don't thank me, I'm not doing it for you
Année 41, saison intermédiaire (zénith 81)

Dire que tu n'es pas dans ton environnement est un euphémisme. Ici tu n'es tout simplement pas à l'aise. Deux raisons expliquent cela. La plus évidente est ce monde sauvage qui t'entoure, l'inconnu. Reed a toujours raison et c'est encore vrai cette fois-ci : tu n'y connais rien à la survie. Après la rébellion elle t'avait souvent lâchée dans la ville pour que tu apprennes à te débrouiller mais ça ne t'avait pas préparée à tout ça. Si tu venais à perdre le groupe, tu serais purement et simplement fichue. Ensuite il y a le souci de ces étrangers tout autour. De ces hommes surtout. C'est con à dire mais tu te sens désormais plus rassurée au côté de l'un des mâles de ton clan. Ils ne paraissent pas inoffensifs à côté des Dragons mais il se dégage d'eux quelque chose de familier quand même. Parmi les Dragons, tu te sens comme une gamine à nouveau. Un sentiment que tu détestes. Tu as passé la matinée avec ton arc à la main, le poing bien trop serré pour le froid qui règne. Mais même lui n'avait pas réussi à te rassurer. Sous tension, tu t'étais écroulée parmi des filles - qu'importe qu'elles soient des Jaguars ou non - dès qu'une pause avait été proposée. Le stress avait comme vidé tes batteries. La suite tu n'aurais pas trop su comment l'expliquer. On avait commencé à te parler et tu n'avais pas été capable de nier les faits lorsque l'une d'elles avait avancé que tu avais l'air sur les nerfs. De fil en aiguille tu t'étais retrouvée avec une solution miracle entre les mains. C'était elle qui l'avait appelée comme ça. Un briquet et une cigarette. Après une longue hésitation durant laquelle certaines filles étaient parties pour discuter avec d'autres gens, tu avais coincé maladroitement la cigarette entre tes lèvres comme tu avais vu un Jaguar le faire un jour. Cela ne devait pas être si sorcier. La vie te donna tort. Le problème venait de ce stupide briquet qui ne voulait pas produire une flamme comme il le devait. « C'est pas putain de compliqué, pourtant. » Trop occupée que tu étais à t'acharner, tu ne l'avais pas entendue arriver. Le briquet t'avait été arraché et elle avait réussi sans mal à l'allumer. C'était frustrant. Mais ta moue ne dura pas longtemps, trop vite remplacée par un rougissement furieux devant tant de proximité. Encore un autre euphémisme que de dire que tu n'es pas habituée à tout ça. Même les filles Jaguars n'entrent pas de la sorte dans ton espace vital. Tu as les yeux collés à sa veste, trop craintive de croiser son regard. « Voilà, maintenant étouffe-toi bien avec. » Tu sursautes à nouveau lorsque le briquet te tombe dessus. Ce que cette fille est brusque ! Mais tu n'as pas le temps de t'en plaindre. Ni la capacité en vérité il faut bien l'avouer. « M'étou-. » Ça y est. Tu commences à tousser dès que tu inspires malencontreusement l'étrange fumée qui se dégage de la cigarette toujours à ta bouche. Tu l'en écartes aussi sec, la lâchant avec un juron lorsque tu touches la braise par accident. Ton existence n'est plus qu'un grand bordel. Tu respires mal entre tes toussotements et tu es ridicule avec la main qui s'agite pour refroidir la pointe de ton gant. Si cette fille ne te prenait pas déjà pour la pire des idiotes, c'est fait cette fois.

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Année 41, saison intermédiaire (zénith 81)

« Aussi douée qu'un bébé qui sort de la ferme. » Encore du charabia. Les mots ont beau tous avoir un sens cela ne t'empêche pas de ne pas comprendre ce qu'ils fichent ensemble. Une chose reste claire : ce n'est pas flatteur. Tu n'apprécies pas la comparaison avec un nouveau-né. Quelle qu'elle soit. Mais ce n'est pas comme si tu étais en position de réagir. Tu tousses encore un moment, dégoûtée par la fumée. De tes gants tu chasses les larmes qui se sont agglutinées au bord de tes paupières. Tes premiers jours de Membre t'ont appris le sens du ridicule mais c'est un peu trop en un coup. Même pour toi. Tu ne sais plus comment te comporter. Tu n'as rien de mordant à déclarer. Alors tu la fixes. Sans même avoir le réflexe de récupérer ton bien. Tu ne sais même pas si tu le veux vraiment. La première expérience n'a rien eu de plaisant. « C'est quoi ce réflexe d'avaler la fumée ? Tu te penches souvent sur un feu pour le respirer ? Tu inspires, tu bloques, tu expires. Si tu le fais correctement, tu t'étouffes pas. Simple et logique. Mais y a encore plus logique, tu fumes pas. T'es déjà pas douée, ma pauvre fille, est-ce que c'est bien malin de foutre le bordel dans ta petite tête ? » Donc vraiment elle n'en a pas fini de te prendre pour une idiote. Tu ne peux même pas dire comme une gosse, c'est pire. Est-ce qu'elle pense avoir rencontré l'attardée du clan ? Kaz lui donnerait sans doute raison mais tu l'emmerdais celui-là. Avec un fond d'agacement tu chasses la main qui est entré dans ton espace vital. « Eh. Oh. C'est bon. » Très profond. « C'est la première fois que j'essaye un truc comme ça ok ? On peut pas tous être des fumeurs au naturel. » Même si son résonnement a du sens. Il était vrai qu'on n'allait pas respirer la fumée d'un feu alors pourquoi celle-là ? « Et puis tu veux dire quoi par foutre le bordel dans ma tête ? Ces filles elles ont juste dit que ça aidait avec le stress. » Avouer ton anxiété n'est pas aisée. Tu n'en as jamais eu l'occasion. Mais elle n'est qu'une étrangère après tout. Ce détail te délie un peu la langue.

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Année 41, saison intermédiaire (zénith 81)

Une charmante personne y a pas à dire. Tu pourrais lui présenter quelques personnes avec qui elle aurait des points communs chez les Jaguars. C'est un peu l'hôpital qui se fout de la charité. Tu n'as jamais été agréable. « Quelle naïveté ! Je sais pas d'où tu viens, mais on aurait dû t'apprendre à ne pas croire tout ce qu'on te dit. » Elle n'en a pas fini avec ses vérités ? Tu en as assez de ne pas pouvoir lui prétendre qu'elle a tort. Pour le coup tu as été bien conne. Une erreur que tu ne faisais même pas chez les Jaguars. Tu avais relâché la garde parce qu'elles n'étaient que des filles et tu t'en méfiais naturellement moins. Tu as accepté un cadeau alors que vraiment personne n'en faisait dans cette ville. Tu devrais remercier cette grincheuse plutôt que de faire la gueule. Peut-être qu'elle venait de te sauver la peau. Sauf que tu n'as jamais eu la reconnaissance facile. « Ouais, ce truc aide avec le stress parce que ça te détends. Beaucoup trop. C'est la pire idée du monde de fumer ça sans savoir comment tu vas réagir alors que t'es au milieu de nulle part. Si tu veux mon avis, elles se sont bien foutu de ta gueule. M'étonnerait pas qu'elles soient dans le coin à attendre que tu te ridiculises encore plus. » Tu n'aimes pas trop les donneurs de leçon. Encore une fois tu dois reconnaître que ça ne te fait pas de mal d'apprendre. « Mais les putes ! » Ça t'apprendrait à te dire que quelqu'un était sympa. Bien sûr que tout ça n'était que du baratin. Bien sûr qu'elles n'avaient pas approchée la première venue avec une bonne idée dans la tête. Tu as dû faire facile comme cible. La meuf seule. Lorsque tu n'étais pas forcée de traîner avec Kaz, tu n'avais pas grand monde à voir. Tu avais presque eu envie d'aller te venger pour cette farce mais tu ne te leurres pas. Tu es seule. Elles étaient au moins trois et plus âgées. Au mieux tu te serais ridiculisée plus encore. « Merci. J'suppose. » Au moins tu avais fait l'effort. Ce n'était qu'un grommellement et tu t'étais planqué dans ton bonnet pour le dire. Fallait un début à tout. « Tu peux garder ce truc. Vraiment. J'en veux pas. »