brotherhood
année 41 - saison intermédiaire (journée 82)

Tu as tiré un trait sur l'idée de comprendre Ashelya depuis longtemps déjà. Conscient que son esprit était trop acéré pour que le tien puisse saisir les tenants et aboutissants de chacun de ses choix. Chaque geste que tu jugeais inutile était important. Chaque moment que tu voyais comme une perte de temps accomplissait quelque chose. Tu t'étais vite résolu à obéir aux ordres comme tu savais si bien le faire, n'usant de ta tête que lorsqu'elle le réclamait. « Doucement. T'acharner sur un ennemi à terre ne t'offrira aucun avantage. Que du contraire. » Pour autant il t'arrivait d'avoir des rechutes. Comme aujourd'hui. Tu n'avais aucune foutue idée de ce qu'elle faisait avec ces mômes. Juste de la marmaille des rues qui ne méritait pas son attention. Mais elle leur offrait quand même et même si tu te doutais bien que ce n'était pas que par bonté d'âme, tu devinais une certaine sincérité dans le regard qu'elle posait sur eux. Le conseil avait sonné familier à tes oreilles. Tu avais eu droit à un tel commentaire au début. Lorsqu'elle s'était appliqué à faire de toi un cabot un peu plus docile. Les raisons n'étaient néanmoins pas les mêmes. Dans votre cas elle voulait surtout que tu apprennes à garder les gens en vie car ils lui étaient plus utiles comme ça. « Au moins, comme ça, tu te rendras compte que quelqu'un approche et tu ne l'accueilleras pas en position de faiblesse. » Lorsque les regards des mouflets s'étaient tournés vers toi, tu leur avais offert ton regard le plus revêche. Ton visage, cette grosse barbe qui masquait ton absence de sourire et ta haute taille avaient toujours le don de foutre la trouille aux gens. Encore plus aux mômes. Pourtant il n'avait fallu à Ashelya qu'un signe pour qu'ils s'approchent. T'entourant de leurs petits corps inutiles. Tu n'avais que grogné, les poings se serrant contre ton corps. Les gamins avaient le don de t'emmerder. Trop fragiles et pleurnicheurs qu'ils étaient. Les signes n'avaient apparemment pas été compris par la fillette à la chevelure sombre et sauvage qui avait foutu une raclée à un autre gosse lorsque tu étais arrivé. Elle s'était approchée bien plus que les autres pour t'adresser un sourire auquel deux dents manquaient. Et juste après elle n'avait rien trouvé de mieux que d'aller s'enrouler autour de ta jambe. « Grand frère ! » La voix était restée stridente même étouffée par le tissu de ton pantalon. Ce machin était donc l'un de rejetons de ta putain de mère ? L'information ne changeait rien. Ta génitrice perdait toujours son temps à te parler des nouvelles additions à la fratrie mais tu n'avais pas cru qu'elle avait pris la peine de leur montrer qui tu étais. Bordel. Tu t'en serais bien passé. « Tire toi. » Tu l'avais chassé comme on se débarrasserait d'un insecte. Un mouvement sec de la jambe l'avait envoyé valser parmi ses petits camarades et ton regard s'était fait plus sombre. Et voilà qu'elle chialait maintenant.