in all this chaos, I only see you ft. Koira

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Koira

année 41, saison intermédiaire, matin 79

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Initialement, je bossais au niveau d'une maison qui avait rencontré des soucis, une bagarre qui avait mal tourné. Je travaillais sérieusement, papotant de temps à autre avec Viktor avec qui je bossais très souvent. Il était patient, parfois un peu maladroit, un peu trop direct, mais vraiment très agréable. Nous n'avions pas une journée chargée et nous aurions sûrement dû en profiter largement sauf que nous n'avions pas vu venir la tempête. Dehors, ce fut facile de sentir les premiers signes, sans parler de l'agitation des sentinelles qui furent, elles aussi, aux premières loges. Mon partenaire m'avait conseillé de me réfugier rapidement, le Labo était l'endroit le plus proche mais l'inconscience me poussa à la chercher, un réflexe qui aurait pu me coûter cher. Plus le temps passait, plus il était difficile d'y voir clairement parce que tout le monde s'affolait. La tempête nous avait eu par surprise et était plus violente qu'elle ne l'avait jamais été, même à cette saison.

C'était à ce moment qu'une sentinelle m'avait attrapée par le bras, me sermonnant, trouvant ma raison insuffisante pour traîner dehors par un temps pareil. C'était bien la première fois que je m'entêtais de la sorte, cette fois-là et quand mes frères m'avaient forcée à les laisser derrière. Je m'en étais rendu compte quand je m'étais retrouvée bêtement dans le Labo. Nous étions nombreux, certainement ceux qui étaient coincés dans les environs directs de l'endroit névralgique du territoire. Pour une fois, depuis l'attaque, les mêmes questions m'assaillirent. Est-ce qu'elle allait bien ? Est-ce qu'elle était protégée ? C'était évident que je l'appréciais mais ce battement raté quand je l'avais fugacement croisée, c'était nouveau. Cet empressement de la rejoindre aussi. Mes mains étaient moites, ça pulsait dans mes oreilles et je perdais le fil de mes idées. « Comment tu te sens ? » De mon côté, je n'avais pas grand-chose, des contusions en me cognant çà et là et quelques égratignures dans l'agitation. « Je. Je t'ai cherchée. C'est grave ? » C'était la première fois que j'avais l'air agitée, les yeux cherchant le moindre signe. Sa veste avait l'air en piteux état mais il y avait trop de monde pour que je puisse distinguer quoi que ce soit mais elle n'était pas dans son assiette. Il y avait quelque chose, c'était sûr.

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année 41 - saison intermédiaire (jour 85)

Idiote. Idiote. Idiote. Ce n'est sans doute pas le moment pour ça mais ton éducation ne t'a pas appris à lutter sainement contre la douleur. Même si tu as presque passé autant de temps au Nord qu'à l'Ouest il y a des réflexes qui restent et râler contre toi-même dans le cas d'une blessure que tu aurais pu éviter en fait partie. Rien n'est certain non plus. Tu vois l'accident comme idiot, ta faute franchement, mais dans le chaos rien n'était vraiment pareil. Une action facile en temps normal devenait un obstacle à passer au milieu de la tempête. Mais tu ne peux pas t'en empêcher. Tu t'en veux de ne pas avoir été plus rapide. La vitesse. Un truc que tu maîtrises normalement. Pas aujourd'hui de toute évidence. C'est tout du moins comme ça que tu visualises la situation. Tu rentres tout juste avant que les portes du Labo ne soient barricadées, la démarche un peu incertaine dans toute cette foule. Bouger sans te faire heurter est mission impossible. La douleur n'est que plus vive dans ton dos, les mouvements de tes vêtements frottant déjà inconfortablement. Si tu avais des doutes, ce sont maintenant des certitudes. Ton pull colle contre ta peau et il y a cette humidité un peu chaude qui gorge le tissu. Tu n'en mourras sans doute pas mais les débris ne t'ont pas loupés. Tu tâches de rejoindre les escaliers en espérant que les étages supérieurs seront plus calmes lorsque tes yeux s'accrochent à un visage connu. Moira. Le plan de bouger fut aussitôt abandonné. A la place tu te frayes un passage pour la rejoindre à mi-chemin. « Comment tu te sens ? » Rien d'étonnant à ce qu'elle soit la première à parler. Tu es aussi peu surprise qu'elle soit la première à s'inquiéter. Il te faut un instant pour réellement intégrer la question, tes yeux fouillant à la recherche d'une blessure grave. Ce n'est pas la Moira de tous les jours mais dans l'ensemble ça semble aller. « Je. Je t'ai cherchée. C'est grave ? » Dans un réflexe tu hausses les épaules. Mauvaise idée. Tu en grimaces aussitôt, un semblant de sourire suivant et ta main cherchant son bras en espérant que cela suffirait à la rassurer. Les lieux ne semblent vraiment pas adaptés pour une conversation. Il y a aussi sûrement des choses que tu te devrais faire. Aider les Membres à gérer cette soudaine affluence, proposer ton aide au moins. Voire rejoindre les gradées pour prendre les ordres et leur assurer au passage que le périmètre où tu t'étais rendue avait été sécurisé. Mais dehors la tempête rugit et tes émotions s'agitent. Tu as besoin de t'écarter. Pas d'elle. Avec elle. L'inquiétude t'est tombée dessus d'un coup et maintenant que tu la vois, qu'importe qu'il soit évident qu'elle ne soit pas en danger de mort, tu as ce besoin au fond du ventre de la garder près de toi. « Viens. » Tu t'es penchée légèrement pour lui parler avant de te saisir de sa main pour l'entraîner vers les escaliers. Il faut quelques volées de marches pour que la foule devienne plus diffuse, avec les étages venant les zones sécurisées. Par ici il n'y a plus que des Membres plus ou moins occupées. De toute évidence la marche à suivre n'est pas encore très claire. Vous vous trouvez un bout de couloir désert et dans un réflexe tu te rapproches. Les doigts glissants doucement sur sa joue, ta paume cueillant sa mâchoire pour que tu puisses la regarder dans les yeux. « Je suis soulagée que tu ais pu te réfugier ici à temps. » Tu as toujours sa main dans la tienne, incapable de la lâcher pour le moment.

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Je la sentais agitée, difficile de nier qu'elle n'était pas à son aise. En plus, elle avait eu un geste maladroit qui l'avait fait grimacer, donc je devinais que ça n'allait vraiment pas, ce qui expliquait que tout s'affole dans ma tête et dans ma poitrine. J'espérais que le cercle vicieux s'arrête là mais c'était mal parti. « Viens. » J'avais à peine entendu ce qu'elle venait de me dire quand elle m'avait attrapé la main. Elle ne voulait pas traîner mais je ne m'attendais pas à ce qu'elle me prenne à part. Je ne savais pas exactement ce qu'elle voulait mais je la suivais sans discuter. Il ne servirait à rien de lutter parce que je n'en avais pas envie et parce que ça lui ferait mal. Je mourais d'envie de lui dire d'y aller plus doucement et de faire moins d'effort par égard pour sa santé mais elle y allait si franchement que je n'avais pas le temps de l'arrêter. A nouveau, ce serait prendre le risque de lui faire mal et ce serait encore pire. Je supposais, en arrivant dans une zone plus calme du Labo, qu'elle cherchait un endroit plus intime. L'effet groupe ne nous aiderait pas à communiquer sereinement ou tout simplement à s'entendre. Ça devait être ça. Je n'allais pas cracher dessus, la seule qui m'occupait la tête en ce moment, c'était elle et je m'inquiéterais pour les autres après. Par exemple, Nova.

Un frisson m'avait traversée alors qu'elle m'effleurait la joue. « Je suis soulagée que tu ais pu te réfugier ici à temps. » Ce qui devait signifier que les portes s'étaient fermé ou le seraient tôt ou tard. Je lui souris, un peu intimidée par la situation, peu habituée à tout ça et surtout peu habituée à me prendre la tête, à me poser cinquante mille questions et à être bousculée par tout ce chaos dans ma tête et dans mon cœur, trop d'émotions. « Moi aussi mais tu ne devrais pas rester pas avec moi, enfin, pas là. Il faudrait trouver quelqu'un qui peut m'indiquer comme m'occuper de toi ou le faire à ma place. » Je ne pouvais pas accepter qu'elle perde du temps pour moi. « Tu le vois, je n'ai rien. Je vais bien. Concentre-toi sur toi, s'il te plaît. »

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Tu brûles sans doute les étapes. Tu ne peux même pas te réfugier derrière l'excuse de la peur provoquée par la situation. Le rythme n'a jamais eu beaucoup de sens avec Moira. Ce besoin de proximité n'était pas non plus nouveau. Tu t'étais déjà laissée tenter par l'idée pour la refuser presque aussitôt. Être tactile n'était pas bien toléré dans ton milieu lorsque tu étais enfant. Tu avais découvert ce principe et les relations humaines saines plus tard parmi les Vipères. Ça n'avait pas fait de toi non plus la fille la plus aisée à approcher mais il y avait eu des gens. Même pas des exceptions. Moira avait été une exception de part la rapidité avec laquelle elle avait planté ces sentiments en toi. « Moi aussi mais tu ne devrais pas rester pas avec moi, enfin, pas là. Il faudrait trouver quelqu'un qui peut m'indiquer comme m'occuper de toi ou le faire à ma place. » L'envie de te rebiffer est présente. Une vieille habitude. Mais elle ne te laisse pas le temps de placer les mots qui veulent déborder. Tu as vu pire et elle est plus importante. « Tu le vois, je n'ai rien. Je vais bien. Concentre-toi sur toi, s'il te plaît. » « C'est pas- » Tu es sur le point de lui dire que ce n'est pas grave. Tu n'en sais rien au fond mais la douleur ne te semble pas assez impressionnante pour que tu sois en train de te vider de ton sang. L'adrénaline fait de toi une mauvaise juge, tu le sais pourtant. Mais ce n'est pas ça qui t'arrête. Tu n'en dis pas plus parce que tu comprends. Tu comprends qu'elle s'inquiète pour toi comme tu t'es inquiétée pour elle. C'est légitime. De la compréhension vient une réponse plus mesurée. La solution est facile si tu ne souhaites pas qu'elle ne se fasse pas plus de mouron pour toi. « Ok. » Tu as un léger hochement de tête alors que tu l'observes encore un un moment. Avant de te détacher d'elle. « Inutile de déranger les sous-infirmières elles ont plus urgent à faire. Il va falloir de l'alcool pour désinfecter. Des bandages. » Tu réfléchis tout haut. Tu ne cherches pas particulièrement à diminuer ton importance il te semble simplement évident que tu dois faire partie des blessés les moins graves. Tu ne serais qu'une gêne encombrant l'Infirmerie. Mais rien ne t'empêche d'y faire un rapide passage. « On peut aller emprunter ce qu'il nous faut. Si tu veux bien m'aider. » C'est ridicule. C'est elle qui en a parlé en première mais tu te sens un peu timide soudainement de lui imposer ça.

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J'aurais dû être complètement aveugle ou insensible pour ne pas remarquer la tension qui émanait de Korra. Je ne lui avais pas laissé beaucoup d'occasions d'en placer une parce que j'étais bouffée par l'inquiétude et je reconnaissais que j'insistais beaucoup, peut-être trop à son goût, mais personne ne pourrait m'empêcher de me concentrer sur elle. Je n'avais pas réellement mal, ces hématomes étaient presque insignifiants, ce qui me permettait de faire attention à elle et à son état plus grave. « C'est pas- » J'étais presque soulagée qu'elle se soit limitée à ça et qu'elle n'en ait pas dit plus, parce que je devinais sans difficulté ce qu'elle voulait me donner comme réponse. Elle n'avait peut-être pas mal, ça ne voulait rien dire. On n'avait pas directement mal et certains étaient moins sensibles à la douleur. Les faits, c'était qu'elle avait quelque chose dans le dos.

« Ok. » Elle m'avait presque prise au dépourvu mais j'étais soulagée de la savoir moins réticente dans cette affaire. Ça n'avait rien avoir avec une fierté mal placée, j'étais rassurée, rien de plus. « Inutile de déranger les sous-infirmières elles ont plus urgent à faire. Il va falloir de l'alcool pour désinfecter. Des bandages. » Je l'écoutais attentivement lister les éléments dont nous allions avoir besoin pour s'occuper de sa blessure. La déranger ne servirait à rien, à part la perdre dans sa lancée. « On peut aller emprunter ce qu'il nous faut. Si tu veux bien m'aider. » Je ne m'étais pas crispée quand elle m'avait demandé si je voulais l'aider, même si j'avais été la première à le mettre sur la table. Au contraire, j'avais plutôt hoché de la tête deux ou trois fois avec beaucoup d'insistance. « Oui, oui. Suis-moi. » J'avais pris spontanément sa main gauche de ma main droite, y allant mollo pour ne pas que sa blessure tire davantage. L'idée était d'y aller doucement mais sûrement pour ne rien aggraver. Elle n'allait pas mourir, d'autant plus qu'elle avait accepté de coopérer.

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« Oui, oui. Suis-moi. » Au moins elle semble sûre d'elle. Tu peux difficilement aller contre ça. Tu as toujours l'impression que c'est trop que de la mêler à tes galères mais tu ne diras plus rien à ce sujet. Tu as même un léger sourire lorsqu'elle s'empare de ta main pour t'entraîner à sa suite. Doucement. Parce que tu n'es pas prête de te briser et qu'elle ne sait sans doute pas où elle se rend, tu prends les devants. Tu accélères le pas pour vous diriger dans un couloir avant d'emprunter un escalier pour l'étage supérieur. L'animation est plus importante ici. Les sous-infirmières sont effectivement sur le pied de guerre. Suffisamment pour qu'on ne vous accorde pas réellement d'intérêt. Juste quelques coups d'oeil au départ pour s'assurer qu'aucune de vous deux n'est en train de se vider de son sang. Tu progresses naturellement jusqu'aux étagères où le matériel est stocké, saisissant d'une main les bandages avant de les tendre à Moira. La vérité est que tu n'as pas envie de la lâcher. Tu t'empares ensuite d'un flacon contenant sûrement l'alcool recherché. Tu vois mal ce que ça pourrait être d'autre vu l'absence d'indication. Tu penses même à glisser un linge dans la poche de ta veste en passant. Votre petite cargaison récupéré il est temps de faire demi-tour. Presque ni vu, ni connu. Deux volées d'escaliers et un peu de fouille plus tard, vous trouvez un recoin inutilisé et plus ou moins discret. Tu n'es pas certaine d'où te vient soudain ce besoin d'intimité. Mais tu ne vas pas contre. Tu lâches simplement sa main et tu déposes ton barda au sol avant de t'asseoir à côté. Maintenant venait le moins drôle. Tu grimaces légèrement en retirant ta veste qui tombe lourdement au sol. Pour le moment tu préfères ne pas trop t'intéresser aux dégâts. Tu es à deux doigts d'enlever le reste mais tes mains hésitent au bord du tissu. Tu te sens curieusement gênée. Cela n'a pas sa place dans cette situation mais le sentiment est là. Il te faut quelques secondes pour le faire. Aller au bout du mouvement. Tu bloques ta respiration pendant que tu ôtes les différentes couches, luttant contre le gémissement de douleur qui tente de s'échapper lorsque les fibres quittent les plaies. A la place tes dents emprisonnent fermement ta lèvre inférieure, le familier goût du fer glissant sur ta langue. Tu ne peux plus ignorer les blessures. Comme trois crevasses brûlantes qui s'étendent dans ton dos. Longues et vibrantes de douleur. Tu essayes de te dire que tu as vu pire mais ce n'est pas tout à fait pareil. Les cicatrices qui parsèment ton corps n'ont pas été si dérangeantes à l'exception peut-être de celle qui longe ton biceps même si c'est plutôt psychologique. C'est la plus récente car elle te vient de la nuit de l'attaque. De ton mieux tu ignores sa présence. Tu trembles sous le froid nouveau sur ta peau, les bras t'entourant naturellement. « Je suppose que c'est moche ? En tout cas c'est comme ça que je le ressens. » Tu serais incapable de la regarder pour le moment. Tu préfères laisser le regard posé au sol. Gênée pour des raisons qui semble bien idiotes pour le coup.

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Elle m'avait guidée quelques secondes après que je me sois rendu compte que je ne connaissais pas le chemin en question, pas assez bien. Je n'avais pas eu l'occasion d'aller souvent jusqu'à l'infirmerie depuis que j'étais arrivée sur le territoire ouest. Je me sentais un peu idiote, après avoir été poussée par un besoin trop grand et soudain de remuer terre et ciel pour elle. Je la suivis sans broncher, nos mains l'une dans l'autre tout du long, découvrant les sous-infirmières qui s'agitaient et nous regardaient, comme pour nous sonder, avant de laisser Korra s'affairer dans la pièce. Je ne savais pas si elles la laissaient faire à cause de la situation ou parce qu'elle était une gradée. En soi, ça ne changeait pas grand-chose à la donne. Le plus important était que nous avions cette liberté d'actions et ça nous faisait gagner un temps précieux. Je ne voulais pas qu'on tarde, elle avait l'air sévèrement blessée.

Après cette petite escapade, Korra nous avait déniché un coin tranquille, à l'abri. Nous étions seules. Elle se déshabillait avec difficulté et je serrais le poing, partageant malgré moi la douleur. J'aurais voulu l'aider mais elle ne m'en laissa pas l'occasion et, en y repensant, je ne voyais pas comment j'aurais pu l'aider sans lui faire d'autant plus mal. Je découvris trois crevasses très moches et je comprenais que je ne m'étais pas trompée. Elle n'avait pas été gâtée. La tension montait en moi. J'en oubliais presque qu'elle s'était déshabillée parce que j'étais obnubilée par l'ampleur des dégâts et que j'imaginais vaguement à quel point ça devait faire mal. « Je suppose que c'est moche ? En tout cas c'est comme ça que je le ressens. » J'aurais pu décider de lui mentir mais ça ne l'aiderait pas. Je ne voyais pas trop en quoi mentir était utile ou même intéressant. Lui mentir était encore plus impensable. « C'est pas joli à voir. » La seconde d'après, je prenais le flacon et le tissu. « Je vais appliquer l'alcool. Si ça t'fait mal, tu m'le dis, hein ? » Je ne voulais pas attendre bêtement, j'avais besoin d'être utile. J'appliquai le liquide sur le tissu avant de le passer sur les lacérations et je me mordis la lèvre, comme si je m'appliquais ledit liquide. C'était plus fort que moi. « Si ça peut t'aider, serre ma main. » C'était stupide mais c'était la première idée qui m'avait traversé l'esprit. Je lui tendais la main sur son côté.

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« C'est pas joli à voir. » Les blessures l'étaient rarement. Certains leur trouvaient des aspects poétiques mais tu ne fais pas preuve de cette imagination. « Je vais appliquer l'alcool. Si ça t'fait mal, tu m'le dis, hein ? » Tu hoches la tête mais ce n'est que par principe. Cette étape est nécessaire. Qu'importe la douleur. Il est impossible que tu ne souffres pas plus dans la manœuvre. Le mal est aussi nécessaire que ridicule. Un peu d'alcool ne devrait être rien en comparaison de l'accident en lui-même. Mais c'est souvent un moment particulièrement difficile. La brûlure est soudaine et te pousse à te crisper, tes poings se serrant sur tes cuisses. Tes yeux picotent d'une façon inconfortable pour un fond de fierté dragonne que tu ne parviens pas à tuer. Une réaction que tu détestes mais que tu as appris à accepter pour ce qu'elle est. Tu fermes aussitôt les paupières, cherchant en toi un semblant de calme pour détendre tes muscles. Tu te rendrais un service en y parvenant. « Si ça peut t'aider, serre ma main. » Tu sens le mouvement plutôt que de le voir. Sa chaleur est toute proche. Tu y succombes sans réfléchir, les yeux claquant ouverts et la main cherchant la sienne. Mais tes doigts serrent à peine sa paume. Tu ne veux pas lui transférer ta douleur alors qu'elle fait déjà tant pour toi. Tu ne refuseras par contre pas ton contact. « T'inquiète pas pour moi. J'en ai vu d'autres. Je sais que c'est qu'un mauvais moment à passer. » Tu parviens à esquisser l'ébauche d'un sourire en tournant la tête vers elle mais une grimace l'engloutit vite. Tu ne pourras jamais contrôler ce genre de réaction qu'importe que tu ais appris à philosopher avec la douleur. Plus que jamais la saison précédente t'avait appris que souffrir n'était qu'un maigre tribut. Un signe que tu étais vivante contrairement aux autres.

Dernière édition par Korra le Mar 14 Avr - 0:03, édité 1 fois

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J'avais dû répéter l'application de l'alcool à plusieurs reprises pour être certaine de lui éviter l'infection parce que sur une telle surface, ça lui causerait de beaux dégâts, raison pour laquelle j'aurais préféré que ce soit Rory qui s'en charge si on m'avait demandé mon avis. Je me sentais maladroite à chaque geste que je faisais mais je n'avais pas d'autre choix et je n'étais certainement pas la seule infirmière improvisée, vu l'apocalypse qui régnait sur l'ensemble de Paris. S'il fallait une preuve supplémentaire, ça démontrait bien que je n'étais pas née pour être une sous-infirmière, encore moins une infirmière. Je ne gérais pas ce stress, peut-être encore moins parce que c'était Korra.

« T'inquiète pas pour moi. J'en ai vu d'autres. Je sais que c'est qu'un mauvais moment à passer. » J'avais failli déraper en sentant sa main dans la mienne, sans parler de cette maturité. A ce moment, je m'étais fait la réflexion que je ne pourrai certainement jamais devenir aussi forte et courageuse qu'elle. Ça ne m'empêcherait pas de vouloir tout donner mais je réalisais le fossé entre une Soumise Aigle et une Membre Vipère. Heureusement, les priorités étaient ailleurs et me feraient rapidement oublier tout ça. J'avais pris le premier bandage en main et me redressai suffisamment pour pouvoir enrouler correctement le bandage autour de son abdomen, le tout en essayant de ne faire bouger qu'un minimum ses bras pour ne pas raviver la douleur. J'avais dû lâcher sa main et instinctivement, ma main recherche la sienne, pendant que ma tête me rappelait qu'il fallait avant tout penser à en finir avec cette plaie. Je repris de même avec le deuxième bandage.

« Je-. J'ai essayé de faire au mieux. Ça vaut pas le boulot d'une sous-infirmière, désolée. » Je lui faisais à nouveau face, un peu perdue dans cette ambiance particulièrement déroutante. Etait-ce le sentiment de maladresse qui me poussait à regarder ses plaies plus que sa tête ou ce que je percevais entre nous ? Je préférais éluder la question parce que je n'étais certaine de rien et parce qu'elle me rendait toute chose.

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Tu as pensé à de nombreuses choses mais la proximité vient quand même te prendre en traître. Pour être bandées correctement, les blessures demandaient qu'elle se rapproche, qu'elle se penche dans ton espace. Tu n'avais pas manqué de le constater, ton souffle se coupant un instant. Clairement pas insensible malgré la situation. Ce n'est pas la première fois mais c'est une confirmation de plus. Tu es attirée par elle. C'est indéniable désormais. Et ce n'est pas qu'une histoire physique. C'est tellement plus que ça. Mais tu ne parviens pas à t'en inquiéter. Pas pour le moment. « Je-. J'ai essayé de faire au mieux. Ça vaut pas le boulot d'une sous-infirmière, désolée. » Tu restes soulagée que cela soit fini. La douleur est toujours là mais ça ne sera pas nécessaire de venir toucher aux blessures pour un moment. « Tu as géré. » Tu fais un dernier effort pour placer ta veste sur tes épaules, cherchant à casser le froid qui circule dans le bâtiment. Il faudra que tu te rhabilles plus tard mais cette énergie te manque pour l'instant. Tu as sa main dans la tienne et tu ne peux pas t'empêcher de te pencher un peu, posant légèrement les lèvres sur ses phalanges. « Merci. Je me doute que ça n'a pas dû être facile pour toi. » Tu as prévu de t'arrêter là. Juste un geste qui te vient tu ne sais d'où. Mais tu as l'impression qu'une limite invisible vient d'être passée. Tu es à ton tour trop proche d'elle. Et lorsque tu te redresses tu croises son regard qui t'aimante aussitôt. Voilà que ton cœur bat un peu plus fort. Même ton souffle commence à s'accélérer alors que l'idée se forme. Il y a autre chose que tu veux embrasser. Et rien ne semble hors de portée à cet instant. Tu n'es pas la seule à la ressentir n'est-ce pas ? Cette énergie qui court entre vous et qui n'a rien de nouveau. C'est complètement fou car vous ne vous connaissez pas depuis bien longtemps. Mais dans ce monde il vaut mieux ne pas traîner. Ne pas avoir de regret. Tu grignotes cette distance qui vous sépare encore, ta main libre glissant contre sa joue. Tout à l'heure tu en avais déjà eu envie. Mais rien ne t'arrête cette fois. Tu l'embrasses et tu as l'impression que c'est la meilleure décision que tu as pris cette saison.

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« Tu as géré. » Je me fis la réflexion que je ne l'imaginais pas me dire que je m'étais plantée ou que je lui avais fait mal même si ç'avait été le cas parce qu'elle était drôlement gentille et peut-être trop patiente avec moi et ça n'avait rien avoir avec de la pitié. Malgré tout ça, je prenais ce qui venait sans broncher, sans m'en rendre complètement compte, parasitée par tout ce que je ressentais et tout ce que je commença à comprendre, des choses qui n'étaient pas exactement nouvelles ou pas totalement, du moins. Des relations, j'en avais eu et la plus récente avait duré un peu plus de deux saisons. La nuance était que je n'avais jamais pensé une seule seconde à une fille, l'éducation malheureuse des Aigles m'avait façonnée bien malgré moi et malgré les tentatives de mes frères, à croire que c'était plus fort que tout, même pour une personne aussi peu touchée par les impressions des autres. Ce n'était pas tant que je m'en moquais mais que je mettais des limites pour ne pas me briser à la moindre remarque trop personnelle.

« Merci. Je me doute que ça n'a pas dû être facile pour toi. » Je me sentis frissonner quand elle m'embrassa les phalanges, certainement rouge, mes joues chauffaient et c'était trop soudain pour être lié à autre chose que ce contact que je n'avais pas vu venir. C'aurait pu s'arrêter là et ç'aurait suffi à me rendre toute chose pour le restant de la journée mais non. Mon cœur s'affolait et je perdais pieds avant même qu'elle ne m'embrasse et là, ce fut le choc interne. J'étais heureuse, surprise, un peu gênée aussi mais j'étais surtout tellement soulagée qu'elle ait fait le premier pas et qu'elle ait pris le courage pour nous deux. Je glissai ma main libre sur sa joue et puis dans sa nuque pour profiter encore quelques secondes de cet instant plein d'émotions. A cet instant, plus rien ne comptait, il n'y avait qu'elle, que nous. J'en oubliais même que je risquais de lui faire mal. J'étais trop bien, là, avec elle. J'en étais certaine, j'avais craqué pour elle et pour tout ce qu'elle dégageait, une douceur et une générosité incroyables, une fille tout ce qu'il y avait de plus humaine.

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Tu prends un risque ici. C'est comme ce jeu stupide pratiqué par certains Dragons. Ils lançaient leur couteau très haut dans les airs en espérant le rattraper par le manche et non en prenant la lame à pleine main. Tu t'imagines peut-être des trucs. Tout le monde était susceptible de voir ce qu'il désirait sans que ce soit la réalité. Il y a tellement de raisons pour lesquelles ça pourrait mal tourner. Vous ne vous connaissez pas assez. Tu ne sais même pas si elle est attirée par les filles. Elle s'était toujours montré amicale. Rien de plus. Heureusement elle a vite fait de faire taire tes pensées affolées. Tu la sens plus proche, sa main contre ta peau, ce baiser qu'elle te rend. Trop vite ton sourire vient s'en mêler, trop grand, trop gênant. Tu quittes ses lèvres dans un rire, le front posé contre le sien pour ne pas briser le contact. « Je suis contente que tu ne m'ais pas giflé. La suite aurait été gênante. » Tu aurais regretté si fort de la perdre avant même d'avoir eu l'occasion de la connaitre vraiment. Gentille comme elle était tu ne doutes pas qu'elle ne t'en aurait pas tenu rigueur éternellement mais te débarrasser de ce crush naissant en toi n'aurait pas été si aisé. Tu baisses les yeux un instant. Cherchant tes mots. « Je sais que c'est rapide. Je suis plus patiente d'habitude. C'est l'adrénaline je crois. Juste le baiser. Je suis attirée par toi et ça c'est pas nouveau. Si je puis dire. »

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« Je suis contente que tu ne m'ais pas giflé. La suite aurait été gênante. » L'idée était déroutante parce que même si je n'avais pas senti quelque chose pour elle, la gifle était radicale mais ça devait être une blague que je ne saisissais pas complètement, un peu perdue dans ce bordel émotionnel. Ça ne m'avait pas empêché de rigoler un peu. Le contact calmait un peu mon cœur qui s'était affolé et j'en oubliais tout le reste. La tempête n'existait pas pour un instant. « Je sais que c'est rapide. Je suis plus patiente d'habitude. C'est l'adrénaline je crois. Juste le baiser. Je suis attirée par toi et ça c'est pas nouveau. Si je puis dire. » Je souris, touchée par ce qui ressemblait beaucoup à de la maladresse. Elle essayait vainement de s'exprimer mais la voir cafouiller me rassurait, je n'étais pas la seule affolée à ce moment. « C'est nouveau pour moi aussi mais pas uniquement pour ça. J'suppose que la vie chez les Aigles y est pour quelque chose, au moins en partie, mais je n'avais jamais été attirée par une fille. » J'avais presque l'impression d'insulter ma famille en disant ça. « Enfin, les Aigles en général, pas ma famille. » Rien ne m'obligeait à les défendre mais c'était quelque chose de trop spontané.

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