Noâ & Jude

This is home

La langue pendante, le chien observait le paysage défilant derrière la vitre de la jeep escaladant tranquillement la colline. Il découvrait son nouvel univers, un environnement qui bien vite deviendrait familier. Derrière le volant, elle lui lançait de temps en temps un coup d’œil, un sourire bien trop grand sur les lèvres. Depuis la veille, après un coup de fil à Nuka pour lui dire qu'elle serait bientôt à la maison, il ne la quittait plus. Voyager avait été une expérience jouissive, mais avec décembre qui s'installait, elle avait ressenti le besoin grandissant de retourner là où toute sa famille se trouvait. Les retrouver après tout ce temps semblait être le meilleur des sentiments. Lâchant une main, elle la glissa dans le pelage du cabot qui l'avait accompagné durant ses plus récentes aventures.

- Tu verras, Domino, j'en connais un qui va t'adorer dès le premier regard. Tu risques même de me voler la vedette.

C'était un détail dont elle n'avait pas parlé, il serait donc l'invité surprise de ces fêtes. Le panneau d'accueil de la ville, tout entouré de lampes clignotantes, attira à nouveau son attention sur la route. Presque. Elle ralentit un peu après le dernier tournant, s'engageant presque avec révérence dans les rues. Comme toujours, l'animation ne manquait pas, trouver une place à proximité du café ne fut donc pas une partie de plaisir. Le plus simple aurait sûrement été de passer d'abord par la maison, mais elle avait voulu tenter sa chance là où elle était presque certaine de croiser un visage familier. Une fois parquée, elle prit quelques secondes sur le trottoir pour s'étirer après toutes ces heures de route. Elle passa aussi sa veste après un frisson, le temps n'avait rien de comparable avec l'Alaska, mais ils restaient loin des tropiques. Elle finit par faire claquer sa langue pour que le chien saute du siège et se dirigea vers le café. Des changements, il n'y en avait pas eu des masses, mais elle passa quand même quelques secondes à observer la salle, par la fenêtre. Son sourire ne se fit que plus grand lorsqu'elle aperçu Jude qui lui donna l'impression de virevolter entre les tables, maîtresse en son domaine. Ne résistant plus, elle entra et se campa au milieu de tout, les mains sur les hanches. Les retrouvailles la rendaient insouciante.

- Tu m'es étonnement familière. Ne nous serions pas déjà croisées quelque part ?

jude & noâ

this is home

J'avais toujours aimé cette période de l'année parce que ça signifiait beaucoup de choses importantes et symboliques à mes yeux : ma sœur revenait toujours à ce moment-là, Nuka en était ravi, je tentais une approche avec Samuel et le café ne désemplissait pas. Cela ne voulait pas dire que nous n'avions pas du temps pour nous, Zeke et moi, mais travailler dans ce café qu'il avait hérité de son père était aussi une façon d'être ensemble, en faisant quelque chose qui nous tenait à cœur, c'est-à-dire servir des personnes qui n'avaient, à force, plus de secrets pour nous. Je joignais l'utile à l'agréable puisque j'avais besoin de ce contact social à tout prix et quoi de mieux qu'un endroit où les gens viennent boire et manger, se réchauffant le cœur et le corps par la même occasion.

Une commande par-ci, une commande par-là. En cette période, l'aide de Yulia était d'autant plus précieuse. Nous avions eu beaucoup de chance de l'avoir trouvée, j'en étais consciente. « Tu m'es étonnement familière. Ne nous serions pas déjà croisées quelque part ? » Surtout dans ces moments-là. Je ne pouvais pas me contenir quand elle revenait et j'en perdais les clients de vue pendant un moment. Puisque nous vivions dans une petite ville, loin des grandes pompes de New York, les gens comprenaient l'importance de telles retrouvailles, qu'elles se répètent chaque année ou non. J'avais pris mon bloc-notes et mon stylo à billes d'une main pour la serrer dans mes bras. « Noâ ! » Je n'avais pas tout de suite calculé la présence du chien, bien trop absorbée par la présence de ma cadette. « Tu as fait attention à toi ? T'as mangé correctement ? T'as besoin d'énergie pour tout ça, tu sais. Tu veux que je demande qu'on te prépare quelque chose en cuisine ? » Et puis, le déclic. « Oh, tu l'as trouvé où, lui ? A moins que ce ne soit une femelle ? C'est Nuka qui va plus savoir où donner de la tête entre ton retour et ce nouveau membre de la famille ! » Je lâchai ma sœur. La laisser respirer ne lui ferait pas de mal et en plus, je mourrais d'envie de caresser le bougre à ses côtés qui avait une bonne bouille.