breaking the lovebirds' eggs
Année 41 - saison intermédiaire (jour 82)

En tant que Seconde ton ambition vis à vis des Membres avait souvent été aux antipodes de celle de Noâ. Jamais tu n'avais recherché la proximité, la relation facile et des amis dans toutes les générations. Sans dire que tu étais contre tout rapprochement, tu restais consciente que ton rôle avait toujours été celui de la loi. Implacable plus souvent qu'à ton tour. A penser plus au clan qu'à des histoires personnelles. Jouer la police n'avait jamais été particulièrement dérangeant. Tes idées étaient aussi plutôt bien arrêtées. L'une d'entre elles en particulier déplaisait. Tu avais toujours eu cette croyance qu'un service efficace et une relation n'allait pas ensemble. L'amour poussait à prendre des décisions trop précipitées. Il faisait oublier les priorités du clan. Ta Chef ne partageait pas cet état d'esprit d'où l'absence de réglementation à ce sujet. Cela ne t'empêchait pas de rester particulièrement regardante de ce qui se faisait ou non au sein du QG. Seulement si une relation entre Jaguars se voulait déjà problématique, ce n'était rien en comparaison de liens inter-clans. Véritable brèche pour la sécurité commune. De telles relations ne pouvaient attirer que des problèmes. Ta première pensée allant naturellement à cette idylle ridicule entre Alessandra et le Second des Aigles qui avait provoqué tant d'embrouilles. Depuis ton œil n'avait pu être que plus attentif. Et la veille certaines interactions t'avaient frappée. On dirait sûrement que ça n'était pas tes oignons et que tu aurais dû laisser à chacun l'opportunité de vivre sa vie. Peut-être était-ce vrai. Mais jamais cela ne t'empêcherait de mettre en garde. La prévention suffisait parfois à éviter des catastrophes. Ou à la minimiser tout du moins. « Willow. » Le besoin de remettre les choses en place t'avait titillé durant une bonne partie de la matinée mais tu n'avais eu l'occasion d'accoster cette Jaguar que plus tard au cours de l'après-midi. « Il faut qu'on parle d'un truc. » Tu avais pris ton rythme à ses côtés. La voix légèrement plus basse qu'à l'accoutumé pour ne pas faire profiter des voisins gênants de cette conversation. « Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer ton rapprochement avec une Dragonne hier soir. »

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Année 41 - saison intermédiaire (jour 82)

« Ne te fatigue pas. Je sais ce que tu en penses. Tout le monde connaît ton point de vue, même moi. On peut s'éviter la suite ? Je suis prête à être punie pour insubordination mais pas à écouter un discours très clair dans ma tête. » Elle te rejetait sur tous les points. Aucun doute là-dessus. La morsure, bien que violente, n'était même pas si surprenante que ça. On ne l'avait jamais dit très ouverte à la conversation. Cette réaction n'en reste pas moins une indication claire sur l'importance de cette relation qu'elle entretient avec cette dragonne. Cela ne devait pas dater de la veille. C'est aussi positif que négatif. Cela réclamerait que tu agisses d'autant plus de délicatesse mais ça n'a jamais été ton fort. « Ce n'est pas exactement pareil. Les histoires de cœur menacent l'équilibre interne du QG. Ici on parle d'une fille venant d'un clan qui s'est déclaré comme ennemi de la ville. » Il ne faut pas croire que cela te vient si facilement que ça. Que tu apprécies d'avoir à juger des trucs qui ne devraient pas te regarder. Mais c'est la réalité de ton job. Peu de choses tenaient du privé dans une telle configuration. « Je me fiche complètement de ce que tu fais avec elle. Par contre ta réaction lorsque vous vous retrouverez d'un côté et de l'autre d'un champ de bataille m'intéresse plus. La hache de guerre sera vite déterrée. » Cela peut sembler cruel mais c'est surtout réaliste. Les relations inter-clans avaient toutes les raisons du monde de se terminer dans les larmes et le sang. Ou la trahison. « C'est sans même parler de leur propension à manigancer des trucs. » Tu ne nieras pas que pour ça c'est cette dent que tu as contre le Nord qui s'exprime. Tu sais qu'ils ne sont pas tous pareils mais c'est parfois difficile à voir. Tu gardes une appréhension, un jugement.

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« Noâ n'aurait certainement pas fait une telle allusion. Peut-être parce qu'elle cherche à connaître ses Membres ? Si tu veux me voir comme une potentielle traîtresse, prends de véritables mesures et ne tourne pas autour du pot. » C'est une évidence. Tu n'as jamais été comme Noâ. Depuis toujours tu es une enfant taiseuse. Trop sérieuse. Obnubilée par l'entraînement et rêvant d'un clan plus juste et digne. Tu sais ce qu'ils disent sur toi. Cette vision qu'ils ont. Tu es l'emmerdeuse de Seconde. Celle qui est toujours sur leur dos. Trop robotique et à cheval sur les règles. Au début tu n'avais pas voulu instaurer cette distance. Tu t'étais mêlée aux gens de ta fournée. Tu t'étais fait des amis. Mais elle était venue malgré toi. Au fil de mots mal choisis, de dureté et d'incompréhension. Ça n'avait pas été plus mal vu ton poste. Et puis c'était devenu naturel. Pourquoi lutter contre le courant ? Cela ne signifiait pas que parfois tu n'aurais pas voulu pouvoir te mêler plus aux Membres. Ne pas être que cette donneuse de leçons. Alice avait été un bol d'air frais. Mais ça ne veut pas dire non plus que l'attaque te touche. Elle n'est pas la première et ne sera pas la dernière. C'est dommage qu'elle ne comprenne pas mais c'est normal. Tout est plus vif lorsqu'il s'agit d'amour. Et tu es trop maladroite avec ce sujet. « Quant à cette Dragonne, elle est tout sauf ce qu'on voit des Dragons. Alors, évite de sous-entendre qu'elle me tendrait un piège. » De toute évidence tu as touché un nerf. Rien d'étonnant. Pour faire sortir quelqu'un de ces gonds il suffisait de connaître ses faiblesses. Cette dragonne en est une pour Willow. Elle encaisse lorsqu'il s'agit d'elle mais sort les griffes pour ceux qu'elle aime. Tu ne l'as pas voulu. Lui faire ressentir ça. Peut-être que c'est juste ce que tu es. Ce que tu es devenue. « Tu ne diras pas que je ne t'aurais pas prévenue. » Aucune discussion n'est possible. Autant arrêter là avant que ça n'aille trop loin et que tu sois forcée d'agir. Qu'elle ait du répondant ne te dérange pas en soi. C'est toi qui l'a poussée et tu en es consciente. Tu détesterais donc que quelque chose soit dit ou fait trop ouvertement et demande une réaction pour éviter de créer un précédent. Le mieux est donc que tu te retires. « Une dernière chose. » Elle ne le prendra sans doute pas bien mais tu ne penses pas à mal en le disant. Encore une fois tu la met en garde. Car elle est une Jaguar et que tu protèges les tiens même si souvent ils ne le comprennent pas. « Que tu ne te méfies pas d'elle c'est une chose mais méfie toi d'eux. Leurs mœurs sont différents. Tu me trouves injuste mais eux sont cruels. Des Jaguars sont morts d'aimer des Dragons. Et vice-versa. » Peut-être aurais-tu dû commencer par là. Lui parler des faits. De ces histoires que tu sais trop réelles et de ce que la vie de Seconde t'a apprise sur le Nord. Mais il est trop tard pour ça. Elle a raison. Tu n'es vraiment pas comme Noâ. Elle aurait pourtant des choses à dire sur le sujet.