stop being your annoying self
Année 41 - saison intermédiaire (matin 74)

Il existe quelque chose d'encore plus déplaisant que le ravitaillement : la distribution des rations. Après avoir passé trop de temps sur la confection des colis, tu dois te coltiner une foule de clampins se pressant pour récupérer leurs rations pour les prochains jours. Cet aspect de ta tâche n'a vraiment rien de gratifiant et c'est l'endroit clé pour récolter des problèmes. Ça se bouscule et il faut empêcher les vols et les violences nuisibles. Quelle blague ! Comme si tu avais un quelconque intérêt pour le bien-être de ces idiots de Soumis. Malheureusement, tu dois te plier aux consignes. Seul point positif aujourd'hui ; cette guenon de Jackson n'est pas là. Sa raison de sécher le travail t'échappe totalement et tu espères bien qu'elle s'en prendra plein la gueule pour ça - peut-être même que tu te feras un plaisir de la dénoncer -. Moins positif, la présence de Murphy. Cette chair à pâté ne manque jamais un shift. C'est le minimum à tes yeux, il ne faudrait pas qu'elle se croit autorisée à foutre n'importe quoi, mais sa présence te gave. Au-delà de son sang étranger, elle te dérange profondément. « Regarde un peu ce que tu fiches, y a aucun équilibre. » Tu râles par principe sur son empilement de boîtes avant de la bousculer de l'épaule pour aller poser ton chargement un peu plus loin. C'est aussi bien pour l'emmerder que pour te rapprocher du moment où tu pourras te débarrasser de ces caisses qui t'encombrent. Tu bosses depuis un moment déjà et tes avant-bras souffrent d'élancement sous l'effort dans ce froid glacial. « Et grouille-toi un peu de leur donner leurs merdes, qu'on puisse se barrer. » Tu te fiches bien d'être entendu par la fil de Dragons. Ils n'ont pas intérêt à moufter de toute façon. C'est là le seul véritable point positif hors l'absence de Jackson : ici c'est toi qui a le pouvoir.

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murphy ∞ magnus

Année 41, saison intermédiaire (jour 74) ✻✻✻ La foule était comme un rassemblement de cafards grouillant dans un brouhaha infâme. Derrière son comptoir improvisé, Murphy avait l'étrange sensation d'être en contrôle. Les distributions, elle ne s'en était jamais plainte. Au contraire. Pour une ancienne Libre, le spectacle était fascinant. Tous ces gens avides oubliant facilement les règles de savoir-vivre par peur de ne pas avoir accès à une précieuse boîte. Ils seraient si perdus si la main du Chef cessait de les nourrir. En proie à la mort et aux personnes plus fortes. Les rôles étaient inversés. Ils faisaient moins les fiers. Entourée de ces sensations addictives, elle retrouvait ses envies de grandeur. Murphy, elle ne voulait pas être la plus grande, elle n'avait pas cette prétention. Un jour, elle aurait pourtant voulu être plus haut que cet endroit où elle se tenait. Elle se défonçait pour ça, c'était tout ce qu'elle était capable de faire. Foncer droit devant en pulvérisant les murs plutôt que de les contourner. Souvent, ça voulait dire se prendre le dit mur en pleine tronche et ne pas pouvoir se relever tout de suite. Ça signifiait aussi s'y heurter encore et encore jusqu'à ce qu'il se craquelle. Dans le pire des cas, on mourrait simplement à force. On avait beau la trouver conne, cette attitude avait le don de lui solidifier la tête. Elle était acharnée, la Murphy, et elle n'avait pas peur de le montrer. Elle n'avait pas d'autre choix non plus. Faute d'avoir été dotée dès la naissance d'atouts majeurs, elle avait cultivé sur cette terre pas très fertile qu'elle avait sous les pieds. Son entrée chez les Dragons avait été son premier légume récolté. La survie à l'attaque, son deuxième. Et dieu que Murphy avait faim depuis. Elle était affamée de victoire.

« Regarde un peu ce que tu fiches, y a aucun équilibre. » Son corps s'adapta à la bousculade presque naturellement. Elle fixa son attention sur les boîtes plutôt que sur le gamin qui bougeait en râlant, sans comprendre ce qu'il lui reprochait. A la vitesse à laquelle ça partait, on s'en foutait un peu de l'équilibre. Pour preuve, déjà trois furent passées aux Soumis en première ligne. Elle laissa l'intello à ses côtés se charger de la liste, glissant une nouvelle caisse à un type. Murphy, elle n'avait jamais eu l'occasion d'apprendre à lire. « Et grouille-toi un peu de leur donner leurs merdes, qu'on puisse se barrer. » Elle n'aurait même pas pu l'accuser de tirer au flan. Il était travailleur le petit Magnus. Bien plus qu'il ne s'en donnait l'air. Si seulement il avait pu être moins bavard. Toujours à causer, toujours à râler. Le pire, c'était bien qu'il n'acceptait pas qu'elle en fasse de même. Elle aurait pourtant eu des trucs à raconter, Murphy.

En parlant de râleur, ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas entendu Jackson lui sortir une vacherie. Toute froncée au niveau du visage, elle observa son entourage sans trouver la blonde. Ben ça c'était pas courant. « Où elle est ta pote ? » Qu'elle demanda à Magnus lorsqu'il repassa. Il lui avait bien semblé que tout était trop calme du côté des ravitailleurs et que ça traînait un peu plus. Fallait pas croire qu'elle l'aimait beaucoup, Jackson, mais elle était habituée à la voir souvent. Si Magnus disparaissait du jour au lendemain, ça lui aurait fait bizarre aussi. Avant de la soulager. Murphy n'allait pas mentir, les mioches des beaux quartiers étaient sacrément chiants.


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Année 41 - saison intermédiaire (matin 74)

Tu lèves les yeux au ciel, chassant la main qui vient de saisir ta veste avec agacement. Les Soumis ne sont pas tous foutus de faire la file et d'attendre leur tour. Ce n'est pourtant pas difficile de respecter les règles. Trop enfoncé dans ta mauvaise foi, tu ne te rends même pas compte que tu es le dernier à avoir le droit de juger. Avec les règles tu as souvent du mal. Sauf que toi, c'est toi. Eux doivent se tenir à carreau s'ils veulent leurs rations. Tout irait plus vite si tout le monde restait à sa place. Ils auraient ce dont ils ont besoin et toi tu pourrais te tirer. Mais il y en a toujours pour tenter le coup. « Hé sentinelle, remet le au bout de la ligne. » Tu grognes au Membre qui monte la garde à quelques pas de toi. Ça lui apprendra à ce crétin qui s'est cru malin en passant par le côté. Tu retournes chercher des caisses dans le chargement de la remorque lorsque Murphy se fait remarquer à nouveau. Volontairement cette fois. « Où elle est ta pote ? » Il te faut un instant pour comprendre. Chez les ravitailleurs tu n'as aucun pote. Manque de bol pour toi, les tiens ont des postes bien différents. C'est à force de regarder autour de toi que tu saisis l'absence. Tu le savais déjà qu'elle n'était pas là mais ça te frappe à nouveau et tu fais le rapprochement. « Où t'as vu qu'on était potes ? Cette guenon traîne juste avec mon frère. » Il y a du dédain et un peu de dégoût dans ta voix. Comme si vous auriez pu vous entendre tous les deux. Dire qu'elle traîne avec Cam est un euphémisme. C'est sa meilleure amie pour toujours, presque une soeur. Quelle drôle d'idée. Tu restes un instant silencieux, déplaçant une nouvelle pile avant de cracher. « J'en sais rien moi. T'as cru que j'avais une tronche de secrétaire personnel ? » Même si toi aussi tu aimerais savoir où elle traîne encore. C'est plus calme sans elle et tu croises les doigts pour qu'elle ait des embrouilles mais ce n'est pas non plus son genre de sécher. Limite ça t'inquiète. Elle, tu t'en fous. Tu t'en fais pour ta petite personne et pour un changement qui pourrait s'opérer malgré toi dans ton existence.

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Année 41, saison intermédiaire (jour 74) ✻✻✻ Les distributions n'étaient qu'un immense boxon et c'était là ce qui déplaisait le plus à Murphy. Venant d'elle, c'était du propre, mais il était connu que l'on avait tous cette tendance à oublier de balayer devant sa propre porte. Et même s'il râlait de tout son saoul, Magnus était le parfait exemple de l'homme dans son élément. Petit garçon, se rattrapa-t-elle avec un sourire moqueur. Ce privilégié n'avait rien d'un homme malgré sa tendance incessante à rouler des mécaniques. Si la distribution était une jungle, elle était bien entretenue et au goût des types comme lui. Un aboiement et l'ordre revenait grâce aux sentinelles. Le roquet se prenait maintenant pour un chef de meute.

Elle s'était peu intéressée à tout ça, Murphy. Elle ne perdrait pas son temps à ça pendant que le roi présidait. Il y avait déjà tant de choses à faire. Jamais trop pour les questions d'intérêt public. « Où t'as vu qu'on était potes ? Cette guenon traîne juste avec mon frère. » Ce n'était pas un grognement qui allait la faire reculer. Murphy, elle avait besoin de beaucoup plus que ça pour prendre ses distances. Les défenses puériles du gamin ne changeraient pas non plus son avis déjà bien arrêté. A ses yeux, on ne prenait pas la peine de se chamailler avec quelqu'un que l'on appréciait pas au moins un peu. Que Magnus n'ait pas la maturité de l'admettre, ça ne l'étonnait pas non plus. Qui aurait eu la stupidité de s'attendre à autant de sa part ? La conversation se voulant impossible, Murphy leva les mains en signe de paix, le soupir au bord des lippes. Sa curiosité n'aurait pas de réponse.

« J'en sais rien moi. T'as cru que j'avais une tronche de secrétaire personnel ? » Elle avait l'insulte facile sur la langue, la Murphy. Son but n'était même pas de nuire, cela tenait du réflexe basé sur ce qu'elle voyait comme une vérité. Franchement, il n'était pas assez malin pour ça, Magnus. Mais ça, la Murphy le gardait pour elle. Un bleu récolté sans utilité ne la tentait pas plus que ça. « C'est con. » Ouais, c'était foutrement con qu'il ne soit pas fichu d'utiliser ses privilèges correctement. Elle avait toujours su, Murphy, que ça servait à que dalle de compter sur le mouflet.


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Année 41 - saison intermédiaire (matin 74)

« C'est con. » C'est tout ce qu'elle trouve à dire celle-là ? C'est con ? Tu trouves que c'est elle qui est bien conne aujourd'hui. Comme tous les jours. Si elle n'a rien d'intelligent à dire, elle peut aussi se taire. Et ne pas poser de questions qui n'ont aucun sens. Depuis quand s'inquiétait-on pour Jackson ? Personne ne s'inquiétait pour Jackson. Toi-même tu voulais juste savoir où elle avait été se perdre ou quelle bonne excuse elle avait trouvé pour ne pas aller bosser. Tu ne comprends même pas la réponse de cette Murphy dans le contexte de votre conversation. « Puis pourquoi ça t'intéresse ? Elle te manque ou quoi ? » L'agression est un brin facile mais ça te connait la facilité.

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Année 41, saison intermédiaire (jour 74) ✻✻✻ « Puis pourquoi ça t'intéresse ? Elle te manque ou quoi ? » Ben ça. Pourquoi qu'il agissait comme si on lui avait posé une question gênante tout d'un coup ? Ça se voyait bien qu'il n'aimait pas le sujet, Magnus. Elle trouvait quand même qu'il y allait un peu fort. Fallait pas qu'il aille faire des nœuds dans son slip. Manquerait plus que ça, ça ne le rendrait que plus désagréable, foi de Murphy. Et c'était qu'elle s'y connaissait en sous-vêtements problématiques. « J'faisais un peu la conversation. » Qu'elle dit en haussant des épaules comme si c'était évident. Murphy, elle causait pas souvent avec les privilégiés. Eux, ils gueulaient, mais souvent elle ne pouvait pas en placer une. Magnus étant tout seul, elle avait essayé de remplir le vide tout en satisfaisant sa curiosité. Un bel échec. « J'trouve ça juste bizarre. Elle manque pas souvent l'occasion de tirer la gueule. » Elle se faisait pas souvent solaire en sa présence, la Jackson. Murphy, elle en était même venue à se demander si sa seule vue lui donnait pas la grogne.


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Année 41 - saison intermédiaire (matin 74)

« J'faisais un peu la conversation. » T'es sensé en avoir un truc à foutre ? Faire la conversation. Elle est belle celle-là. Personne ne lui avait rien demandé. La distribution est déjà assez chiante sans qu'elle ne jette ses idioties sur le tapis. Tu n'as pas le temps de lui faire un commentaire sur le sujet. Le Membre en face de toi te prends déjà le colis des bras et tu dois te concentrer deux secondes sur la liste pour t'assurer que c'est bien noté. Sans Jackson y a trop à faire. Ils auraient quand même pu vous mettre quelqu'un en remplacement. « J'trouve ça juste bizarre. Elle manque pas souvent l'occasion de tirer la gueule. » Et elle repart. Même si tu ne lui réponds pas, t'es sûr qu'elle se parlerait à elle-même. Dans le fond c'est pareil. C'est toujours aussi chiant de l'entendre. Alors il vaut mieux que tu répondes. Que tu relâches la mauvaise humeur. « Personne t'a demandé de réfléchir. Ça te regarde pas. Lâche l'affaire, putain. » T'aimes pas non plus trop qu'elle fasse des commentaires comme ça. Elle n'est qu'une non-native. Son point de vue sur une Golden, elle pouvait se le garder.