Third time's the charm (Koira)

VIPERES DE L'OUEST

Third time's the charm
année 41 - saison intermédiaire (matin 83)

La nuit a été courte. Emplie des cauchemars d'une enfant que tu t'étais jurée de ne plus être. Tu ne pouvais pas dire que le revoir avait déverrouillé quelque chose en toi. Ça aurait été un mensonge. Tu subissais cet état depuis l'attaque chez les Aigles et cette trahison de la part des Dragons. Les voix parentales t'avaient hantées, se délectant de cette culpabilité que tu avais nourrie à cause de cette survie miraculeuse. Tout ça ne t'avait pourtant pas préparée à cette rencontre. Tu avais toujours su qu'il ne t'accueillerait par les bras ouverts mais cette haine à ton égard c'était autre chose. Machinalement tu touches ta gorge, les marques te brûlent encore. Encore une fois tu as réchappé à la mort. Sous ses mains tu avais vraiment cru que ce serait la fin. Le toutou docile qu'il était n'aurait pas dû s'arrêter. En te tuant il aurait comme lavé cette souillure que ta survie jetait sur la famille. Sa famille. Mais quelque chose avait arrêté son geste. Quelque chose que tu n'avais pas compris. Les questions se multipliaient dans ton esprit depuis. A l'aube, tu avais cherché le confort de la salle d'entraînement. Aussi curieux que cela soit. La familiarité d'un lieu qui était presque le même partout t'aidait. Aussi amère étais-tu vis à vis de ton passé, certains détails restaient. Tu avais senti un peu de tension disparaître de tes muscles. Après quelques exercices tu t'étais installée dans un coin où le matériel s'amassait, la période de récupération devenant une sieste qui avait été interrompue par l'arrivée des nouvelles Vipères. L'instructrice du jour était une amie qui n'avait pas jugé bon de te virer. Tu avais fini par observer tout l'entraînement, assise contre le mur, les jambes rassemblées contre le torse. Les regarder se décarcasser pour suivre les instructions avait son charme. Une personne en particulier avait attiré ton attention, les rebonds de sa queue de cheval ne manquant pas de faire revenir ton regard vers elle. Moira mettait toujours autant de cœur à l'ouvrage. Tu lui avais adressé un petit signe de la main à son arrivée et un sourire timide à chaque fois que vos regards s'étaient croisés. Il semblait facile d'exister avec elle. Naturel. Cela t'avait pourtant surprise qu'elle t'approche à la fin de la session. Sa spontanéité t'étonnait toujours. Le fait qu'elle approche à nouveau de quelqu'un qui avait eu avec elle des discussions si déprimantes aussi. Tu ne t'étais vraiment pas montrée sous ton meilleur jour. « Tu t'améliores. » Tu avais glissé en guise de salut, la voix un peu malmenée par la douleur au niveau de tes cordes vocales. Tu ne cherchais pas à la brosser dans le sens du poil, pas vraiment. Elle progressait c'était indéniable. Tu avais pu le voir aujourd'hui. Sûrement ferait-elle de grandes choses.

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Koira

année 41, saison intermédiaire, matinée 83

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Depuis deux jours, une troupe improvisée était partie découvrir de nouveaux horizons et, de notre côté, nous en étions à notre troisième séance d'entraînement. Je m'étais pris des gamelles mais depuis le début je me relevais à chaque fois et toujours plus forte et plus endurante, prête à escalader cette montagne qui se tenait, majestueuse, devant moi. Je voulais pousser mes limites, prouver que ces quelques entraînements privés de la fratrie m'avaient aidé en quelque sorte et me permettrait de grimper de nouveaux échelons, même si je risquais de n'être qu'une Membre médiocre pour qui aucune autre évolution n'était possible. Mon objectif était clair : pouvoir prétendre passer le Test, même si je ne le réussissais que de justesse et pour ça, j'étais prête à me donner beaucoup de mal, qu'importe qu'on croie en moi ou non. Je savais qu'eux me croiraient capables et me pousseraient à me le prouver avant tout.

Je n'avais pas prévu que Korra soit là mais au lieu de me faire perdre mes moyens, sa présence renforçait ma motivation et me donnait un regain d'énergie. Nos regards se croisèrent plusieurs fois et l'espace d'un instant, je l'imaginais me regarder, moi plus que les autres, mais je me rendis vite compte qu'en plus d'être une pensée particulièrement prétentieuse, c'était une pensée dénuée de sens. Elle était certainement fatiguée et observait l'entraînement en général. Après tout, elle avait été la première à nous inculquer quelques règles et à nous former, c'était tout à fait légitime qu'elle s'intéresse à l'évolution générale du groupe. Si je n'avais pas été en pleine session, j'aurais pourtant foncé pour aller échanger quelques mots avec elle. Elle me touchait plus que personne jusque-là. Elle était forte, beaucoup plus qu'elle ne semblait le laisser présager et quelque chose demandait à briller sous ses airs plus sombres. Il suffisait de gratter un peu la surface, j'en étais convaincue.

« Tu t'améliores. » Je m'étais approchée et lui offris un immense sourire quand elle me complimenta. « Merci, j'essaie de donner tout ce que j'ai pour me prouver que je peux me rapprocher progressivement d'un but, même s'il paraît infranchissable. » Je m'étais assise à ses côtés avant de me tourner complètement vers elle, un peu plus sérieuse et inquiète. Quelque chose clochait et ça me semblait encore plus problématique que la veille. Ce n'était qu'en faisant un peu plus attention que j'avais remarqué ces marques au niveau de son cou. « Je me mêle peut-être de choses qui ne me regardent pas mais ces marques ne sont pas arrivées par hasard. Tu veux en parler ? » Je n'aurais pu expliquer pourquoi mais je sentais que je m'emballais à l'intérieur. Oui, nous nous rapprochions depuis un moment mais j'avais peur de prendre trop de place, d'en faire trop et encore plus de la déranger à cause de ça.

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année 41 - saison intermédiaire (matin 83)

La sincérité du compliment fait son effet. En voyant son sourire, tu notes pour plus tard qu'il ne faudra pas que tu oublies de recommencer. Ce n'est pas quelque chose qui t'est venu naturellement mais les Vipères t'ont appris l'importance d'être positive vis à vis des efforts des autres. Le pouvoir des encouragements. La pensée reste aussi un peu égoïste. Tu veux à nouveau la voir sourire de la sorte. « Merci, j'essaie de donner tout ce que j'ai pour me prouver que je peux me rapprocher progressivement d'un but, même s'il paraît infranchissable. » « Une bonne motivation peut faire de grandes choses. » Cela ne fait pas tout naturellement. Malgré tous les efforts ou les envies, certains n'atteindraient jamais leur objectif. Mais il valait mieux ça que de ne pas en avoir. S'entraîner sans le moindre but avait ses limites. On en devenait amer pour moins que ça. Lorsqu'elle s'assied, impossible de ne pas constater le changement d'ambiance. Cela te pousse à bouger un peu. Tu lui fais face désormais, les jambes croisées en tailleur pour ne pas empiéter sur son espace. Peut-être que tu ne te faciliteras pas la tâche pour t'exprimer sur le sujet à venir que tu devines sans mal mais tu ne veux pas lui donner l'impression d'être fermée. « Je me mêle peut-être de choses qui ne me regardent pas mais ces marques ne sont pas arrivées par hasard. Tu veux en parler ? » C'est légitime. Elle a vu les marques que tu n'as pas franchement cherché à cacher. Elle semble aussi particulièrement sensible aux autres de façon naturelle. Le fait qu'elle ne dégage pas cette curiosité malsaine que tu trouves chez certaines, aide. Et puis tu ne peux cacher que tu as des facilités avec elle. Tu t'exprimes naturellement. A l'aise. Ce n'est pas que ça ne t'est jamais arrivé mais c'est venu si rapidement avec elle. Presque instantanément. « J'ai fait une mauvaise rencontre chez les Dragons. » Tu effleures machinalement les marques, tout sourire disparu. « Mon frère. Les retrouvailles n'étaient pas très chaleureuses. Comme je m'y attendais. La seule chose qui m'étonne c'est d'être en vie. » C'est peut-être un peu cru à dire. D'autant plus à une fille qui semble porter ses frères en haute estime et qui a eu avec eux une relation privilégiée. Tout le contraire de celle que tu partages avec Silas.

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année 41, saison intermédiaire, matinée 83

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« Une bonne motivation peut faire de grandes choses. » Plus je lui parlais, plus j'avais le sentiment qu'elle était incapable de me descendre. Au contraire, elle me soutenait et m'encourageait à chaque occasion, ce qui me touchait naturellement. C'était un plus non-négligeable, un élément supplémentaire qui me poussait à en faire toujours plus lors des entraînements. J'avais envie que ses encouragements ne soient pas vains et c'était la première fois que je ressentais quelque chose comme ça si on omettait ma famille. Moi qui appréhendais l'arrivée chez les Vipères, la peur d'en faire trop, comme lorsque Théa m'avait convoquée pour me marquer, je me retrouvais à vouloir prouver à une Vipère que je pouvais réellement progresser. Sans que je ne m'en rende vraiment compte, elle avait pris beaucoup d'importance et plus encore que de frapper dans l’œil de leurs Seconde et Chef, je désirais que ce soit elle qui me remarque. Qu'elle me fasse face ne me laissait pas indifférente non plus. Elle était magnifique et cette petite impression de sensibilité la rendait encore plus craquante.

« J'ai fait une mauvaise rencontre chez les Dragons. » Les Dragons ne cessaient de baisser dans mon estime. Que l'attaque m'ait touchée personnellement était normal mais étrangement, je prenais à cœur tout ce qu'elle m'avait raconté à leur sujet. Je n'aurais certainement pas dû me mêler à ce point de tout ça mais je ne comprenais pas qu'on ait pu lui faire tant de mal, parce qu'elle était quelqu'un de bien mais aussi parce qu'elle était des leurs avant qu'elle ne choisisse de rejoindre les Vipères. Ce choix, elle l'avait fait à cause d'eux justement mais ils ne semblaient pas le comprendre. Je ne souriais plus. Je soupirai et mon regard se fit plus sombre. « Mon frère. Les retrouvailles n'étaient pas très chaleureuses. Comme je m'y attendais. La seule chose qui m'étonne c'est d'être en vie. » Un nouveau choc. Sa famille était détestable. Imaginer qu'un frère puisse faire subir de telles atrocités à sa soeur était inimaginable pour moi. Je me rendais d'autant plus compte que j'avais eu énormément de chance d'être entourée par des frères si attentifs. Je comprenais d'autant mieux nos premiers échanges. Sans trop comprendre ce qui m'y poussa, je l'enlaçai, n'ayant pas peur qu'on puisse nous observer. Après quelques instants, je m'étais reculée pour la regarder. « Il ne te mérite pas. Je ne comprends pas qu'il puisse te traiter de cette façon. Tu vaux tellement plus que ça. » La seconde d'après, je me rendis compte que j'en faisais peut-être un peu trop. « Je suis désolée de parler comme ça de ta famille mais t'es une fille sensible et humaine et même sans ça, on ne devrait pas lever la main sur sa propre famille. » Même si j'étais un peu embêtée de m'être emportée, je ne lâchais pas son regard.

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année 41 - saison intermédiaire (matin 83)

Même si tu avais ressenti le besoin de parler lorsqu'elle t'y avait incitée, tu attends une réaction avec un peu d'appréhension. Tu as cette petite pointe de fierté qui songe que tu ne dois vraiment pas donner une belle image de toi-même. Malmenée aussi aisément par un Dragon. Bien sûr c'est plus compliqué que ça. C'était ton frère après tout et tu t'étais fait coincer en territoire ennemi. Des Messagers avaient déjà disparus chez les Dragons ça n'aurait pas été une première. Et puis Silas était loin d'être faible. Mais elle te surprends en t'enlaçant et tu n'as même pas la présence d'esprit de réagir. Tu restes statique. Perturbée par le contact soudain. Et étrangement touchée qu'elle ait ressenti le besoin de faire ça. C'est réconfortant. Chaleureux et doux. Et ça se termine beaucoup trop vite. Tu clignes brièvement des yeux pour te remettre les idées en place. « Il ne te mérite pas. Je ne comprends pas qu'il puisse te traiter de cette façon. Tu vaux tellement plus que ça. » Le pire c'est que tu as l'impression qu'elle le pense vraiment. C'est sans doute le cas. Elle dégage cette franche honnêteté. Tu te dis en tout cas que tu peux y croire. Tu te permet de te dire qu'elle a peut-être raison tout court. Mais est-ce qu'elle le penserait toujours si elle savait ce que tu as fait ? « Je suis désolée de parler comme ça de ta famille mais t'es une fille sensible et humaine et même sans ça, on ne devrait pas lever la main sur sa propre famille. » Sensible et humaine. Des qualificatifs qui ne font clairement pas très Dragon. Peut-être même pas très Vipère. Mais tu sens bien qu'elle ne pense pas que ce soit un défaut d'être sensible. Tu n'as pas non plus fait beaucoup d'efforts pour lui montrer autre chose. « Je sais comment ils sont. » Tu hausses juste les épaules. Même de Silas tu n'avais pas attendu mieux. Il n'était qu'un pantin et tu l'avais poussé trop loin. Cela n'excuse pas son geste mais tu le comprends. Tu n'as pas d'espoir à leur sujet de toute façon. « Je crois que le fait que tu sois si directe est ce que j'aime le plus chez toi. Cette façon d'assumer si férocement ce que tu ressens. » Tu ne peux pas t'empêcher de sourire. « Tu m'as donné quelque chose dont je ne savais même pas que j'avais besoin après tout ça. »

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année 41, saison intermédiaire, matinée 83

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Elle aurait eu tous les droits de se retirer avant que je le fasse ou de me reprocher mon geste, je ne la connaissais pas assez bien pour savoir si ce genre de gestes la dérangeaient ou pas. Tout le monde n'était pas fan du contact. Certains ne supportaient pas qu'on puisse entrer dans leur espace vital. A la voir, elle n'avait pas l'air traumatisée ou dégoûtée, j'étais drôlement soulagée. Cette spontanéité ne pouvait pas plaire à tout le monde mais je m'en rappelais souvent quand il était trop tard.

« Je sais comment ils sont. » Je l'entendais bien mais ça ne me satisfaisait pas. Malgré tout, j'étais consciente de mes limites, je ne pouvais pas la forcer à mener une bataille si elle n'en voulait pas. Ça ne m'empêcherait pas de penser que j'aimerais leur dire le fond de ma pensée. Au-delà de questions d'honneur, c'était avant tout une question de respect et d'humanité. Elle faisait partie de leur famille, ce qui ne semblait pas avoir beaucoup d'importance à leurs yeux. C'était du gâchis. Ils ne valaient pas beaucoup mieux que certains Aigles archaïques.

« Je crois que le fait que tu sois si directe est ce que j'aime le plus chez toi. Cette façon d'assumer si férocement ce que tu ressens. » J'avais senti mes joues chauffer d'un coup et j'avais posé instinctivement mes mains sur celles-ci pour les refroidir. Je n'avais pas exactement honte mais c'était spécial, comme si c'était la première fois que j'entendais ces mots, alors que ce n'était pas le cas. Même chez les Aigles, on pouvait me reconnaître ça. Ce n'était pas nouveau et pourtant, je me sentais bizarre. Je souriais, bêtement heureuse pour un compliment qu'elle aurait pu faire à n'importe qui dans mon genre, j'en étais consciente.

« Tu m'as donné quelque chose dont je ne savais même pas que j'avais besoin après tout ça. » J'en avais des frissons. Ça, par contre, c'était nouveau. Des amis, j'en avais, même chez les Aigles, on pouvait m'apprécier alors que je n'étais pas le modèle classique de la femme Aigle qu'on imaginait même au sein du territoire. J'en avais mais personne ne m'avait dit quelque chose d'aussi fort. Je n'aurais jamais pensé avoir un tel impact sur quelqu'un, surtout après si peu de temps. J'avais presque l'impression qu'elle se trompait de personne. Je ne doutais pas de ma capacité à partager mon optimisme et ma joie de vivre mais à ce point, c'était inimaginable, même pour moi. Mes joues s'étaient à nouveau empourprées.

Il m'avait fallu du temps pour retomber sur mes pattes et ne plus avoir l'air trop ridicule. Si c'était seulement possible. « Je n'ai pas fait grand-chose, tu sais. Mais ça me fait plaisir d'avoir pu t'aider un petit peu au moins. J'suis sûre que tu n'te rends pas ou plus compte de ta valeur. » J'avais ce sentiment, en effet. J'espérais au fond de moi que ce ne soit que passager. Je ne connaissais pas la version d'elle avant tous ces événements. Je ne savais pas ce qu'elle avait pu travers d'autre avant que je n'arrive là.

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» première sortie... compliquée (Koira)

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