When I see your face,
it's like a space in my heart is filled

sofia ∞ june

Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ Sofia, elle avait cru que le retour à la maison lui apporterait une sentiment de finalité après tous les jours qu'elle avait passé sur les routes. Qu'elle se poserait dans un fauteuil et qu'un soupir lacé d'un enfin s'échapperait, mettant fin à l'histoire de la fois où ils étaient parti en voyage et où beaucoup de trucs avaient vrillés. Posée là, paralysée entre le confort retrouvé et l'impression bizarre d'être décalée, elle zieuta le plafond et commença à compter sur ses doigts. Résolument, elle dû admettre qu'elle n'avait aucune foutre idée du jour qu'on était. Elle était trop paumée depuis que le monde était parti en couille et avait décidé de brouiller leur calendrier. Ce qu'il fallait retenir, elle se dit, était qu'ils étaient parti depuis une éternité et qu'elle aurait dû avoir mieux à faire que de laisser le temps filer ici. Elle avait des copines à aller voir, des gens à rassurer et à qui raconter ses aventures. Sofia, elle était juste trop vidée pour ça. En plus, elle ne se sentait pas vraiment rentrée, pas encore. Elle se décida à faire un feu parce qu'il n'y avait rien de plus chaleureux et de familier que ça. Les lieux feraient plus habités comme ils l'étaient en temps normal. Même devant les flammes, l'odeur de fumée remplaçant celle de la poussière qui s'était accumulée en leur absence, elle se sentait toujours un peu vide.

Le délire n'était pas dur à comprendre. Elle aurait dû se mettre au clair avec elle-même beaucoup plus vite que ça mais elle eut cette sorte de réalisation alors qu'elle vidait son sac sans grande délicatesse sur le sol de sa chambre. Vêtements et matériaux étaient tombés dans un amas informe. C'était d'autant plus con qu'elle n'avait eu aucun sentiment de manque à endurer. P't'être que c'était ça aussi. P't'être qu'elle était tellement habituée qu'il avait fallu une séparation justement pour qu'elle comprenne. Sofia, elle se sentait pas vraiment rentrée parce que June était pas là. Elle avait d'autres priorités après tout ce qu'il y avait eu. Des trucs de gradée à faire, des gens à voir parmi les grandes pontes. Elle avait sa famille aussi. « Faut pas que je l'étouffe. » Réflexion faite à voix haute pendant qu'elle balançait ses affaires vers les directions où elles seraient rangées plus tard. Malgré tout ce que June avait dit, c'était différent maintenant. Elles étaient revenues. Même si elles vivaient ensemble depuis pas long, ça voulait pas dire qu'elles allaient passer leur temps ensemble comme pendant le voyage. Faudrait bosser et leurs horaires ne se croiseraient pas forcément. Elle fit le deuil d'une occasion dont elle avait sans doute pas assez profité en se décrassant pour la première fois depuis trop de temps.

C'était pas pour rien qu'elle passait toujours d'une personne à l'autre, Sofia. Pas pour rien qu'elle avait tant d'amis. Quand on la laissait seule, elle gambergeait trop. Il suffisait de voir le fil de ses réflexions à chaque nouvelle action. Elle mettait un truc à cuir sur le feu, toute rongée par le silence de la maison vide, lorsque la porte s'ouvrit. Enfin. Il était là ce soupir. Le soulagement lui délaça les muscles un à un et elle sentit ses épaules retomber. Toujours accroupie devant la cheminée, elle lança un regard à June, son sourire recommençant à déborder comme il avait l'habitude de le faire. « T'es là. » Elle s'était levée pour rejoindre sa binôme d'une démarche bondissante avant même que la porte n'ait le temps de se refermer. June était là et rien ne ressemblait plus à un retour à la maison que quand Sofia l'attrapa dans un câlin qui la fit décoller du sol. Sa queue de chien métaphorique devait battre à cent à l'heure. « Tu m'as trop manqué. »



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Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ June sentait comme la familiarité et le lointain, une dichotomie étrange. Le visage enfoui contre elle, elle se laissa le temps d'en profiter et de calmer son agitation. La paire de bras qui s'ajouta à l'étreinte termina le travail et Sofia se sentit respirer plus profondément malgré la position qui aurait dû l'empêcher de développer plus sa cage thoracique. Tout était dans la tête et dans le cœur. « Désolée d'avoir été longue. Personne ne semblait vouloir me laisser rentrer. » Elle bougea un peu la tête, Sofia, une façon de dire que c'était pas grave. June avait une normalité qui était différente de la sienne et elle pouvait que l'accepter. C'était une bonne chose puisque ça voulait dire qu'elle avait réussi. Les responsabilités venaient avec le succès. Peut-être que c'était pour ça que Sofia n'en voulait pas vraiment, du succès. Son ambition dans la vie n'était pas de ne rien foutre de ses journées, absolument pas, mais elle voulait avoir ses heures de liberté et pouvoir consacrer du temps à des trucs plus accessoires. Bien qu'elle ne considère pas ses occupations comme accessoire, c'était plus qu'elles ne concernaient pas le sort du monde ou presque. « Tu m'étonnes, depuis le temps qu'on t'avait plus vue. » Insérez ici un nombre de jours avec lequel elle était toujours pas au clair. « J'doute pas que t'as dû avoir des discussions passionnantes. » Elle voulait pas diminuer l'importance des dites discussions mais elle ne les imaginait pas très fun, Sofia. Elles ne pouvaient pas l'être, il y avait trop de vies qui dépendaient des mots échangés par les gradées.

Elle relâcha son étreinte avec un sourire et alla placer un bisou bruyant et exagéré sur la joue de June. « Tu devrais aller te débarbouiller et changer de fringues. Y a encore de la flotte qui est dégelée dans la bassine du couloir. »



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Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ La bouffe était pas encore prête, la cuisson prendrait du temps. C'était un détail tout con du quotidien qu'elle n'était pas mécontente de retrouver. Elle appréciait pas particulièrement l'activité en elle-même, par contre elle aimait être à nouveau autonome. Y avait une limite au temps qu'elle pouvait passer à suivre le troupeau sans avoir le choix. Même si les petits bouts de viandes tout bien grillés qui avaient à l'occasion pimenter les repas sur la route allaient lui manquer. Là, c'était retour à tout ce qu'il restait au fond des entrepôts. Raison pour laquelle ça prendrait du temps, elles se mangeraient pas si facilement, ces racines. Sofia, elle abandonna donc la marmite pour aller se caser dans un fauteuil. Foutre les pieds au repos était le paradis.

Lorsque June réapparu, le cerveau de Sofia prit la peine de se reconnecter après un long moment de blanc à fixer le mur. Elle adressa un sourire à sa binôme et la laissa s'installer sans broncher. Trop contente qu'elle était pour ce contact qu'elle n'était pas allé gratter d'elle-même comme un chien abandonné. Vraiment, l'emménagement, meilleure idée. Elle allait s'habituer avec plaisir à ce genre de moments.

« J'en avais presque oublié quelle tête t'avait sans la crasse. » Elle savait pas toujours trop quoi foutre avec le silence, Sofia. Elle l'avait brisé d'une vanne sans trop y réfléchir. Un sourire amusé tout droit dirigé vers June pour adoucir le tout.



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Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ Elle était contente de les savoir à la maison, Sofia. Même si la crise n'était pas encore passée et qu'on en demanderait beaucoup à June, elle aurait au moins l'occasion de prendre un peu plus de repos. Elle la trouvait trop morne depuis la maladie, ces heures horribles lui avaient foutu un coup, on ne pouvait pas le voir autrement. Si on lui avait demandé son avis sur la question, elle aurait monté la garde devant la porte pour que personne ne vienne emmerder sa June pendant au moins trois jours mais elle se doutait bien que ce serait mal vu de remballer la Chef ou sa Seconde. Puis, avec James, elle ne savait jamais vraiment si c'était pour le boulot ou pour le plaisir. A tous les coups, sa binôme se serait plains de l'attitude mais le besoin de la protéger de Sofia aurait été enfin satisfait. Toutes gradées qu'elles étaient, elles n'étaient pas les mieux placées pour savoir et se soucier de ce dont June avait besoin après tout ça.

« Je suis contente qu'on soit rien que nous deux. » Elle avait beau aimer l'entendre, Sofia, la vérité derrière était difficile à gober. « A croire que j'ai enfin déteins sur toi. T'es toute sentimentale. » Elle était douée pour ça. Réagir avec légèreté quand un autre sentiment essayait en vain de lui faire monter les larmes aux yeux. Elle avait l'expérience pour, les filles comme elle, c'était mieux quand elle ne se mettait pas à chialer sérieusement pour un rien. Elle serra fort June contre elle à la place. « T'as qu'un mot à dire pour que ça arrive plus souvent. » Elle se força à rire un peu avant de reprendre. « Plutôt quatre mais t'as compris le principe. Je nous débarrasserais des gens autour. » Elle pouvait peut-être pas le faire de façon aussi permanente ou silencieusement effrayante que June mais elle n'aurait aucun mal à l'entraîner à l'écart sous le prétexte de faire un caprice. Fallait bien que ça serve d'être un peu too much selon certains.



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Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ « Tu es trop solaire pour ce monde, tu le sais, n'est-ce pas ? » Qu'est-ce qu'elle racontait là, June ? Sofia n'était pas habituée. Elle commençait même à se demander si y avait pas un truc qu'elle aurait dû comprendre. Ce qui était sûr, c'était qu'elle ne savait pas trop comment réagir. Elle le savait bien que sa June l'appréciait pour ce qu'elle était, inutile de trop le verbaliser. Elle allait pas prétendre, ça faisait du bien de l'entendre parfois. N'empêche que trop ça foutait la gêne. « Nah. Juste ce qu'il faut. » Le mieux restait de tout ensevelir. Une couche d'humour et respirer redevenait un acte normal. Pour pleins de trucs, elle en faisait trop. Elle le savait, Sofia. Elle poussait le bouchon parce que cela valait mieux comme ça. June n'avait pas tort, solaire, elle avait tout fait pour l'être, la Sofia. Elle se préférait comme ça, loin des erreurs que celle qu'elle avait été à cause des difficultés avait commises.

Elle soupira, Sofia, et bascula la tête contre le dossier du fauteuil. Dans cette position, son corps se souvenait sans mal de la dureté du voyage. La fatigue, ça s'installait quand on se posait. Tout le monde le savait dans cette ville. Elle s'en étonnait pourtant encore. Elle n'osait pas imaginer ce que cette première pause devait faire à June. Sur ce sujet : « Tu vas pouvoir prendre quelques jours de repos ? »



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Année 41, seconde saison tempérée (jour 98 - fin de journée) ✻✻✻ « Oui, Théa y tient. » « Encore heureux. » Elle bougonna, Sofia. « T'as beau être gradée, t'es humaine avant tout. » Elle l'aimait bien, la Chef. Le changement avec Annabella n'aurait pas pu être plus drastique. Théa, elle faisait accessible. Avec respect, elle lui trouvait des allures de meuf normale, Sofia. Cela changerait peut-être plus tard, sans doute même, mais elle aimait bien ce truc simple de pas avoir peur de croiser la big boss. L'ancienne, il y avait toujours une notion de chance. Fallait pas déconner le mauvais jour. Elle se demandait pas mal si elle en avait eu des bons jours, Anna. Mais avec Théa, c'était plus facile et ça avait peut-être à voir avec le fait qu'elle l'avait déjà vu picoler.

« Putain, ma marmite ! » Elle s'exclama d'un coup. Bondir sur ses pieds lui rappela la longue route de retour jusqu'à la ville qui l'ankylosait encore mais elle allait pas laisser la bouffe accrocher pour autant. On gâchait pas les ingrédients et elle tenait pas à déguster son ragout saveur cramé. Avec sa longue cuillère en guise d'arme, elle partit à l'assaut de la mixture. Heureusement, le fond était encore liquide. Elle s'en essuya le front d'une main, autant de soulagement que parce qu'elle se tenait directement devant le feu après trop de jours à se les geler. « On est en veine, ma June. » Qu'elle lâcha en se tournant pour adresser un sourire lumineux à sa binôme. « File moi les bols s'te plaît, qu'on le mange ce truc. »



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