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Année 41 - saison polaire (début)

De tes performances, tu gardes un souvenir satisfait. Assisse sur une banquette dans l'aile de soin aménagée en vitesse au quartier général, tu attends qu'on termine avec tes blessures. Rien de bien méchant. La bataille a été sanglante mais les Aigles ne faisaient vraiment pas le poids. Les protections ont aussi fait leur job. Le cuir est un peu entamé par endroit mais l'important est que ça n'ait pas atteint la peau. Pour cette première vrai guérilla, tu étais bien mieux préparée que pour la traque et cela se sent dans ton état. Pourtant, au vu des blessures passées, tu aurais pu t'en sortir bien plus mal. Mais les Dragons ne sont pas dénués de talent quant il s'agit d'envoyer des troupes au combat. Chacune de tes vieilles blessures avaient reçues un soin particulier si bien que tu avais pu te battre sans avoir à trop te retenir. Le plus compliqué avait été de ne pas trop utiliser ta jambe droite, encore profondément marquée par cette plaie mal cicatrisée. L'adrénaline avait aidée aussi. Celle-ci était à double-tranchant car tu en avais peut-être fait un tout petit peu trop. Ta cuisse te lance maintenant et tu as hâte de pouvoir avaler un calmant et t'allonger tranquillement chez toi pour le repos bien mérité du guerrier. Si tu arrivais vraiment à dormir. Ton corps a beau avoir grillé beaucoup d'énergie, ton esprit reste en ébullition. L'excitation de la victoire ne s'éteint pas si facilement. Surtout lorsqu'elle est si grandiose. Personne ne pourra nier que vous avez été excellents. Le nombre de pertes est faible et le plan s'est déroulé avec aisance. En vérité, il n'y a qu'un seul point noir au tableau. Avant que l'ordre ne te soit donné, tu n'avais pas conscience de la présence des Vipères sur le territoire de l'Est. Jusqu'à ce qu'on te dise d'aller les tuer. Rien dans cette histoire n'était claire mais leur intervention pouvait expliquer certaines facilités lors du déroulement de l'attaque. Comme le brave petit soldat que tu étais, tu avais obéis. Quelques autres Spécialistes sur les talons, tu avais rallié le point de rendez-vous et l'élimination avait commencée. Encore une tâche pas si difficile. Clairement, elles ne s'attendaient à voir en vous des ennemis. Il y avait eu des ripostes - l'une d'elle t'avait laissé une jolie entaille à la joue - et peut-être une ou deux fuites mais le travail avait été fait. Et c'était seulement après que tu avais pensé. Une fois que le calme était revenu dans votre petite zone de champ de bataille que tu t'étais posée la question. Et si Yulia avait été l'une d'elles ? Mécaniquement - et non sans une pointe d'angoisse -, tu avais fait le tour des corps en te persuadant qu'elle ne serait pas tombée aussi facilement. Tu avais raison. Tu l'espérais, du moins. Mais cet événement t'avait fait te poser des questions pour lesquelles tu n'avais pas de réponse. Tu ne voulais même pas y réfléchir, trop effrayée par ce que tu pourrais découvrir.

Trop prise dans tes pensées, tu saisis précipitamment la main qui s'approche de ta coupure. Pendant une seconde, tu as perdu le fil de la réalité. La soigneuse qui te fait face semble confuse, un peu peureuse aussi, mais tu la relâches sans un mot. Sans une excuse. Après une hésitation elle reprit et tu balayes des yeux les autres blessés. A ta gauche, il y a une fille et tu es surprise de reconnaître son visage. Elle t'a marquée durant une seconde pendant le combat. Pas forcément en bien. « Tu te bat comme une enfant. » Ni forcément en mal mais tu n'as pas pu t'empêcher de lâcher un commentaire nonchalant. Si elle n'a pas arrangé ce point c'est que personne ne le lui a jamais dit. « La hargne c'est bien un moment mais face à de vrais adversaires, ça va juste te faire tuer. » Tu te fiches qu'elle meurt ou qu'elle vive mais une perte est une perte. A tes yeux, les Dragons gagneraient à faire en sorte d'éviter les morts inutiles. Ça ne rendrait le clan que plus puissant. Alors si tu peux éviter que cette fille se fasse bêtement plantée la prochaine fois, pourquoi pas ? En plus tu es bloquée ici, niveau occupation, c'est ta meilleure option.

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Année 41, saison polaire ✻✻✻ Fallait se rendre à l'évidence. Si les autres ne prenaient pas Murphy pour une psychopathe, c'était parce qu'ils l'étaient tous, quelque part. Assisse à même le sol, le dos collé au mur, elle souriait comme une démente. Le look n'aidait pas non plus. Du sang collé dans les cheveux, vêtements déchirés et tout aussi souillés, blessures multiples. Elle avait la tête d'une meurtrière dont la cible s'était bien défendue. Mais vraiment, le plus gênant, ça restait le rictus. D'une oreille à l'autre, avec une lèvre un peu gonflée et l'autre marquée d'une entaille. Il ne fallait pas lui en vouloir, à Murphy. Pour la première fois, elle avait pu faire ses preuves. Et ça, pour une raclure des bas-fonds comme elle, ce n'était pas anodin. Elle se fichait bien si, de base, on ne croyait pas vraiment à sa survie. Les insectes comme elle n'avaient fait qu'ouvrir la voie pour les meilleurs combattants. Mais elle en était foutrement fière d'avoir eu le droit de participer. En plus, elle était vivante. Si ça, c'était pas une preuve qu'elle avait une once de talent en elle. Si vous lui demandiez, elle vous sortirait qu'elle le savait déjà, mais, avec un peu de chance, sa survie attirerait l’œil de quelqu'un. Depuis qu'elle était devenue une Dragonne, elle ne rêvait que de ça. Qu'importe son état, elle n'était qu'une boule rayonnante de bonheur. Un truc qui tachait un peu au milieu des blessés. Pas que ça la préoccupe beaucoup. Murphy ne dérangeait personne avec sa tronche de psycho puisqu'elle était discrète et silencieuse. Pas un truc pour lequel elle était douée d'habitude. Les miracles existaient.

« Tu te bat comme une enfant. » Les mots mirent une seconde à s'imprimer. Dans son esprit encore ivre du combat, elle avait perdu le contact avec son environnement. Au départ, elle pensa qu'on lui disait de déguerpir. Puis, les neurones se connectèrent et elle déchiffra dans sa mémoire ce qui avait vraiment été dit. Machinalement, Murphy se tourna pour checker qui lui parlait et- « Oh ben merde. » Elle avait légèrement bugué pour le coup, totalement inconsciente d'avoir murmuré un truc. Pour sa défense, ce n'était pas tous les jours qu'elle avait l'occasion d'être considérée par quelqu'un de haut placé. Son quotidien, c'était plutôt la transparence. Alors qu'une Spécialiste prenne la peine de lui adresser la parole, c'était... Elle n'avait même pas les mots. Pas n'importe quelle Spécialiste en plus. Violette. Juste son nom ça suffisait tellement la meuf était famous dans le clan.

« La hargne c'est bien un moment mais face à de vrais adversaires, ça va juste te faire tuer. » Mince, Violette avait refait ce truc pendant lequel ses lèvres bougeaient. Et Murphy, encore trop abasourdie, avait rebooté tout le système. Tu parles d'une conversation. Elle se mit une petite claque sur la joue, comme pour s'assurer qu'elle n'était pas en train de rêver - en espérant aussi qu'elle parviendrait à se comporter comme un être humain plus ou moins fonctionnel aussi. La douleur qu'elle ressentit était bien réelle. Pas de doute là-dessus. Toutes les blessures sur son visage s'étaient réveillées d'un coup. Donc, Violette lui parlait bien. Et Violette, du haut de sa tour dorée, l'avait insulté ? Murphy n'était pas bien certaine. Il fallait qu'elle fasse une dernière vérification. On ne savait jamais, la superstar parlait peut-être à quelqu'un d'autre. Genre derrière elle. Au mur donc. « Moi ? » Elle s'était même pointé du doigt. La totale de la stupidité. Si la Spécialiste ne la prenait pas pour la demeurée du coin maintenant, c'était un miracle.

Avec tout ça, Murphy n'avait même pas pensé à se demander comment la Spécialiste savait. Oh, plus tard, elle ne se leurrerait pas, l'insulte aurait pu être totalement gratuite.


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Année 41 - saison polaire (début)

Tu regrettes presque aussitôt. Parler aux inconnus ne te ressemble pas. Tu n'es pas douée pour les conversations creuses et polies. Au début, c'est que tu ne voyais pas vraiment ça comme une conversation. Tu lui avais dit ce que tu avais à dire. Fin de l'histoire. Mais dans la réalité, ça ne se passe pas comme ça. Les gens réagissent, parlent en retour. Le monde ne s'arrête pas de tourner au moment où tu le décides. Quel dommage. En plus cette fille ne fait pas que se battre comme une enfant. Elle y ressemble. Depuis ton siège, tu la détailles et tu ne peux pas t'empêcher de te demander comment elle a fini dans cet état. On dirait qu'elle s'est roulé dans le sang comme un gosse se serait roulé dans la poussière. Sauf que le sang, c'est plus salissant, plus marquant. Elle a dû filer les chocottes aux soigneurs en arrivant ici. Mais elle ne semble pas si dérangée que ça par son état. Quoi que ça, c'est peut-être psychologique. Ou un problème d'intellect. Tu n'as pas la sensation d'être tombée sur la fille la plus maline du territoire. Est-ce que tu ne t'es pas exprimé de façon claire et distincte pour qu'elle réagisse de la sorte ? A la voir, on pourrait croire que tu es une alien. Tu as presque envie de claquer des doigts devant son visage pour vérifier qu'elle est toujours consciente. « Moi ? » Miracle ! Elle parle mais cela n'avance rien. Tu n'es toujours pas défaite de ton impression de faire face à une attardée. Étonnant qu'on lui ait donné une arme. « Oui. » Tu lui réponds, les yeux plissés, pas sûre de ce qu'il se passe ici. « J'ai dit que tu te battais comme une enfant. Tes défenses sont toujours ouvertes. Tu ne penses qu'à attaquer alors tu deviens prévisible. Pour peu que tu tombes sur quelqu'un avec un minimum de sens stratégique, il te dictera tes attaques sans que tu ne le comprennes pour venir te cueillir au moment le plus confortable pour lui. En tout cas c'est ce que je ferais. Je te manierais comme un pantin avant de t'achever. » C'est peut-être idiot de lui expliquer et d'utiliser des mots compliqués. Si elle n'a déjà pas compris la première fois, tu doutes qu'elle capte maintenant.

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Année 41, saison polaire ✻✻✻ La conversation avait des détours irréels. Si conversation, il y avait bien. Murphy peinait toujours à raccrocher son esprit à cette situation pour le moins inédite. Elle, le moucheron, avait été considérée comme un interlocuteur valable. Elle n'avait pas besoin de ça pour savoir qu'elle valait quelque chose, mais il était rare qu'on prenne la peine de s'adresser à elle. Sauf pour lui aboyer un ordre. Ah ça, elle y avait droit. « Oui. » Violette semblait aussi bien confuse, tout d'un coup. Pourtant, c'était elle qui avait commencé à parler. Un doute s'insinua. Murphy l'avait-elle interpellée sans s'en rendre compte ? Non, c'était encore moins logique. Elle avait eu sa réponse, mais avec tout ça, elle n'avait toujours pas eu l'occasion d'imprimer l'idée. Oh. Violette parlait encore. Courageuse, Murphy tenta de rassembler toute sa concentration. Elle n'était pas sûre qu'elle survivrait à une nouvelle question stupide. « J'ai dit que tu te battais comme une enfant. Tes défenses sont toujours ouvertes. Tu ne penses qu'à attaquer alors tu deviens prévisible. Pour peu que tu tombes sur quelqu'un avec un minimum de sens stratégique, il te dictera tes attaques sans que tu ne le comprennes pour venir te cueillir au moment le plus confortable pour lui. En tout cas c'est ce que je ferais. Je te manierais comme un pantin avant de t'achever. » Donc, elle avait bien entendu. Murphy fronça les sourcils, toujours pas certaine de la façon dont elle avait à réagir. C'était un peu vexant, non ? En quelques mots, la grande dragonne venait de lui prouver par a + b qu'elle était nulle. D'un point de vue basique, c'était ça. Il y avait un peu de fioritures autours, mais elles ne changeaient pas grand chose. Toute autre personne se serait sûrement insurgée plus ou moins discrètement. En face, il y avait Violette quand même. Chez les chairs à pâté, il était de coutume de dire qu'on lui disait merci dès qu'elle vous insultait. Chose qui n'arrivait pas si souvent, Murphy avait eu l'occasion de s'en rendre compte.

Reposant la tête contre le mur, Murphy se mâchonna la lèvre avant de grimacer. Elle avait oublié une blessure. Que dire ? Avant cette étape, elle aurait déjà dû savoir quoi penser. Et ça, c'était pas gagné. Elle n'était pas vexée. Non, l'état était trop difficile à lui faire atteindre, mais il y avait une légère piqûre au niveau de son orgueil. L'enfant avait quand même procédé à des éliminations. Même qu'elle avait peut-être été plus utile au clan que certains gradés. Ça, bien sûr, on ne le voyait pas. La sensation passa vite. La soif d'apprendre était plus grande. « Apprends-moi. » Les mots étaient parti. Comme ça, en solo, pour une mission suicide. Même dans son état un peu second, Murphy sentit la connerie quitter sa bouche. Elle porta vivement les mains sur ses lèvres pour les sceller. Il était pourtant trop tard. Soudain mal à l'aise, Murphy se gratta la tête, ses ongles ressortant garnis de pellicules de sang séché. « J'aime bien l'idée de rester en vie, tu vois. T'as l'air doué pour ça. Je me disais-. » Elle se disait quoi, la Murphy ? Que la superstar allait prendre de son précieux temps pour lui donner quelques conseils ? Le délire était sans fin. Sûrement qu'elle aurait pu rejoindre le paradis en suivant le chemin tracé par cet espoir stupide. « Puis comme tu vois où est le problème. » Elle s'enfonçait. Encore et encore et encore. Après l’élévation, elle creusait. Et bordel ce qu'elle était talentueuse avec une pelle entre les mains, la Murphy.


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Année 41 - saison polaire (début)

Tu t'attends à tout. De la colère, de l'outrage, rien de tout ça. Cette fille n'est pas nette et tu songes qu'elle peut d'autant plus agir de façon surprenante. Son silence te surprends. C'est trop calme pour ce phénomène un peu con qu'elle paraît être. Tu attends que quelque chose sorte, un peu paumée. Avec un regret bien présent pour cette attention que tu lui as offerte sans y faire gaffe. « Apprends-moi. » Vos réactions sont différentes mais tout aussi fortes. Un regret instantané se lit chez elle alors que ta bouche s'ouvre sous la surprise. Poisson hors de l'eau que tu es. Tout ça te change trop de l'habitude. Des culottés, tu en as connu pourtant. L'intention derrière est ici différente. Serait-ce une erreur de dire qu'il y a chez elle une certaine pureté ? « J'aime bien l'idée de rester en vie, tu vois. T'as l'air doué pour ça. Je me disais-. » Aucun son ne s'échappe de ta bouche sous les explications. Tu comprends bien mais tu ne sais toujours pas quoi lui dire. Habituellement tu rabats vite les sangsues. Tout rend sa demande plus difficile à refuser et ça te perturbe sincèrement. « Puis comme tu vois où est le problème. » De là à dire que tu pourrais l'aider. Le problème semble tenir de sa personnalité, un truc contre lequel tu ne peux pas lutter. Mais as-tu déjà reculé devant un défi ? Non. Ce serait un défi un peu inutile en soi mais si ce n'est qu’occasionnel. Tu commences à voir la possibilité. « Si j'ai un peu de temps. Une fois que tout ça sera guéri. » Tu désignes vaguement ton corps. Tu sais comme le repos sera important à partir de maintenant. Tu ne t'attends pas forcément à ce qu'elle comprenne en tant que chair à pâté. On ne cherche pas à les économiser. « Peut-être. » Quelle idée. Mais dans quoi t'enfonce-tu encore ?

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Année 41, saison polaire ✻✻✻ Elle avait détraqué la reine. Merde. Murphy, c'était bien son genre de faire ça. Il suffisait de voir le faciès de Violette pour comprendre que rien dans cette situation n'allait. Dans cette configuration, elle se serait bien attendue à trouver une lame sous sa gorge, mais rien de tout ça. Elle était vivante et aucune menace ne pesait au-dessus de sa tête. Sauf celle d'une mort certaine si elle avait bel et bien fait buguer sa gradée. Au fond, Murphy ne comprenait pas trop le problème. Des demandes du style, la Fine Lame devait en recevoir six par jour. On aurait probablement tué pour s'entraîner avec elle. Violette était telle la reine de la promo dont le casier était toujours plein de lettres d'amour le jour de la Saint Valentin. On s'habituait à un tel traitement à force. Sur le coup, Violette, elle n'avait pas l'air très adaptée. Tout le contraire que c'était. Elle avait la tête de quelqu'un pris de court. Murphy, elle apprenait progressivement les règles mais les détails lui échappaient parfois. Elle savait pourtant qu'elle était pas censé lui causer à Violette, mais la connexion ne s'était pas faite dans son cerveau. Elle ne se faisait jamais complètement. Si on n'adressait pas inutilement la parole à Violette, assez logiquement, on lui envoyait pas des faveurs à la face quand on valait pas mieux que la boue sur ses bottes. Du bout des doigts, Murphy se retrouva à caresser l'idée d'être la première à avoir eu autant de culot. Ce serait un sacré élément sur son CV, pour peu qu'elle survivait.

« Si j'ai un peu de temps. Une fois que tout ça sera guéri. » Murphy, elle n'allait pas s'en remettre. Elle avait bien entendu pas vrai ? Ce n'était pas ses oreilles cradingues qui lui jouaient des tours ? « Peut-être. » Peut-être, c'était mieux que non. Elle connaissait bien les peut-être, Murphy. Souvent, elle les avait transformé en occasions parce qu'elle était comme ça, Murphy, foutrement obstinée. Le genre de meuf qui ne devait pas se heurter à un mur car elle s'acharnait jusqu'à le défoncer plutôt que d'escalader ou de contourner. Fallait pas lui en vouloir, elle n'avait jamais été assez futée pour y penser. « J's'rais là. Où tu veux. J'ferais ce que tu veux. » L'imaginer sur le pas de la porte de Violette n'aurait pas été de trop. Elle l'aurait pu, jouer les cabots n'étaient pas problématiques si c'était le désir de la gradée. « Merci, merci, merci. » Des merci, y en eu une pelleté de plus avant qu'elle ne se la boucle. Murphy avait beau être sur son petit nuage, elle n'allait pas filer des envies de reculer à sa nouvelle mentor.


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Année 41 - saison polaire (début)

« J's'rais là. Où tu veux. J'ferais ce que tu veux. » Il y a une curieuse sensation en toi. Cette fille est innocente. Elle n'a plus l'âge de l'être pourtant. Mais elle a su conserver sa candeur. Elle s'est éclairée face à la réponse pitoyable que tu lui as offerte. Tu pourrais être en train de lui mentir, dire ce qu'il faut pour qu'elle te lâche mais elle ne semble pas envisager la possibilité. Tu détestes ça. Elle te rappelle quelqu'un. Toi. Des années auparavant. Lorsque tu n'étais encore qu'une gosse pataugeant dans le monde des adultes et tentant de se frayer un chemin vers son rêve. C'est con mais tu lui souhaites de ne pas tomber sur les mauvaises personnes. Elle semble prête à tout. Comme tu l'étais. La solution serait simple. Si tu la prends en charge il y aurait moins de risques qu'elle fasse les mauvaises rencontres. Mais tu n'es pas certaine d'en avoir l'énergie pour le moment. Veux-tu vraiment prendre une telle responsabilité sur tes épaules alors que tu luttes déjà avec tes propres problèmes ? « Merci, merci, merci. » « Tu ne devrais pas dire ça à la légère. » Tu lâches car tu ne peux pas t'en empêcher. « Ne laisse pas les autres comprendre jusqu'où tu serais prête à te faire écraser. Qu'importe que ce soit vrai. Tout le monde ne trouvera pas ça touchant. » Même si tu as fait des choses horribles il existe dans ce clan des monstres qui te font encore frémir aujourd'hui. A ton avis personne ne mérite d'avoir à leur faire face. Tu ne le souhaiterais même pas à ton pire ennemi. Klaus apparaît à ce moment là dans l'encadrement la porte et te désignes de l'index. C'est ton tour. Une chance que tu sois tombée sur lui. Tu le rejoins sans un mot, la laissant méditer sur le conseil que tu lui avais offert.

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Année 41, saison polaire ✻✻✻ « Tu ne devrais pas dire ça à la légère. » Quoi ? Merci ? Murphy, elle était presque persuadée que ce mot était magique. Soit il vous donnait le bon air, soit il faisait plaisir aux autres. Pour sûr, les gars qui lui cognaient dessus parfois, ils aimaient bien l'entendre les remercier de la laisser en vie. Ils se sentaient puissants. Peut-être que c'était ça que la reine voulait dire. Elle prit soin de noter ça dans un coin de sa tête, Murphy. Rendre les autres puissants, une chose à ne pas faire trop souvent. « Ne laisse pas les autres comprendre jusqu'où tu serais prête à te faire écraser. Qu'importe que ce soit vrai. Tout le monde ne trouvera pas ça touchant. » Le même délire. Comme quoi, ça lui arrivait de capter des trucs à la Murphy. Sans indice en plus. Elle se gratta la tête, entraînant une pluie de petits pétales de sang séché. Ce qu'elle retenait là-dedans, c'était comme toujours le truc qu'il ne fallait pas. Mais, bon sang, on allait pas lui reprocher de ne pas se sentir toute guillerette après tout ça. L'une des nanas les plus impressionnantes du clan avait dit qu'elle était touchante. Certes, ça ne valait pas ce que Murphy aurait dit à son sujet, des synonymes de féroce et grandiose, mais on prenait ce qu'on pouvait. Elle ne lui faisait même pas pitié, Violette la trouvait touchante. Le sourire de débile était de retour sur son visage, accentuant à merveille toutes ces traînées de sang.

Une bonne chose que Violette s'était déjà volatilisée comme la déesse qu'elle était. Sans doute avait-elle dépassé son quota de temps à passer avec une manante.


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