i'm all grown up now but still feel like a child — shira

DRAGONS DU NORD

Maxine & Shira
A41 SI J91 (après-midi)

i'm all grown up now but still feel like a child

Elle avait un peu honte d'être là alors qu'elle aurait été bien incapable de replacer le dernier moment qu'elle avait passé avec Shira. En temps de crise, elle finissait parfois par atterrir ici, après avoir balayé sa liste d'amis et les raisons pour lesquelles ils ne pourraient pas comprendre. Souvent, elle faisait donc ce choix lorsqu'elle avait besoin de parler de quelque chose en rapport avec Sawyer, mais, ces derniers temps, elle ne s'en était pas senti le droit. Au fond, sans elle, elles ne se seraient jamais rapprochées. Shira était presque son exact contraire et la brune était leur seul point commun. Jusqu'à maintenant. En quittant la maison, elle avait pourtant ignoré ce détail et elle s'était empressée de quitter le climat lourd du Golden Quarter. Elle voulait voir Jack et Shiloh, eux aussi auraient pu lui expliquer ce qu'il s'était passé en son absence, mais elle ne s'en sentait pas la force. Shira était l'option facile parce qu'elle était si mature et, même si elle avait l'affection dure, qu'elle avait toujours eu un point de vue différent sur la vie au sein du clan. Elle ne la jugerait pas non plus pour ce qu'il s'était passé pendant le voyage et elle n'aurait pas à l'écouter détruire Saw comme si elle était soudainement devenue insensible à son existence. Il n'empêchait qu'elle ne l'avait même pas aperçue une seule fois depuis ce qui lui semblait être des saisons entières et qu'elle n'avait même pas jugé bon de s'en inquiéter. Elle s'était dit qu'elle avait simplement sa vie et que Sawyer devait passer du temps avec elle sans le lui dire, mais peut-être n'était-ce pas le cas. Si ça se trouvait, elle avait manqué plus d'une occasion d'être présente pour elle et Shira la détestait aujourd'hui. Son affection était difficile à gagner et peut-être était-elle facile à perdre. Cela ne lui rendit la tâche que plus difficile lorsqu'elle dû frapper à la porte de la maison où toute la famille vivait. Un lieu bien moins cossu et grand que sa propre maison alors qu'ils avaient toujours été plus nombreux. Un détail qu'elle remarquait, mais qu'elle avait toujours été habituée à mettre de côté.

- Je sais que ça fait longtemps, mais...

Elle n'avait même pas été capable d'aller plus loin, ni même de la regarder dans les yeux. Lorsque la porte s'était ouverte, elle s'était contentée de vérifier qu'il s'agissait bien d'elle avant de baisser la tête. Elle bredouillait maintenant, les doigts se tordant avec inconfort. Elle avait sans doute fait une erreur en venant. Dans un séparation, elle choisirait le parti de Sawyer. Comme si il s'agissait vraiment de la seule option. Le problème était qu'elle était un cas à part dont Max ne savait que faire. Au moins, la question ne se poserait plus ensuite, mais c'était un rappel trop douloureux que la vie de Saw n'avait jamais été si liée que ça à la sienne.

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La situation n'était pas facile à gérer. Depuis la tempête, elle se sentait débordée. Entre la douleur, les mauvaises nuits d'Isaac, et Thomas qui tentait de retirer son bandage dès qu'il s'ennuyait, Shira avait souvent l'envie pressante de claquer la porte. La situation du clan n'aidait pas. Comme si ces vieux armés dans les rues n'étaient pas déjà assez problématiques, on leur avait coupé les médicaments. En tant qu'ancienne, elle se trouvait bien loin sur la liste des priorités. Klaus n'avait pas eu besoin de le dire. Comment souvent, elle ne faisait d'efforts qu'avec sa famille. Pour eux, elle ravalait toute sa mauvaise humeur et tentait de camoufler les douleurs. Il n'aurait pas fallu que son idiot de père - toujours trop gentil avec la fille ingrate qu'elle avait été - profite de son travail à l'hôpital pour dérober quelques antidouleurs. Dans cet état de crise, l'échec était assuré et tout bien né qu'il était, il n'aurait pas droit à une seconde chance.

L'après-midi avait vu un peu de calme revenir dans la maison. Sa mère était partie dans la matinée pour sa première journée de travail à l'usine et son père était de garde à l'hôpital. Shira avait donc dû gérer les deux monstres seule. Heureusement, Isaac s'était enfin endormi dans la chambre et Thomas jouait calmement avec ses figurines taillées dans du bois. Cela voulait dire un peu de repos pour elle.

Sauf que quelqu'un venait de toquer à la porte.

Shira se tendit, observant le silence le plus complet. Elle attendit mais aucun cri ne vint lui gratter l'oreille. Son fils n'avait pas été réveillé. Un bon point pour ce visiteur imprévu qui n'en cumulait vraiment pas beaucoup.

Malgré la tentative de Thomas pour aller ouvrir, elle le renvoya à ses jeux. Avec tout ce qu'il se passait sur le territoire, elle n'aimait pas l'idée de le laisser faire ça. Elle s'aida donc de sa canne jusqu'à la porte et l'ouvrit doucement, son épaule s'appuyant finalement au chambranle lorsqu'elle se rendit compte que la personne dehors n'était pas une menace. Juste un autre gosse cherchant à se cacher dans ses jupes. Shira le voyait venir sans mal.

Elle prit un instant pour observer Maxine. Shira n'était pas assez gentille pour la mettre à l'aise directement mais elle se souciait d'elle. Qu'elle soit revenue du voyage entière la soulageait. Elle était de toute évidence en mauvais état mais il lui semblait en tout cas qu'elle avait encore tous ses doigts.

Qu'est-ce que t'as encore foutu, Sawyer ? Parce qu'il ne pouvait s'agir que de ça. Non seulement Max ne se tournait vers elle que lorsque Saw était concernée, mais elle avait en plus toujours eu cet air spécial qu'elle n'aurait su décrire. A ses yeux, le résultat aurait été le même si on avait écrit le prénom de la brunette à la graisse noire sur le front de Maxine. Ce qui l'inquiétait tout de même était qu'elle semblait plus mal encore qu'à l'accoutumé.

Shira finit par soupirer et réaffirma son poids sur la canne.

— T'as de la chance, tu me fais pitié. lâcha-t-elle avec une froideur feinte.

Elle tourna ensuite les talons et commença son long chemin vers le séjour, laissant la porte béante derrière elle. Shira jugea tout de même bon d'ajouter quelque chose par-dessus son épaule.

— Et ne réveille pas mon fils. Je ne veux pas de ton sang dans ma maison.

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Le silence était lourd et elle se prit à fermer les yeux, attendant presque que la porte se referme brutalement devant elle. Elle l'aurait bien mérité après son attitude plus que moyenne et son absence. Lorsqu'un soupir se fit entendre, elle se rappela de respirer à son tour. Qu'elle soit blasée ne voulait pas dire qu'elle allait la jeter, l'attitude était naturelle pour une femme avec un si mauvais caractère. Pour preuve, elle venait de lui asséner une remarque si typique que Max en leva les yeux avec espoir. Elle n'était pas vexée par ce qui n'avait rien d'un compliment, elle se savait dans un état pitoyable, autant à cause du voyage que du reste. Et puis, un détail la frappa. Comme une nouvelle preuve de son égoïsme, elle ne remarqua que trop tard les blessures, la canne et la démarche difficile de son amie. La tempête l'avait laissée dans un mauvais état, mais elle l'acceptait tout de même. Il lui fallut un instant pour réussir à bouger, pour se sentir réellement invitée, mais surtout pour surmonter le sentiment de culpabilité qui l'avait cloué au sol. Une dernière chose vint la secouer et elle bougea cette fois. Avec beaucoup de précipitation, mais tout en tâchant de ne pas faire de bruit comme on le lui avait demandé. Elle n'avait jamais été douée pour être discrète autour des autres, ils disaient tous qu'elle était trop excitée pour ça. Aujourd'hui, ce n'était pas la même chose, mais le résultat restait similaire. Elle n'en revenait pas. Son fils. Shira avait eu un bébé. Elle avait eu un bébé et elle n'était même pas au courant. C'était pourtant quelque chose de voyant. Cela expliquait sans doute l'absence de Shira dans son paysage. Mais un bébé, ce n'était pas rien. La simple idée la perturbait, comme si elle associait difficilement ce fait avec la Shira en face d'elle. Elle l'avait pourtant vue s'occuper de son petit frère, il ne faisait aucun doute qu'elle ferait une bonne mère. Son avis ne devait pas beaucoup compter dans l'histoire, elle ne savait même pas ce que ça faisait d'avoir une mère, alors une bonne. Cela restait quand même tôt, elle n'avait sans doute même pas pu finir son service.

- Un fils. T'as eu un fils ? T'as eu un fils avec quelqu'un.

Vraiment, son esprit ne parvenait pas à faire la mise au point. Elle avait continué à avancer dans la maison, rôdant toujours autour de Shira, la voix basse, mais les intonations trop fortes, comme si elle feignait de crier, mais sans faire de bruit. Un bébé. Shira et un bébé. Elle n'aurait pas pu le voir venir, contrairement à la majorité du territoire. Le pouvoir de l'innocence.

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Pour sa plus grande surprise, Shira songea qu'elle avait dû sous-estimer l'innocence naturelle de Maxine. Elle n'aurait pas cru cela possible. A croire que cette petite avait été encore plus couvée que prévu. Entre son père et Sawyer, elle n'aurait pas dû être étonnée. Elle la pensait pourtant au clair avec les choses de la vie. Au moins par mesure de prudence, quelqu'un aurait du se charger de lui donner un cours accéléré sur le sujet. C'était un miracle que rien de fâcheux ne soit arrivé à cette gamine. Heureusement que la majeure partie des gens qui aurait pu profiter de sa naïveté n'était que trop conscient de son statut.

Dans d'autres circonstances, Shira aurait pu rectifier ce problème. Aujourd'hui, elle manquait de patience.

— Oui, Max. C'est généralement comme ça que cela se passe. railla-t-elle en levant les yeux au ciel.

Shira avait continué jusqu'au salon pour aller se poser délicatement dans le fauteuil. Thomas les avait observé un instant, puis retourna à ses jeux. L'enfant avait toujours été doué pour lire les ambiances et se tenir à carreau lorsque le moment le demandait. Elle s'installa plus confortablement, la jambe reposant sur un tabouret, et fixa son regard doré sur son invitée.

— Pourquoi t'es là ?

Toujours aussi directe. Shira n'avait jamais aimé se perdre dans les détails lorsqu'ils étaient inutiles. Elle n'avait rien à gagner en se montrant trop douce. Maxine n'était sûrement pas venue la voir pour se faire materner. Souvent, elle recherchait même le contraire.

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Une question continuait de flotter dans son esprit, pendue juste au bord de ses lèvres, mais elle ne parvenait pas à la faire sortir, aussi obsédante soit-elle. Sans doute parce qu'elle ne voulait pas vraiment savoir, ou qu'elle n'était pas prête à encaisser une preuve de plus que Sawyer avait passé sa vie à lui cacher des choses. Au final, qu'elle sache ou non n'aurait pas dû compter, la personne qui aurait dû lui dire était Shira et c'était son droit de ne pas partager une telle nouvelle. Avec elle, c'était différent, leur relation n'était pas si profonde et on parlait d'une situation si spéciale qu'elle n'avait en elle que de la surprise, aucune rancœur face à un nouveau secret qui lui éclatait au visage par hasard. Sans doute car ce n'était pas un secret non plus et qu'elle aurait pu savoir beaucoup plus tôt si elle avait pris la peine de prendre des nouvelles de son amie. Que Sawyer soit ou non dans la confidence n'avait donc aucune espèce d'importance. Elle ne s'interrogea par contre par sur le père du bébé, trop consciente qu'on avait pas besoin d'être deux pour élever un enfant. Même la moquerie lui échappa. Elle avait été trop occupée à faire un petit signe à l'enfant qui jouait dans un coin, presque désolée de ne pas avoir en elle le cœur d'en faire plus. La question directe et la voix ferme avaient eu l'art de lui remettre les idées en place et elle sentit à nouveau le poids devenir plus présent sur ses épaules, son cœur logé dans sa gorge.

- J'ai besoin de savoir ce qu'il s'est passé pendant mon absence. La vraie version.

Elle ne savait pas exactement pourquoi elle s'était sentie obligé d'insister sur ce point. Bien sûr que Shira n'allait pas lui raconter l'histoire comme l'avait fait son père. Peut-être était-ce juste une façon de lui faire comprendre qu'elle était consciente cette fois de ce qu'il se passait et qu'elle avait enfin compris le prix de ses privilèges.

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Shira se questionnait sur la présence de Max, certes, mais il n'y avait pas que ça. La question était une mise en bouche logique. Elle ne doutait pas de sa capacité à la faire parler. Maxine n'avait rien d'une tombe et Shira avait l'art de délier les langues. Tôt ou tard, elle saurait ce qui s'était produit. Elle savait mettre sa curiosité en sourdine car elle savait pertinemment qu'elle obtiendrait les réponses voulues. Shira n'aurait pas été intéressée par le cas de n'importe qui. Max restait spéciale, tout comme Sawyer dont elle était trop habituée à ramasser les désastres.

Que l'autre dragonne soit venue pour une raison aussi sérieuse eut le don de la surprendre. Il était normal qu'une situation aussi critique perce sa naïveté pourtant. La patrouilleuse avait en plus le cœur sur la main et le bien-être des autres était important pour elle. Seulement, son père prenait trop de place dans cette histoire. Un père qu'elle avait trop longtemps adulé que pour en ressortir indemne.

— Le commun des mortels ne sait pas grand chose. lâcha-t-elle dans un semi-soupire. Ce que je peux te dire c'est que cette situation craint. Depuis la tempête, ce sont les anciens qui donnent les ordres. Samuel avait tout d'un ange à côté. Ils forcent les blessés à travailler. Le rationnement est plus drastique encore qu'en temps normal. Et parce que les vipères nous ont apparemment dans le nez, leurs remèdes sont plus chers. Ils ne sont pas nombreux à avoir vu la couleur d'un médoc ces derniers jours. Sauf si tu es spécialiste ou proche de quelqu'un de haut placé, je suppose.

Comme prévu, Shira n'avait rien enrobé.

— Ton père, Lila, les parents des autres goldens,... Ce ne sont rien d'autres que des tyrans, Max.

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Elle n'était pas particulièrement à l'aise, debout au milieu d'une pièce où elle avait pourtant déjà pris ses aises. Elle avait passé des soirées vautrées dans un fauteuil, empiétant à moitié sur l'espace de Sawyer, pendant qu'elle discutait de sujets qui lui volaient par-dessus la tête avec Shira. La maison avait ses souvenirs positifs, mais tout était trop différent, elle se sentait trop merdeuse, et elle était après tout venue pour demander une faveur. Faute d'avoir reçu une invitation à s'installer, elle avait donc préféré rester plantée là, changeant nerveusement son poids d'un pied à l'autre jusqu'à ce que les réponses viennent enfin. Après ça, il n'y avait plus eu de place que pour le choc et ce sentiment qu'elle aurait dû le voir venir. Son père avait commencé à prendre de nouvelles habitudes il y a un moment déjà, il avait recommencé à sortir plus souvent et elle n'avait pas été inconsciente de ses allers-retours au QG. Il avait été trop facile de se convaincre que c'était normal au vu des décisions de Samuel et des erreurs qu'il faisait, il fallait bien que quelqu'un ramasse les pots cassés, mais il s'était mis à faire beaucoup plus que ça. Il lui avait parlé de son projet sans détour juste avant qu'elle n'atterrisse ici, mais elle comprenait seulement les implications maintenant. La situation était beaucoup plus complexe que prévue et elle se demandait jusqu'à quel point il était réellement conscient de ce qu'il était en train de créer. Elle ne su pas quoi dire au début, sa tête s'affolant face aux nouvelles informations et cherchant une excuse à tout ça. Après tout, le règne de son père avait été bon, tout comme celui de Lila. Ils s'agissaient de deux Chefs respectés, durs, mais justes. Ou, du moins, elle l'avait toujours cru, mais était-elle vraiment bien placée pour témoigner avec la position qu'elle avait toujours occupée ? Elle n'avait jamais eu à s'inquiéter de manquer de nourriture ou d'eau, elle avait toujours été soignée par les meilleurs et elle n'avait pas réellement connu le vrai froid. Elle ne pouvait pas tout remettre en cause non plus, d'autres faisaient la comparaison entre le règne actuel et le précédent, mais elle n'avait pas non plus eu à se plaindre sous Samuel. Elle savait bien sûr depuis des années que les injustices étaient nombreuses et elle avait essayé de se battre contre elles, mais peut-être avait-elle tourné un regard accusateur vers les mauvaises personnes. Elle avait détesté ceux qui abusaient du système sans jamais réellement songer que le réel problème venait du système en lui-même et de ceux qui le mettaient en place dont son père faisait partie.

- Il... Il veut que je l'aide. Que je persuade les autres Membres de le rejoindre. Les non-natifs aussi. Il pense que parce que... Que j'y arriverais.

Elle l'avait ajouté avec une grimace, parler de ça la ramenant directement à la dernière conversation qu'elle avait eu avec Sawyer et, plus globalement, à la raison qui avait provoquée leur rencontre. Cette injustice elle-même.

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Silencieuse, Shira observa l'aspirante avec attention. Elle guettait ses réactions avec une inconfortable impression dans le ventre. Pour une fois, elle ne savait pas comment Maxine allait réagir. La jeune femme était facile à lire habituellement. Elle avait tout d'un livre ouvert avec son visage si expressif. Aujourd'hui, elle n'était certaine de rien et cela ne lui plaisait pas. L'ambiance dans la pièce était aussi lourde. Si lourde que Thomas avait fini par abandonner ses jeux pour se mettre debout et quitter la pièce. Elle l'avait laissé partir avec un sourire rassurant et une caresse dans ses cheveux. L'instant d'après, ses yeux étaient retournés vers Maxine.

Lorsque cette dernière s'exprima enfin, ce fut avec une certaine difficulté. Cet air blessé était revenu avec une grimace. Shira n'était pas idiote, elle saisit bien le problème qui se posait ici. L'implication de Sawyer dans son état était une évidence qu'elle ne pouvait plus ignorer. Mais elle n'était pas certaine que le moment soit idéal pour en parler.

Shira soupira. Ces derniers jours (ou aurait-elle dû dire saisons ?) l'avaient épuisée. Gérer les non-dits était plus facile lorsque sa propre vie n'était pas une lutte en soi. Elle n'avait plus la force pour le rôle que Sawyer lui avait fait trop souvent joué.

— Ton père est un idiot. lâcha-t-elle avec une pointe d'agacement. Et qu'il t'en pense capable prouve qu'il ne te connait pas vraiment.

Maxine n'était pas de ce bord là. Elle ne changerait pas son fusil d'épaule de la sorte, Shira en était certaine. C'était une chose qu'elle avait toujours vu et qui avait trop souvent échappé à Saw au vu des secrets qu'elle lui cachait : Max était solide. Elle n'était pas une enfant à qui on devait cacher les duretés de la vie. Elle était capable de les encaisser. Elle restait naïve et avait tendance à peut-être trop suivre son cœur mais c'était autant une force qu'une faiblesse. C'était ce qui la caractérisait. Pour cette raison, Shira était certaine qu'elle ne verrait jamais un brassard sur le bras de cette fille.

Elle changea donc le sujet pour aborder le non-dit qui pesait si lourd entre elles. Il était inutile de répéter des certitudes.

— Sawyer a déconné.

Shira l'énonça comme un fait et non comme une question. Elle n'en doutait pas une seule seconde. Ce qui devait arriver s'était produit.

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L'idée était difficile à accepter. Durant longtemps, il n'y avait eu que son père et elle, les amis qu'elle s'était fait au fur et à mesure venant plus tardivement, lorsqu'elle avait appris à être moins sauvage. Il lui avait tout appris, avait façonné sa vie avec un certain soin, elle peinait donc à s'imaginer être une étrangère pour celui qui avait été son roc. Seulement, ces derniers temps, elle devait bien reconnaître qu'il n'avait plus été aussi présent et qu'il ne lui avait pas donné l'occasion d'exister à ses côtés. Dès qu'elle avait commencé à se construire hors du territoire, il avait pris du recul en traînant de plus en plus avec les autres Anciens. Au final, elle avait grandi et ils s'étaient éloignés. Elle ne savait même pas si c'était elle qui avait trop changé ou si c'était lui qui s'était écarté du père qu'il avait été. Avant qu'elle n'ait pu réellement encaisser, elle eut l'impression de se prendre un autre coup qu'elle aurait pourtant dû voir venir. Bien sûr que Sawyer allait être mise sur le tapis. C'était aussi dit avec tellement de certitude qu'elle se retrouva à se questionner une nouvelle fois sur toutes ces années d'amitié. Shira semblait en savoir beaucoup trop. Comme si cette dispute devait se produire.

- Elle... On est plus amies.

La formulation était trop naïve, trop simple pour ce qu'elle représentait. L'histoire était beaucoup plus compliquée et douloureuse, mais elle n'avait pas eu d'autres mots pour s'exprimer. Même dans sa tête, elle peinait encore à donner du sens à tout ça, alors l'expliquer semblait compromis.

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A quelques reprises, Shira s'était demandé ce que la chute d'un tel duo donnerait. Elle avait vite mis cette idée de côté. Il était inutile de se projeter dans l'avenir lorsqu'on avait aucun contrôle. Elle aimait être préparée et garder les rennes bien en main mais elle avait dû apprendre à tout lâcher par moment. Un enseignement qu'elle devait à la maturité. C'était aussi plus facile lorsque la situation ne la concernait pas directement. De nature, Shira était égoïste. On ne la changerait pas. Malgré toute l'affection qu'elle éprouvait pour Sawyer et Maxine, dans le grand schéma de la vie, elles étaient des étrangères.

Devant une explication qui ne valait pas grand chose, Shira soupira longuement.

— Qu'est-ce qu'elle a fait, Maxine ? Une pause. Qu'est-ce qu'elle t'a dit ?

Elle n'était pas guidée par une curiosité malsaine. Shira voulait comprendre, certes, mais elle voulait aussi que la brunette expulse ce qu'elle gardait en elle. Ils ne devaient pas être nombreux à se soucier réellement de Sawyer dans son entourage. Il fallait que Max puisse parler sans que la haine ne pleuve directement en retour.

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A ses yeux, Shira avait toujours été une femme particulière énigmatique qu'elle ne comprenait qu'à quelques occasions. Malgré tous les bons moments passés ensemble, elle n'avait jamais appris beaucoup sur elle et, surtout, elle n'avait jamais vraiment su ce qu'elle trouvait dans leur relation. On ne pouvait pas dire qu'elles avaient beaucoup de points communs à l'exception de Sawyer. En venant, elle s'était d'ailleurs demandé si cela changerait la donne, si elle voudrait encore lui accorder du temps maintenant qu'il n'y avait plus de trio à former. Devant une réaction, elle était aussi paumée qu'habituellement, son intuition se balançant entre lassitude et agacement, peut-être un peu des deux. Shira n'était pas connue pour sa patience, après tout, ni sa tendresse vu son ton direct et cette insistance à lui faire plonger les doigts dans une plaie infectée.

- Qu'elle serait pas revenue si j'étais pas venue à la chercher la dernière fois qu'on s'est pris la tête. Si y avait pas eu la vague de froid, qu'elle avait pas été malade,... Elle m'a laissé faire que parce qu'elle était faible. Je sais qu'après ça on aurait dû parler de ce qui s'était passé, pourquoi elle avait réagis comme ça, mais je l'avais retrouvée et j'ai été lâche.

Ce n'était pas exactement les mots employés, juste ce qu'elle en avait déduis. Au vu du silence de Saw et du peu qu'elle lui avait donné, elle n'aurait rien eu à dire si elle n'extrapolait pas un peu. Repenser à tout ça ne lui faisait vraiment pas du bien, elle sentait bien les picotements au niveau de ses yeux, signe avant coureur de nouvelles larmes qu'elle ne voulait pourtant pas laisser couler.

- On s'est pris la tête parce que je me suis rendue compte qu'elle avait toute une vie dont elle parlait jamais. Je comprends qu'elle ait ses secrets, c'est pas ça le problème. C'est juste que... J'ai remarqué des trucs pendant le voyage et j'ai compris qu'elle partageait rien, en fait. Que des trucs superficiels. Elle m'a laissé m'ouvrir sans jamais envisager de le faire en retour. Je me suis rendue compte que je la connaissais pas. Pendant tout ce temps, j'ai l'impression d'être la seule à m'être accrochée.

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La docilité de Maxine avait toujours été un trait de caractère qu'elle appréciait. On gagnait du temps face à quelqu'un qu'il n'était pas difficile de faire obtempérer. Shira s'en voulait d'autant moins de le penser qu'elle agissait là pour le bien de l'aspirante.

Un classique de la part de Sawyer. La jeune mère eut toutes les peines du monde à retenir un soupir mais elle leva les yeux au ciel dans un pur signe d'agacement. Shira n'avait pas été là durant cette période, elle avait eu mieux à faire en tentant de rester vivante durant sa grossesse, elle n'était donc pas très au fait de tout ce qu'il s'était passé. Une petite part d'elle songea qu'elle aurait aimé avoir eu l'occasion de remettre les idées en place de cette idiote qu'elle appelait son amie. Mais elle détestait refaire le passé. Lorsque Sawyer s'y mettait, elle pouvait aussi être très bornée. Elle savait y faire pour rendre sa vie plus compliquée qu'elle n'avait besoin de l'être.

Maxine avait appris ce qui avait été évident pour beaucoup de gens. Shira n'aurait pas été jusqu'à dire que Sawyer ne se souciait pas de sa meilleure amie, loin de là, mais sa façon d'aimer était plus que douteuse. Plus encore avec Max. La membre était loin d'être idiote ou naïve, elle savait depuis longtemps qu'elle n'avait appris des choses sur Saw que parce qu'elle avait été présente au bon moment. Il était difficile de tout cacher à la personne qui vous ramassait lorsque la vie prenait un tournant difficile.

Cette fois, Shira soupira.

— Je ne vais pas prétendre être étonnée.

Faute d'avoir l'énergie de bouger, elle tapota l'accoudoir du fauteuil dans lequel elle était installée pour inviter Maxine à venir s'y asseoir. La brunette avait l'air sur le point de craquer et elle n'était pas sans cœur.

— J'essaye de la pousser à s'ouvrir depuis longtemps. Même pour elle. Mais tu sais comment est cette tête de mule.

» a little too old to be a kid, not enough to be a grown up — ilya
» laugh with many, don't trust any (shira)
» play date (Shira)
» it doesn't feel right (ella)
» I'm not going to pretend I know how you feel ft. Lena

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