesticuler. Elle fait dans l'humour maintenant ? Tu es habituée à ce qu'elle aille droit au but, sans image, ni commentaire. Elle pouvait être un joli robot parfois. Et puis qu'est-ce qu'elle a contre ton sourire ? Si elle sous-entends que tu n'es pas capable de sourire alors elle a bien du culot vu la moue qu'elle se paye les trois quart du temps. « Et me prends pas pour une conne, je sais ce que tu as en tête. » Ça aurait été trop beau. Même si tu n'es pas d'accord avec tout. Alessandra est bien conne, elle vient juste d'avoir un léger sursaut d'intelligence. Dommage que ça te soit tombé dessus. « Je ne vois pas de quoi tu parles. » Que tu grommelles dans un sursaut de dignité. Tu n'avoueras pas ton échec. « Et après ça va encore se plaindre que je ne suis pas sympa. » Ce qui est sous-entendu c'est que si tout le monde accueille ta gentillesse de cette façon, rien d'étonnant à ce que tu sois si revêche. Tu espères qu'elle captera le message sans que tu n'ais à le décortiquer. « Maintenant, bosses au lieu de râler. Ta planche, tu l'aurais déjà trouvée si tu n'avais pas perdu ton temps ici. » Bien sûr il faut qu'elle remette ça en jouant les grandes. Aux dernières nouvelles, tu travaillais avant son arrivée. « Idem pour toi. Reste pas dans mon chemin et je pourrais avancer. » Tu la bouscules en passant, juste parce que l'occasion est trop bonne et tu prends soin de reprendre ton chargement pour partir à la chasse aux matériaux manquants. Tu ne lui fais pas confiance à cette bannie.