Sasha & Gaëlle

année 41 ; seconde saison tempérée ; soirée 88

a new dog in your life ? Really ?

J'avais travaillé de mon côté pendant toute la journée, ne voulant pas ruiner le lien qui nous unissait, Gaëlle et moi. Depuis le début du voyage, elle n'avait pas suffisamment d'occasions de réellement souffler, loin de moi, dans sa bulle et je savais que je risquais de tout faire foirer, même si elle me supportait depuis plusieurs saisons. Même si j'étais l'exception qui confirmait la règle, elle aurait pu se lasser beaucoup trop vite pendant cette escapade. Pendant la nuit où bon nombre de Membres avaient été dépassés par la maladie, je m'étais assurée qu'elle ne risquait rien avant de m'occuper d'une Vipère en piteux état, du mieux que je pouvais, en allant de temps à autre poser des questions à Rory pour ne pas faire plus de mal que de bien. Une occasion donc toute trouvée de lui laisser de l'espace et puisque nous devions travailler pour quatre, je n'avais pas le temps de l'embêter.

Alors quand je l'avais aperçue lors de la soirée, pendant que je mangeais au côté d'une autre Vipère, j'avais foncé vers elle. Jusqu'à ce que je m'arrête net en voyant une touffe de poils à sa droite. C'était... bizarre. J'avais appris à apprivoiser vaguement le chien de ce Jaguar. C'était plutôt l'inverse. Je n'étais pas la plus courageuse d'entre tous, peu habituée à en avoir dans les parages depuis que j'étais gamine. Mes parents étaient beaucoup trop concentrés sur leurs soucis pour faire attention au reste et dans le voisinage, personne n'avait ni chien, ni chat. Mais bizarrement, avec les chats, ça se passait beaucoup mieux. « Graou, t'es au courant que ça te suit ? T'en es consciente ? » J'avais chuchoté ces mots comme si le chien pouvait me comprendre et s'offusquer. C'était stupide comme raisonnement.

Gaëlle & Sasha
A41 ST2 J88 (soirée)

a new dog in your life ? Really ?

Quelle journée ! J'étais partie pour une petite exploration tranquille, un retour tant attendu à la solitude, et c'était tout le contraire qui s'était produit. Pour sûr, Machin m'avait porté la poisse et elle était la raison de cet enchaînement qui m'avait conduit à revenir au campement beaucoup trop tard, la dalle au ventre, les mains pleines de sang séché parce que j'avais dû utiliser un stupide couteau, et une nuisance supplémentaire me suivant à la trace. J'avais cru que la chose se lasserait ou qu'elle choisirait de la coller elle, mais, comme le monde semblait contre moi aujourd'hui, elle n'avait fait que combler la distance. J'avais bien essayé de lui dire de se barrer, mais, clairement, l'intellect n'était pas présent derrière ce regard brillant. On allait pas se mentir, c'était la raison qui m'avait empêchée de lui loger une balle entre les deux yeux ou même de lui balancer le putain de caillou que j'avais ramassé. Ca et le fait qu'il y avait un truc trop familier chez ce cabot. Et, malheureusement, ça ne venait pas du fait qu'il appartenait à la même espèce que Jax. En théorie. Il lui ressemblait dans la forme en tout cas, à défaut d'avoir la même tête. Ils étaient aussi différents que Oz et moi l'étions. Non, la ressemblance venait d'ailleurs et, ça, ça puait au vu de la tolérance que j'avais développé pour la personne en question. Pour autant, ça ne m'avait pas empêché d'adopter une tactique similaire. Une idée stupide vraiment, on ne s'attendait pas à un résultat différent en appliquant une méthode identique. Sauf qu'on parlait ici d'un être vivant et que les lois s'appliquaient différemment avec eux. Certains comprenaient le message lorsque je les niais, d'autres non. Il fallait dire qu'il y avait des gens sacrément cons dans ce monde pour trouver ma présence plaisante ou voir un challenge dans mon attitude. Tout ça pour dire que j'avais attiré des regards en rentrant et, si ce n'était pas une nouveauté, la raison l'était et cela restait dérangeant. Après tout ça, je n'avais pas été étonnée de me faire accoster par Sasha, le contraire aurait été plus perturbant.

- Yupe et on va ignorer ce fait.

J'étais franchement tentée de lui signaler que tout ceci était de sa faute, que si elle n'avait pas creusé sous mon indifférence je n'aurais pas eu de scrupule à me débarrasser du problème, mais je n'avais pas envie de mettre des mots là-dessus. Il y avait des trucs qui ne se disaient pas sous peine de s'attirer des embrouilles.

Sasha & Gaëlle

année 41 ; seconde saison tempérée ; soirée 88

a new dog in your life ? Really ?

« Yupe et on va ignorer ce fait. » Ce comportement et cette réponse avaient eu le don de m'étonner, ça ne ressemblait pas à Gaëlle qui ne se laissait pas approcher par les autres, ni ne se laissait suivre sans répliquer. C'était complètement inouï. J'hallucinais. J'aurais presque rigolé si ce n'était pas un chien, si je n'avais pas eu peur qu'il ait une réaction face à laquelle je n'aurais pas su comment réagir. Je l'avais regardée un moment sans pouvoir lui dire quoi que ce soit, sous le choc, cherchant un signe qui m'expliquerait qu'elle réagisse comme ça soudainement. Elle n'avait pas été malade comme les autres mais elle avait peut-être chopé une autre crasse pendant ce voyage. Je ne croyais pas à cette soudaine acceptation de sa part. Gaëlle avait toujours été fière d'être celle qu'elle était et avait toujours été claire, elle ne changerait pour personne.

Je m'étais approchée d'elle, en vérifiant que le chien ne s'approchait pas de moi. Avec un peu de chance, il sentirait ma méfiance et ne voudrait jamais de moi. Une fois devant la blonde, à quelques millimètres d'elle, j'avais touché son front. Pas de fièvre. J'avais regardé derrière sa nuque si elle n'avait pas des traces de choc mais rien. « Ton comportement est bizarre. Tu es tombée sur la tête ? Tu as reçu un coup d'un Libre ? » Je ne voyais que ça. Certains chocs ne se laissaient pas de trace sur le corps et c'était la raison la plus probable de ce changement soudain de sa part.

Gaëlle & Sasha
A41 ST2 J88 (soirée)

a new dog in your life ? Really ?

Je n'avais pas réellement envisagé que Sasha satisferait ma demande. Elle pouvait être docile à l'occasion et ne se montrait pas trop difficile le reste du temps, mais elle gardait son petit caractère. Même moi, je pouvais envisager qu'elle soit troublée par la situation. Je n'avais pas grand chose à faire à ce sujet, mais j'en avais conscience et c'était déjà pas mal. Relativement habituée à ce qu'elle me colle, je n'avais pas bronché pendant qu'elle avait fait ses petites vérifications bidons. Je ne savais pas ce qu'elle cherchait, mais, pendant ce temps, elle la bouclait. Cela ne dura bien sûr pas longtemps, tout comme ma patience. La main posée sur son visage, je l'avais poussée sans délicatesse hors de mon espace vital.

- C'est bon, c'est qu'un clébard. Pas besoin d'en faire tout un plat.

Le chien n'avait pas beaucoup bougé pendant ce temps. Il ne paraissait pas inquiet d'être entouré de tant de gens, preuve d'une certaine habitude. Il avait l'air plus curieux qu'autre chose avec sa queue fouettant lentement l'air. Pour mon plus grand désespoir, il n'avait toujours pas l'air décidé à me lâcher.

- On a dégommé des Libres, mais j'allais pas laisser ces losers m'approcher. Tu m'as prise pour qui ?

Sasha & Gaëlle

année 41 ; seconde saison tempérée ; soirée 88

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« C'est bon, c'est qu'un clébard. Pas besoin d'en faire tout un plat. » Je n'étais pas vraiment d'accord avec son affirmation, c'était même tout le contraire. Je ne me moquais pas du fait que ce n'était qu'un clébard, pour reprendre ses mots et elle n'était pas de ceux qui s'attachaient directement à un étranger et je n'avais même jamais imaginé qu'elle puisse s'attacher plus facilement à une boule de poils. Gaëlle était un personnage trop atypique que pour être aussi simple à cerner mais je pensais la connaître depuis le nombre de saisons que nous avions déjà passées ensemble. J'étais sur le cul, incapable de trouver les mots qui traduiraient correctement ce qui se bousculait dans ma tête en ce moment même.

Peu étonnée d'être écartée quand j'envahissais son espace vital, je n'avais même pas réagi. J'avais accepté ce geste beaucoup trop habituel. Je surveillais cependant attentivement son chien à fréquence régulière, craignant beaucoup trop qu'il s'approche sans crier gare. « On a dégommé des Libres, mais j'allais pas laisser ces losers m'approcher. Tu m'as prise pour qui ? » Là, j'avais spontanément rigolé et plutôt franchement. C'était une évidence pour l'une comme l'autre, ce qui rendait sa défense encore plus drôle.

« Je voulais pas te vexer mais tu dois avouer que c'est bizarre de te laisser approcher comme ça par un être aussi collant. » J'avais hoché de la tête pour souligner mes propos, les mains sur les hanches. On ne m'empêcherait pas de penser qu'elle s'adoucissait mais j'avais préféré ne pas l'évoquer explicitement. Je ne voulais pas finir en plusieurs morceaux parce qu'elle n'accepterait jamais cette réalité.

Gaëlle & Sasha
A41 ST2 J88 (soirée)

a new dog in your life ? Really ?

Bon, au moins, on était sur la même longueur d'onde. Je préférais cette réaction à trop d'inquiétude. J'étais revenue entière et sans la moindre égratignure, si elle s'était mise à me tourner encore plus autour en apprenant que j'avais affronté un potentiel danger m'aurait gavé. J'aimais moins qu'elle continue à sous-entendre que je m'intéressais au chien qui n'avait rien trouvé de mieux à faire que de me suivre depuis que je lui avais sauvé la peau. Par accident, il fallait le préciser. Elle n'avait pas totalement tort dans le sens où mon désintérêt n'était pas total non plus. Seulement, c'était lui qui avait fait ce choix, je ne lui avais rien demandé.

- J'sais pas si tu as capté, mais tu viens de décrire ta situation.

Je l'avais grommelé en gardant la moitié pour moi. J'aurais bien voulu lui dire que si elle n'arrêtait pas d'essayer de trouver un sens à la présence du chien, elle aurait des raisons d'en trouver un pour sa propre présence à force, mais je voyais venir d'ici une discussion désagréable.

- Fais comme si il était pas là. Au pire, si il me suit jusqu'en ville, je le filerais à Oz. Il aime bien ça, les clébards.

Sasha & Gaëlle

année 41 ; seconde saison tempérée ; soirée 88

a new dog in your life ? Really ?

« J'sais pas si tu as capté, mais tu viens de décrire ta situation. » J'avais rigolé spontanément plutôt que de me vexer pour ce qui n'était pas exactement un mensonge, ni même une véritable exagération de la situation. J'avais conscience d'avoir réussi une sorte d'exploit en l'approchant et en réussissant à rester dans son environnement parce que je ne me leurrais pas, Gaëlle avait le culot pour demander un changement de binôme si ça la saoulait ou la dérangeait dans son projet de vie. Elle aurait été capable de franchir la limite si elle ne voyait pas ce duo du bon œil.

« Fais comme si il était pas là. Au pire, si il me suit jusqu'en ville, je le filerais à Oz. Il aime bien ça, les clébards. » L'entendre dire ça me fit réagir plus que je ne l'avais même imaginé. J'avais eu un pincement au cœur. Ca réveillait une peur primaire. Si j'étais comme ce chien, si nous étions tous les deux des étrangers qui s'étaient incrustés dans son espace vital sans son accord, j'étais en sursis moi aussi. La peur de me planter et d'être dégagée refit surface. C'était con depuis le nombre d'années où nous traînions ensemble mais avec un personnage comme elle, ce n'était pas si déconnant. Mes parents avaient eux-mêmes pris beaucoup de distance avec moi. J'étais devenue muette, souriant par réflexe, la tête ailleurs.