Gaëlle & Sasha
A41 SI J82 (après-midi)

no cape needed

J'étais une femme en mission et rien n'aurait su me détourner de mon but. Avoir à bousculer un certain nombre de personnes n'était qu'un dégât collatéral sans importance. Je savais bien qu'il fallait éviter de s'attirer des ennuis, mais ce n'était pas comme si j'avais fait exprès de cogner un Dragon ou un Jaguar. Je me fichais complètement de leur allégeance, mon attitude était la même que sur le territoire. La seule différence étant que, ici, j'étais une anonyme pour beaucoup, là où on osait généralement moins se plaindre de mon comportement chez les Vipères. L'avantage du rang. Le risque de m'en prendre une parce que j'avais titillé la mauvaise personne n'aurait pourtant pas pu m'arrêter non plus. En plus, je touchais au but. Je franchis les dernières barrières humaines en récoltant une volée d'injures pour aller m'accrocher au bras de Sasha.

- Aide-moi, y a des gens qui veulent me parler !

Ils étaient désormais loin, ces bavards, mais ce n'était pas la première fois aujourd'hui que j'avais affaire à ce désagrément. A croire que ces idiots n'étaient pas capables de comprendre les signaux plutôt évidents. Apparemment, une œillade meurtrière, le silence, et l'air grognon ne faisaient pas effet sur tout le monde. Mon atout suivant était de leur coller la mire de mon arbalète bidouillée sous le nez, mais on aurait eu le culot de considérer ça comme une incitation à la violence. J'avais donc décidé de choisir la solution pacifiste en rejoignant ma binôme qui avait souvent la réponse à tout dès que l'on parlait de choses relationnelles.

- On m'a collé un sourire avenant sur le visage ou quoi ?

Saëlle

année 41 ; saison intermédiaire ; après-midi 82

no cape needed

Sans crier gare, j'avais senti qu'on m’agrippait le bras et si je ne la connaissais pas aussi bien que ça, j'aurais dû me méfier et réagir instantanément sauf que c'était du Gaëlle tout craché. Sans parler des jurons qui s'étaient rapprochés progressivement. L'aventure, ça lui plaisait forcément et elle retournait aux sources par la même occasion mais elle aurait préféré, et de loin, pouvoir le vivre en solo ou en comité réduit, comité qu'elle aurait choisi avec soin. J'étais certaine, même si c'était peut-être présomptueux, qu'elle m'aurait incluse dans sa petite aventure très sélect parce qu'elle avait appris à fonctionner avec une pipelette dans mon genre. Sans Laz, j'aimais à croire que j'étais l'un de ses piliers, même si je n'avais pas la prétention de croire qu'elle ne se débrouillerait pas toute seule. Elle, contrairement à moi, avait beaucoup de ressources en elle grâce à sa vie de baroudeuse, d'ancienne Libre. « Aide-moi, y a des gens qui veulent me parler ! » J'avais visé dans le mille. Le problème, c'était les autres. Ceux qui pensaient qu'on pouvait lui parler comme ça, sans raison, si ce n'était celle d'échanger et de sociabiliser. D'ordinaire, on la connaissait et on lui foutait la paix mais beaucoup trop de personnes n'aurait pu deviner son nom, alors son caractère. C'était là tout le problème d'être une Armurière, surtout un modèle comme elle. Pour seule réponse, j'avais rigolé, sans la moindre méchanceté. C'était tellement drôle de la retrouver aussi perdue soudainement.

« On m'a collé un sourire avenant sur le visage ou quoi ? » Gaëlle et ses questions qui en disaient long sur son comportement social. Il n'y avait que les Vipères pour la comprendre, et encore, une partie seulement. Les pauvres Dragons ou Jaguars qui avaient osé tenter une approche sans la moindre intention mauvaise dans la tête. Un rictus se dessina sur mon visage alors que je me tournais pour faire mine de l'inspecter sous tous ses traits. « Je te rassure, t'as toujours cette tête de vieil ours mal léché. Mon petit ours préféré ! » La taquiner ne lui ferait pas de tort. J'avais le privilège de pouvoir le faire sans risquer d'avoir une balle entre les yeux. « Est-ce que tu as parlé à quelqu'un hier soir ? A part moi, quand je suis venue t'embêter pendant la nuit. Tu peux me le dire, je suis pas jalouse. » Annoncé comme ça, les gens autour de nous auraient tous les droits de se poser des questions au sujet de la nature de notre relation. « S'ils t'ont vu parler avec quelqu'un, tu as peut-être ruiné ton mécanisme de défense. Après tout, ce genre de voyage, ça rend les gens plus propices à discuter avec un inconnu. Pour survivre, et tu dois le savoir, il faut se faire des alliés face à l'inconnu. Tu veux peut-être d'ailleurs me raconter ce que tu sais de cet extérieur en l'échange de conseils sur la sociabilisation et ses signes évidents ? » Un deal qui n'en était pas un puisque nous allions toutes les deux parler. Elle n'était pas bavarde mais elle avait échangé quelques anecdotes auprès d'un feu chez elle, à certains moments, alors dans de pareilles conditions, elle n'allait certainement pas se retenir, surtout si ça lui évitait de voir quelqu'un d'autre rappliquer.

Gaëlle & Sasha
A41 SI J82 (après-midi)

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Ce périple était un enfer. Qui avait eu l'idée stupide de mettre autant de gens sur la même route - même pas une route, un tracé dessiné à main levée - ? Je ne comprenais même pas pourquoi les gens ne tentaient pas de s'écarter un peu plus. Et Sasha qui se foutait ouvertement de ma gueule. C'était du propre. Comme si le moment était à la plaisanterie. C'était la crise, une véritable urgence. Il n'était pas question que je supporte tout ce bordel durant autant de jours. J'allais finir par me tirer une lame de scie dans la gorge, juste histoire d'en finir proprement. Au moins, mes créations ne me trahissaient jamais, elles, au moins.

- T'es gentille, tu te calmes, mais direct, je suis plus grande que toi.

La différence n'était pas énorme, mais elle comptait quand même. Quelle idée de me comparer à un bébé ours. Si je devais être quelque chose, c'était au moins un putain de grizzli. Tiens, une idée. Il m'aurait suffit de dégoter un grizzli - hautement improbable dans cette région -, de l'énerver un coup, et de le laisser faire un carnage parmi les voyageurs. Efficace et avec beaucoup de risques, mais il y aurait toujours un arbre sur lequel grimper. Avec Sasha. Plus quelques Vipères. Merde, il allait nous falloir une forêt plus balèze que prévu. Plan abandonné, les efforts ne valaient pas la récompense. Heureusement, elle s'était enfin décidée à être sérieuse.

- Est-ce que j'ai parlé avec quelqu'un ?

Il y avait un poil d'outrage dans ma voix. Non, mais quelle idée ! Sauf que... La veille, j'avais parlé avec Machin dans la forêt. Peut-être avions-nous aussi échangé quelques mots lors de la soirée, mais rien qui ne ressemblait à une vraie conversation.

- Peut-être.

Si c'était ça, la grande raison, il allait falloir que je me débarrasse de cette idiote. Franchement, je n'aurais même pas dû être étonnée que cette idiote attire les emmerdes. C'était bien son genre de me pourrir la vie par des moyens dérobés.

- J'aurais besoin de conseils si je voulais sociabiliser, ce qui n'est pas le cas. Mais bon, je vais mordre, ce n'est pas comme si on avait grand chose à faire entre les pauses. Tu veux savoir quoi ?

Saëlle

année 41 ; saison intermédiaire ; après-midi 82

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« T'es gentille, tu te calmes, mais direct, je suis plus grande que toi. » Gaëlle s'était comme sentie obligée de préciser que j'étais à peine plus petite qu'elle alors que dans le fond, ce qui la dérangeait réellement, c'était d'être comparée à un ourson. Je la connaissais par cœur à force de traîner dans ses pattes et même si j'étais effectivement plus petite qu'elle, ce n'était pas le nœud du problème. C'était pour cette raison précisément que je ne m'étais pas offusquée. Personnellement, j'étais bien au-dessus de ces considérations de tailles. June, notre nouvelle Fine Lame, me faisait froid dans le dos alors qu'elle était plus petite que moi. C'était bien la preuve que tout ce qui était petit n'était pas forcément mignon ou gentil de prime abord. Au lieu de râler, je me permis de rire à sa remarque, haussant les épaules une fois le rire fini.

« Est-ce que j'ai parlé avec quelqu'un ? » Il fallait qu'elle joue les indignées jusqu'à ce que ça semble faire fonctionner son crâne. « Peut-être. » Ma bouche s'arrondit d'étonnement. Ce n'était pas tous les jours que Gaëlle parlait à quelqu'un. Les seules personnes à qui elle parlait en-dehors des obligations ou des contacts très rapides avec les Membres du clan, étaient Laz, Théa, moi... Et cette fille dont elle m'avait parlé ? L'Aigle ne pouvait pas en faire partie, ils étaient trop épuisés. Je ne la voyais pas parler avec n'importe qui, alors ça ne pouvait être qu'elle. En fait, ça pouvait être n'importe qui dans une situation particulière où elle n'aurait pas eu d'autre choix que de communiquer mais elle ne communiquait jamais pour ne rien dire. Ça devait forcément être cette Dragonne. Il fallait que j'en sache plus.

« J'aurais besoin de conseils si je voulais sociabiliser, ce qui n'est pas le cas. Mais bon, je vais mordre, ce n'est pas comme si on avait grand chose à faire entre les pauses. Tu veux savoir quoi ? » Le temps de chercher une façon de tourner les choses, elle continuait. Elle aurait presque pu me faire concurrence cette fois. Elle parlait et parlait et parlait... On l'avait vraiment détraquée. « La personne à qui t'as peut-être parlé, ce serait pas la Dragonne ? La fameuse Dragonne ? » Ma curiosité avait été piquée, je devais en connaître le fin mot de l'histoire. Ça ne se passerait pas autrement. D'une part parce que c'était important et confus pour elle, d'autre part parce que je voulais être au courant de tous les ragots au sujet de ma binôme.

Gaëlle & Sasha
A41 SI J82 (après-midi)

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Naturellement, elle ne lâchait pas la piste. Toute mignonne soit-elle avec ses grands sourires, parfois, elle ne valait pas mieux qu'un chien de chasse ayant flairé un peu de sang. Et tous les moyens étaient bons pour obtenir ce qu'elle voulait. Mais dans quoi j'avais été me fourrer ? Moi et ma grande gueule. Et après ça on allait encore se demander pourquoi je n'aimais pas perdre mon temps avec les autres.

- Je pensais que tu voulais savoir des trucs sur la vie sauvage, pas sur les idiots avec qui on voyage.

La défense était beaucoup trop maigre et j'en avais conscience. Même si l'idée était tentante, je ne pouvais pas lui reprocher de pousser le sujet vers l'avant. Après tout, j'avais été vague et il y avait eu ce moment après l'attaque. Ce moment particulièrement gênant que j'avais pris soin de ne jamais remettre sur le tapis, mais qu'elle n'avait pas oublié. Cela aurait été trop beau.

- Dis pas ça comme ça, on va s'imaginer des trucs.

Bon, en l’occurrence, il n'y avait plus grand chose à imaginer après ce qu'il s'était passé dans la forêt, mais toute la cohorte n'avait pas besoin de le savoir.

- Ouais, c'est elle.

J'avais fini par grommeler, sans trop savoir quoi dire d'autre. Nous avions communiqué un peu en terminant l'installation du camp, mais sans plus. Mais je ne pouvais nier que j'avais été un peu moins à cran pour le reste de la soirée, d'autant plus si on prenait en compte le troupeau qui nous entourait. La mauvaise humeur était montée moins vite et j'avais fait preuve d'un chouïa de patience supplémentaire. Okay, j'avais ma réponse. Je me claquais violemment la main sur le visage, une pluie d'insultes s'échappant par la même occasion.

- Bordel ! Je suis détraquée. C'est pour ça qu'ils me parlent.

Saëlle

année 41 ; saison intermédiaire ; après-midi 82

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« Je pensais que tu voulais savoir des trucs sur la vie sauvage, pas sur les idiots avec qui on voyage. » La question était légitime mais idiote en même temps, elle savait très bien que j'étais curieuse de nature, que j'aimais tous les ragots et que je m'intéressais forcément à sa vie, plus encore qu'à celle des autres, parce qu'elle représentait beaucoup de choses pour moi, une binôme, une famille aussi et une véritable amie, même si elle était particulière. Tout le monde ne pouvait pas la comprendre. Il fallait beaucoup d'années d'entraînement et même moi, je n'en étais pas arrivée là. La preuve, elle avait réussi à me surprendre pendant la saison polaire. Pour seule réponse, j'avais haussé les épaules, un sourire aux lèvres, amusée par la situation. Je savais qu'elle m'en tiendrait rigueur mais pas longtemps. Elle mettait vite de côté ce qui la contrariait pour se concentrer sur ce qu'elle aimait le plus, son travail.

« Dis pas ça comme ça, on va s'imaginer des trucs. » Je lâchai un petit oups, pas du tout sincère, avant de sourire de plus belle. Personne ne nous écoutait réellement pour le moment et elle en faisait des tonnes, de toute façon. D'autant que personne n'oserait tenter de la titiller, même si elle avait l'air d'être dans son meilleur jour, parce que sa réputation la précédait. On me demandait souvent comment je faisais pour survivre en tant que binôme de l'armurière. Encore une fois, ils ne cherchaient pas à changer leurs habitudes pour mieux l'aborder. Elle ne faisait pas non plus d'effort. Je levai les yeux au ciel, elle comprendrait le message.

« Ouais, c'est elle. » Là, mes yeux s'étaient illuminés, signe de victoire et excitée par cette nouvelle. J'étais soulagée qu'elle ait pu lui parler mais je ne l'imaginais pas avoir dit à la Dragonne en question qu'elle s'était fait du mouron pour elle, parce que Gaëlle n'exprimait jamais rien. Elle gardait tout pour elle et elle essayait même de faire retomber toute angoisse qui tenterait de prendre de la place. Elle ne s'inquiétait pour personne, qu'elle disait. J'étais certaine, dans le fond, qu'elle s'en faisait au moins pour Laz et pour cette Dragonne, comme elle me l'avait démontré. C'était une question de fierté et peut-être une façon de se protéger. Rien de vrai, en tout cas.

« Bordel ! Je suis détraquée. C'est pour ça qu'ils me parlent. » Elle s'était claquer le visage et je n'avais pu retenir un rire spontané et peu discret. Gaëlle donnait l'impression de réaliser qu'elle pouvait être une autre personne, en fonction de la situation. En fonction des personnes à qui elle parlait. « Appelle ça être détraqué si tu veux mais c'est bien la preuve que la Dragonne te fait de l'effet. Tu t'es attachée à elle, il y a que toi pour croire le contraire. Et j'sais bien que tu veux pas faire ami-ami mais ce n'est pas parce qu'on te parle qu'on attend que tu deviennes une amie. » Le souci était qu'elle ne voulait pas parler aux autres. « Et tu pourras jamais contrôler les autres comme tu contrôles tes armes. Si tu n'veux pas leur parler, c'est encore à toi de décider de faire comme s'ils n'étaient pas là. »

Gaëlle & Sasha
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A la voir, on aurait pu croire que c'était moi qui m'imaginais des trucs et qui en faisais des tonnes. Pourtant, c'était bien elle qui se laissait bercer par son imagination. Ce n'était pas parce qu'elle s'emmerdait pendant qu'on marchait qu'il fallait qu'elle se fasse des films. Pas pour la première fois depuis le début de notre coopération - pas du tout -, je me demandais comment elle avait bien pu faire pour me rendre si docile. J'en aurais flingué pour beaucoup moins que ça. Je m'ouvrais aussi beaucoup trop rapidement, même pas pour la faire taire, juste comme ça. Je ne ressentais pas toujours le besoin de parler, mais il fallait admettre qu'elle serait la seule personne en qui je pourrais avoir un minimum confiance durant plusieurs jours et qu'il faudrait que je fasse sans la présence de Laz. Quelque chose que je n'avais pas eu à faire depuis... A vrai dire, quelque chose que je n'avais jamais fait. Rien d'étonnant donc à ce que je me sente légèrement différente. Cela ne justifiait pas tout, mais c'était un début.

- J'peux pas dire le contraire.

Je l'avais grommelé entre mes dents, levant les yeux au ciel. Est-ce que je m'étais attachée à Sawyer ? Nous n'irions peut-être pas jusque là. Est-ce qu'elle me faisait de l'effet ? Yupe, définitivement. Un truc de plus pour la rendre si agaçante. Mais avec elle, au moins, je n'avais pas l'impression de perdre mon temps comme avec les autres. Elle avait au moins le mérite d'être intéressante.

- Ça, je sais faire. Faut que je reprenne les bonnes vieilles habitudes. Reprendre du début comme avec les Vipères jusqu'à ce qu'ils comprennent que ça sert à rien de venir me faire chier. Même si j'aurais sans doute plus vite fait de te garder dans les parages comme ça tu causes aux gens et je me casse. T'en as besoin, toi.

Saëlle

année 41 ; saison intermédiaire ; après-midi 82

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« J'peux pas dire le contraire. » Au moins, elle admettait un premier point, ce n'était pas une mince victoire avec Gaëlle, que j'appréciais énormément mais qui n'avait pas son pareil quand il s'agissait de nier certaines évidences qui ne lui plaisaient pas. En soi, tout le monde avait du mal avec certaines choses mais elle, c'était carrément l'inverse, elle acceptait trop peu de choses, surtout quand ça concernait sa vie sociale. C'était pour ça que peu de personnes gravitaient autour d'elle et que j'étais vachement heureuse d'en faire partie, même si je ne pouvais pas m'empêcher d'avoir peur qu'elle me jette, un peu comme mes parents. Ça ne m'empêchait pas d'être contente qu'elle se soit attachée à quelqu'un d'autre, il fallait juste que je fasse taire cette inquiétude et j'en étais heureusement capable. J'avais le sourire de la victoire sur les lèvres en guise de réponse et je ne m'étais pas encore écroulée pour autant. Elle n'aurait pas manqué l'occasion de me dire que c'était ma faute, que j'en faisais trop.

« Ça, je sais faire. Faut que je reprenne les bonnes vieilles habitudes. Reprendre du début comme avec les Vipères jusqu'à ce qu'ils comprennent que ça sert à rien de venir me faire chier. Même si j'aurais sans doute plus vite fait de te garder dans les parages comme ça tu causes aux gens et je me casse. T'en as besoin, toi. » C'était tordu et maladroit comme façon d'amener les choses mais j'avais appris que Gaëlle ne le faisait pas exprès. J'avais simplement haussé les épaules, pas plus embêtée que ça par cette réflexion qui faisait sens quand on la connaissait depuis un moment. « Fais comme tu veux, j'suis pas difficile. » C'était vrai, je ne me compliquais pas forcément la vie, pas la plupart du temps en tout cas.

Gaëlle & Sasha
A41 SI J82 (après-midi)

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Est-ce que c'était pour ça que tout était si facile avec elle ? Parce qu'elle n'était pas difficile et s'adaptait sans mal aux distances que je plaçais entre nous ? Elle ne les respectait pas forcément pourtant, elle avait parfois même cette tendance de les exploser. Peut-être pas lorsqu'elles comptaient vraiment, mais de façon nettement plus nette que d'autres filles. Elle se pliait aussi souvent à ce qu'on aurait pu voir comme des caprices de ma part. Si nous en étions là, c'était grâce à ses efforts. Moi, ça m'arrangeait pas mal qu'elle soit comme elle l'était. En quelques sortes. Difficile de dire si c'était par contre vraiment bon pour elle. Est-ce que ça comptait vraiment ? Un peu quand même.

- Peut-être que tu devrais l'être plus.

J'avais fini par lâcher ça, les sourcils froncés par la concentration.

- T'éviteras de l'être avec moi parce que ça me ferait chier, mais avec les autres, c'est pas pareil. Tu peux te permettre d'être difficile, c'est à eux de te mériter.

J'en étais convaincue. Sasha n'était pas n'importe qui après tout. Elle était ma binôme et ça devait bien compter pour quelque chose. En plus, elle me manquait pas de qualités. Elle avait toujours fait preuve de patience et elle savait y faire avec les autres. Même lorsqu'elle bossait, personne ne lui avait jamais rien reproché. Elle valait le coup que les gens se battent un peu pour la connaître, je ne voyais rien qui aurait dû la pousser à être celle qui faisait systématiquement des efforts.

Saëlle

année 41 ; saison intermédiaire ; après-midi 82

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« Peut-être que tu devrais l'être plus. » Venant de Gaëlle, ce n'était pas exactement surprenant, parce qu'elle avait bien prouvé qu'elle s'intéressait un minimum à moi, mais, en tout cas, c'était certainement la preuve ultime que je n'étais pas une personne parmi d'autres. Je n'étais pas parfaite, je ne ressemblais pas à la binôme qui obéissait aveuglément à tous ses caprices, je parlais beaucoup trop pour elle et malgré tous ces éléments, elle pensait sincèrement à moi, elle était réellement attentive et attentionnée. J'étais bien consciente qu'elle n'était pas qu'une armurière sans état d'âme mais j'avais également conscience que j'avais de la chance de découvrir ce côté plus insoupçonné d'elle.

« T'éviteras de l'être avec moi parce que ça me ferait chier, mais avec les autres, c'est pas pareil. Tu peux te permettre d'être difficile, c'est à eux de te mériter. » C'était quelque chose qu'elle ne disait pas facilement et qu'elle ne disait certainement pas à beaucoup de personnes. C'était pour ça que j'avais bloqué pendant quelques secondes, oubliant presque de la suivre. J'avais juste souri dans un premier temps. « Merci. » En faire des tonnes avec elle et à ce moment précis où elle se montrait aussi impliquée dans ma vie aurait été un très mauvais choix, même moi je m'en rendais compte. Je devais apprécier l'instant pour ce qu'il était.