Kaz, il en avait rien à foutre du bien-être des autres. Sur la liste de ses priorités, le sujet devait bien se trouver en bas de page. Peut-être même qu'il ne s'y trouvait même pas. C'était sans doute bien plus plausible selon lui. Quand on faisait l'effort de le connaître. Personne ne faisait cet effort. Et franchement, ça ne le dérangeait pas. Il aimait bien ça, ça lui offrait un peu de calme. Et puis surtout, il comprenait la raison derrière ce manque d'intérêt total. Parce qu'il était un gros salaud quand même. C'était dans sa nature, donc ça lui passait au-dessus de la tête. Même s'il n'était pas né comme ça, il le serait devenu. Quand t'es un connard, on vient pas trop te faire chier. Mais rien ne t'empêche de faire chier les autres. Et pour ça, Kaz, il était doué. Hé, petite merde ! Il avait la main posée sur l'épaule d'un petit voleur. Plutôt doué, il devait l'admettre mais pas assez pour échapper à sa surveillance avisée. Pas de chance pour le petit con. Aujourd'hui, il était mal tombé. Tu te crois malin ? La question n'attendait pas de réponse. Là encore, il en avait absolument rien à foutre des états d'âme du garçon. Franchement, le seul truc qui l'intéressait, c'était le paquet de bouffe qu'il avait volé. On disait jamais non à la bouffe, même si c'était pas vraiment la sienne. Parce qu'ils pouvaient bien être deux à jouer à ce jeu-là. Cueillir les efforts d'un inconnu ne l'empêcherait pas de dormir. Du bout du pied, il attira le sachet vers lui, sans même se baisser, jonglant agilement avec ses pieds, le paquet finit par atterrir dans la paume de sa main libre tandis qu'il poussait l'autre membre de l'autre. Que je ne t'y reprenne pas. Le parfait salaud, dans tout son culot, sans tous les scrupules. Des menaces en l'air parce qu'il en avait rien à faire, surtout. Il doutait même qu'ils se recroiseraient. Pas que l'endroit n'y prêtait pas mais juste parce que Kaz n'était jamais vraiment là. Et que d'aussi loin qu'il s'en souvienne, y avait toujours eu que cette garce d'April pour le déterrer quand il ne voulait pas qu'on le retrouve. Cette meuf avait des yeux partout, c'était pire que lui. Et pourtant, Kaz, il en voyait des vertes et des pas mûres à force de se fondre dans le paysage. Mais bon, il fallait faire bonnes figures. S'offrant la moitié du larcin, les fruits croquants sous ses dents, le reste enfoui au fond de sa poche, il força l'inconnu à se retourner. C'est quoi ton nom, déjà ? Feindre l'oubli, c'était facile, il suffisait de plisser les yeux et prendre l'air concentré de Peacemaker. Lui faire croire que ce n'était pas la première fois qu'il notait son écart de conduite. Bref, jouer les chieurs aussi bien qu'une Roxanne, il en avait presque pris l'habitude. Personne ne s'en souvenait après, de toute façon. Il espérait juste que l'autre gars serait pas un bavard. Parce que même de son nom, il s'en foutait, faudrait pas non plus que le petit crevard se mette à lui raconter sa vie, ça finirait mal.

Tu peux te les carrer dans l'cul, tes excuses. Il aurait pu le forcer à aller s'excuser auprès de sa victime. Il aurait pu....mais il était pas si con que ça, le Kaz. Il allait pas aller se tirer une balle dans le pied en forçant un morpion à s'écraser quand lui-même avait profité du butin. Non, le Kaz, il en avait rien à foutre des excuses, juste que le minable se la jouait trop edgy à son goût. Habituellement, il en aurait rien eu à foutre, vraiment. C'était lui le gagnant dans l'histoire, que l'autre soit un mauvais perdant était presque normal. Et il pouvait pas vraiment dire qu'on l'insultait jamais, ce serait un gros mensonge. Mais Kaz, comme tous les connards, avait du mal à laisser passer les choses quand une tronche lui revenait pas. Ça tombait mal, aujourd'hui, la tronche du mec lui revenait pas. Il avait presque une tête d'aigle et ça, c'était impardonnable. Il pouvait juste pas fermer les yeux. Impossible, il dormirait pas bien la nuit. Je t'emmerde profond, "va te faire" Il en fallait pas plus pour qu'il lui mette un coup de pied à l'arrière du genou. On le féliciterait pas pour son attaque héroïque mais encore une fois, il en avait rien à branler de taper sur un branleur.

Ferme ta gueule ! T'as aucun droit de te plaindre. Si tu voulais pas ramasser, t'avais qu'à pas déconner, trouduc ! C'était quoi ce crétin ? Depuis quand est-ce qu'on avait le culot de se la jouer voleur sans en assumer les conséquences ? Kaz, il en faisait des conneries mais ça ne lui serait jamais venu à l'esprit de se plaindre sérieusement après avoir été démasqué. Jouer la victime pour tenter de s'échapper ? Oui, bien évidemment. Se plaindre et ronchonner ? Toujours, il acceptait jamais rien sans donner son avis, le con...mais sérieusement prendre la mouche de cette façon, c'était d'un culot encore jamais vu. On t'a jamais appris à assumer les conséquences de tes actes ? Tu te prends pour qui ? T'es rien de plus qu'un merdeux, t'attends pas à des traitements de faveur. Est-ce que ce gars était vraiment un pigeon ? Kaz n'avait pas de mal à admettre que les jaguars n'étaient probablement pas les plus fins et subtiles habitants de la ville mais un tel niveau de stupidité rivalisait bien trop avec ce qu'il avait vu des pigeons. Qu'il soit un ancien espion aigle coincé dans son rôle l'aurait même plus étonné à ce point. Et toi, t'as rien d'autre à faire que de te la jouer edgelord ? Tu crois que tu fais peur à qui avec tes petits poings de pigeon ? C'était clairement pas Kaz qui était impressioné. Parce qu'il avait beau se la jouer discret la plupart de son temps et qu'il évitait de se battre parce que c'était bien trop fatiguant à son goût, s'il devait mettre une raclée au petit branleur pour lui apprendre la vie, il irait jusqu'au bout. Ah, qu'était-il devenu ? Ce petit con le forçait même à prendre le rôle de moralisateur qu'il exécrait tant.