I bite it so it's mine (sawëlle)

DRAGONS DU NORD

I bite it so it's mine
Année 41 – si (après-midi 81)

Tu n'es même pas étonnée. La vie à cette drôle de façon de vous réunir régulièrement. Tu es à la limite d'être surprise qu'il ait fallu tant de temps. La faute à cette saison maudite sûrement. La dernière fois que tu l'as croisée est encore claire dans ton esprit. Tout avait juste été trop étrange pour que tu puisses oublier. Une journée collectivement bizarre même si tu n'es pas certaine de pouvoir tout imputer à ce délire que la ville a traversé. Cette tension avait toujours été présente entre vous, inutile de le nier. Tout était destiné à arriver un jour. Quoi c'est la question. Ce qui est nouveau par contre c'est cette façon qu'elle a de te fuir. Ce n'est peut-être pas ça mais c'est la sensation que ça donne. Dès que vos regards se croisent tu ne peux même pas compter jusqu'à trois avant qu'elle ne se détourne. Une attitude qui décidément ne lui va pas. Et ça te contrarie plus que ça ne le devrait. Vous en avez pour un bout de temps à voyager ensemble, inutile de se coltiner une drôle de sensation et de jouer sans cesse au chat et à la souris. Tu ne sais pas si ça a un rapport avec la dernière fois mais tu ne comptes pas laisser la situation s'enliser. Alors tu choisis la première occasion venue. Un peu plus tôt elle est partie dans les bois et tu la suis dès que tu en as terminé avec ce que tu avais dans les mains. Sans le couvert des feuilles, la zone ne permet que peu de cachettes. Tu la trouves sans mal, accroupie dans un coin, un bruit de cliquetis métalliques autour d'elle. « Tu comptes faire ta timide encore longtemps ? » Tu t'es appuyée contre un tronc, le regard un instant sur elle, l'autre sur la nature qui t'entoure par pure mesure de prudence. Ce n'est pas le moment de se faire avoir par les habitants de la zone. Tu n'es d'ailleurs pas ravie qu'elle s'isole de la sorte dans une zone que vous découvrez à peine. L'idiote devrait pourtant avoir des bases solides en dehors de la ville. « Et qu'est-ce que tu fous ici toute seule ? C'est dangereux. » Ouais tu t'inquiètes. Pas difficile de le voir.

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sawëlle
A41 SI J81 (après-midi)

I bite it so it's mine

Il aurait été facile de penser que cette participation au voyage ne me ressemblait pas. Il était déjà rare que je m'éloigne du territoire, alors de la ville elle-même. Pourtant, j'avais toutes les raisons de faire partie du convoi. Durant mes quatorze années dans la nature, j'avais passé beaucoup de temps ici, autant dire que je savais y faire lorsqu'il s'agissait de survie. En plus, même si l'idée de délaisser l'Atelier me déplaisait, je savais que le risque qu'une arme soit amochée était bien plus grand au milieu de nulle part. Il n'était pas question que je laisse l'une de ces idiotes les tripoter ou, pire, en perdre une parce qu'elle aurait eu la mauvaise idée d'aller crever dans un fossé. Dire que j'avais lourdement insisté auprès de Théa pour qu'elle m'ajoute à la liste était un euphémisme. Cela n'avait pas été simple de la convaincre, j'avais même eu à mentir en lui assurant que Reyn avait toute ma confiance pour tenir le fort en mon absence. Les mots avaient été comme des petits cubes couverts de dards qu'il avait fallut cracher et qui m'avaient déchiquetés la bouche. Mais un sacrifice de temps en temps était nécessaire. Même si je préférais largement lorsque que c'était aux autres de les faire. Laisser Laz n'avait pas non plus été chose facile. Il s'agissait de notre première vraie séparation et il avait fait la mauviette à ce sujet. Okay, peut-être que ça me faisait un truc, à moi aussi. Être dans un lieu si nostalgique sans lui n'était tout simplement pas pareil. Mais des têtes connues pour compenser, il y en avait beaucoup parmi les voyageurs. Dont une que je n'avais vraiment pas été préparée à revoir. Depuis cette nuit bizarre au côté de Sasha, après l'attaque, j'avais fait de mon mieux pour occulter toute pensée à son sujet. Idem pour Oz. S'en faire lorsque aucune solution n'existait aurait été contre-productif. Maintenant qu'elle était là, bien vivante, je ne savais plus trop comment m'y prendre. A l'intérieur, tout était beaucoup trop confus et j'éprouvais un peu de honte à ce sujet. Parce que, vraiment, ça ne me ressemblait pas tout ça. Durant toute la journée, je m'étais appliquée à l'ignorer. Parler pour ne rien dire ne me ressemblait pas, de toute façon. Je ne l'avais pas vraiment évitée, j'avais juste eu fort à faire. Ce n'était même pas comme si je lui avais lancé plus de regards qu'aux autres.

- Mais qu'est-ce que je fiche, bon sang.

A la première occasion venue, je m'étais détachée du groupe pour m'enfoncer dans le petit bois à côté duquel nous avions planté le camp. C'était là mon premier moment de solitude et je le passais à poser quelques pièges dans l'espoir d'attraper un peu de gibier pour compléter le repas du lendemain. Accroupie devant mon oeuvre, le fusil bien calé dans mon dos, je trifouillais parmi les feuilles en grommelant. Une activité décidément bien familière. Je n'avais jamais été particulièrement méfiante - ce qui devait arriver arriverait dans tous les cas -, alors, lorsqu'un peu de bruit résonna derrière moi, je ne fis que jeter un coup d’œil par-dessus mon épaule. C'était humain. Et connu. Machin. Bien sûr, elle s'était sentie obligée de me suivre. Et comme si ce n'était pas suffisant, elle ne tournait pas autour d'un prétendu pot.

- Je vois pas de quoi tu parles.

Comme si c'était mon genre d'être timide. Cette gonzesse ne comprenait décidément rien à rien. En plus, voilà qu'elle se mettait à me faire la leçon. De quoi elle se mêlait ? Je n'étais pas une pauvre petite chose fragile incapable de se défendre, elle aurait pourtant dû le savoir. Je terminais mon piège sans un mot avant de me redresser pour lui faire face.

- Qu'est-ce que tu fiches là ?

Dans le sens plus large. Je me demandais sincèrement ce qu'une fille comme elle faisait dans cette équipée. Elle n'avait rien de très sociable et, d'après ce couteau que j'avais vu et sa présence constante pour commander des pièces à l'usine mécanique, elle devait bosser dans l'armurerie de son clan. Elle n'avait donc rien d'une Membre que l'on envoyait au loin. Comme moi, vous me direz. Mais nos cas étaient différents.

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DRAGONS DU NORD

I bite it so it's mine
Année 41 – si (après-midi 81)

« Je vois pas de quoi tu parles. » Il faudrait être idiot pour ne pas griller le mensonge. Elle feint l'ignorance et tu la connais trop bien pour que cela passe. C'est trop familier. Elle se planque derrière sa fierté. Ça pourrait te faire sourire. Car c'est toujours pareil avec elle. Mais non. Tu ne peux pas passer à côté de ce drôle de sentiment qui s'agite en toi. C'est familier mais en même temps pas tellement. Il y a ce mur entre vous et il n'a rien de commun avec avant. Les bagarres pour des broutilles te manquent. Le regard de braise, les insultes. Cette relation qui n'en était pas vraiment une qui vous avait caractérisées durant des années. Mais tu n'aurais pas dû t'attendre à mieux. Tu te sens un peu bête ici alors qu'elle s'occupe. Clairement tu n'es pas la bienvenue dans son périmètre. Tu devrais être habituée. Mais encore une fois ce n'est pas comme avant. L'air est différent. Le silence ne lui ressemblait pas. Elle mordait mais n'ignorait pas. C'était pour ça que tout avait commencé. Elle se redresse enfin et tu ne sais plus comment te comporter donc tu restes statique. Toujours appuyée à cet arbre. « Qu'est-ce que tu fiches là ? » Tu ouvres la bouche, toute prête à répondre avant de te reprendre. Bien sûr. Elle ne veut pas savoir pourquoi tu la suivis c'est plutôt évident après ce que tu as dit. Tu te grattes la tête un instant, le regard posé sur les bois derrière elle. « Ils aiment les anciens Libres. C'est pour ça que tu es là aussi je suppose. » Même si tu ne l'aurais pas vue participer à tout ça. Elle n'est pas assez sociable pour ça. Peut-être que ce n'est qu'une impression et qu'elle est différente dans son clan mais tu en doutes un peu. La banalité de la conversation te frappe soudain. Elle t'a déviée de ce sujet que tu voulais aborder. Tu te redresses pour l'approcher, désireuse de ne plus la laisser fuir au sens propre comme au figuré. « Pas besoin de te comporter bizarrement à cause de l'autre fois. » Vous ne vous êtes pas vues depuis les entrepôts et tu ne peux pas t'empêcher de faire le lien entre ce moment et son attitude. « C'est pas comme si ça voulait dire quoi que ce soit. Tout le monde était bizarre ce jour là. » Le phénomène inexpliqué. Tu en avais entendue de belles sur ce qu'il s'était produit sur le territoire en ton absence. Mais alors que tu parles, tu ne peux nier que certaines choses sont plus difficiles à affirmer que d'autres. Nier l'évidence est stupide mais tu le fais quand même avec ce fond de lâcheté qu'il te reste.

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There’s always been a disconnect running from my heart to my head and no it’s never made much sense. I’ve been feeling so distant, can you be the one to connect? Pick up all the pieces again? As long as they don’t separate you from me I’ll be fine.

VIPÈRES DE L'OUEST

sawëlle
A41 SI J81 (après-midi)

I bite it so it's mine

Ce moment avait tout des situations que je fuyais d'habitude. Parler pour ne rien dire, s'intéresser aux autres, ce n'était pas mon fort, je n'y trouvais tout simplement pas d'intérêt. Ce n'était pas vraiment un effort avec Sasha car je me souciais d'elle. Même si elle parlait parfois trop, je n'avais aucune envie de la réduire au silence. Dans ce cas-ci, j'avais la sensation d'être en plein effort, comme si il me fallait rassembler toute ma volonté pour ne pas prendre la poudre d'escampette. Seulement, les raisons derrière ce réflexe n'étaient pas communes. Le cas de Machin ne me désintéressait pas comme l'avait prouvé cette drôle de phase des semaines plus tôt, cette inquiétude - même si l'admettre restait complexe -. Elle était vivante et, alors que j'avais désiré le savoir avant, je ne savais pas quoi faire de cette découverte. Avoir ma binôme sous la main pour qu'elle décrypte aurait été une facilité, mais j'aurais dû mordre un peu trop sur mon orgueil pour que cela soit envisageable. Elle avait beau savoir des choses, je n'avais pas envie de m'enfoncer plus encore en admettant que le sentiment d'après l'attaque avait perduré. L'accepter de moi à moi était déjà assez humiliant.

- J'oublie toujours que t'es pas comme eux.

Je ne lui avais jamais trouvé l'allure d'une ancienne Libre, elle n'en dégageait tout simplement pas l'énergie. C'était dit sans la connaître, elle détonnait peut-être plus parmi les Dragons. Ici, je devais quand même admettre qu'elle semblait plus à l'aise que certains Membres que j'avais croisé durant la journée, visiblement incapables de trouver quoi faire de leurs dix doigts maintenant qu'il n'y avait plus de bâtiments pour les entourer. Elle, elle était débrouillarde, mais la qualité n'appartenait pas qu'à ceux qui avaient baroudé dans la nature. Elle s'approcha soudain et je ne pu m'empêcher de pivoter légèrement, le corps tourné, mais sans faire un pas en arrière trop révélateur. Un réflexe qui me fit grincer des dents. Tout ça car cette idiote avait fait cette mauvaise habitude de toujours entrer dans mon espace. Le sujet me poussa à croiser les bras sur ma poitrine, plus méfiante encore. Pourquoi devait-elle reparler de ça ? Et pointer mon comportement d'une telle façon. Je ne lui avais rien demandé, elle aurait pu simplement se mêler de ses affaires en restant à distance. Mais non.

- En quoi c'est bizarre de pas vouloir perdre mon temps avec toi ?

Ma répartie tomba à plat, manquant clairement de verve. J'avais aussitôt regretté cette tentative ridicule. Je me sentais prise en faute comme une gamine stupide. Je serrais les poings, les doigts accrochés à ma veste, étouffant cette envie soudaine de lui mettre un coup de poing. Si ce jour avait été bizarre, la suite l'était plus encore. Elle m'avait détraquée avec sa stupide tête et... Merde ! J'allais vraiment lui en coller une. Le souvenir de la dernière fois m'empêchait néanmoins d'agir. Ça ne s'était pas bien terminé pour moi, j'avais une cicatrice pour le prouver.

- Ça t'arrive d'assumer un truc deux minutes ? Ce jour-là, c'était toi. T'étais pas bizarre, t'as pas perdu le contrôle.

Je n'aurais su dire exactement d'où je tenais cette certitude, mais l'excuse de la folie collective paraissait trop facile. Un pas avait été franchi à ce moment là, mais nous étions sur cette foutue route depuis longtemps déjà. Peut-être que ça lui avait juste donné le courage de caser complètement son image de Membre parfaite, mais on agissait pas comme elle l'avait fait par hasard. Il l'y avait en elle une noirceur et elle lui avait alors ouvert la porte.

- Au dernier moment, t'as reculé.

C'était la première fois que j'abordais ce qu'il s'était passé à haute voix et putain ce que ça faisait du bien. J'avais pris l'habitude de ne jamais mélanger les diverses parties de ma vie et elle en occupait une à elle toute seule, il était donc logique que je ne puisse mettre ça sur le tapis qu'avec elle. Je m'étais avancée à mon tour, libérée et soudain moins soucieuse de cette distance de sécurité.

- Alors va pas me balancer qu'on était bizarres.

On. L'aveu m'avait échappé et je m'en mordais déjà les doigts.

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Année 41 – si (après-midi 81)

« J'oublie toujours que t'es pas comme eux. » Pas comme eux. Venant d'elle ce n'est pas une agression mais c'est maladroit. Cela te rappelle que tes efforts ne pourront jamais effacer le fait que tu ne sois pas native. Tu ne sais pas comment cela se passe chez les Vipères mais chez les Dragons il y a ce fossé qui demeure. Même si ce n'est pas le but, ça te pique quand même. Quelque chose de léger mais qui pénètre sous la peau, touche le nerf. Tu te sens stupide d'être si sensible. Ce n'est pourtant pas nouveau. Elle sait comment te faire réagir. Même si ce n'est peut-être pas une bonne façon d'expliquer ce qu'il y a entre vous. Ça n'a jamais été vraiment elle qui savait où frapper. Le problème est bien que tu ne portes pas cette armure lorsque tu es avec elle. Tu ne cherches pas à te contrôler. Elle te touche car tu la laisses faire. Car tu sais que tu peux exprimer les pulsions qu'elle fait naître. La plupart. Un tabou demeure. Le cœur même de vos échanges. C'est pour ça que ça te déplaît de la voir agir de la sorte. Tu sens comme un agacement qui monte. Elle brise le pacte tacite. Et tu te sens le faire à ton tour. Tu retiens ton pas, la distance toujours présente. Elle se protège et tu en es à te demander de quoi. Ça n'a pas de sens. « En quoi c'est bizarre de pas vouloir perdre mon temps avec toi ? » Tu en grimaces presque. La remarque est typique mais creuse. « Tu es toujours là. » Tu glisses. La voix manquant de force. Elle aurait pu partir. Te contourner et ne pas se retourner. Mais elle se prête à ce jeu gênant. Ce n'est pas illogique. Elle a cette habitude de toujours vouloir le dernier mot. Aujourd'hui tu n'as pas la sensation que c'est le cas. Tu ne penses pas qu'elle joue pour gagner. Pour dominer. Jusqu'à ce que quelque chose change. Elle reprends de la vigueur. Une chose que tu vas regretter. « Ça t'arrive d'assumer un truc deux minutes ? Ce jour-là, c'était toi. T'étais pas bizarre, t'as pas perdu le contrôle. » Tu veux lui dire que c'est faux mais aucun son ne s'échappe de ta bouche entrouverte. Elle vient de marquer un point. Assumer n'est pas ton fort. Tu as toujours du mal à accepter la satisfaction ressentie ce jour-là. Tu as touché du doigt quelque chose sur lequel tu n'aurais pas dû t'attarder. « Au dernier moment, t'as reculé. » Parce que c'était la meilleure chose à faire. Parce que tu n'avais pas le droit de prendre ce dont tu avais eu envie. Ici et maintenant tu veux reculer aussi. Elle approche et tu te maîtrises à peine. Pourquoi as-tu insisté ? Pourquoi es-tu venue lui parler ? Tu aurais dû savoir que certaines choses devaient être laissées dans l'ombre. Mais une part de toi se refuse à lui donner cette réaction qu'elle recherche. Celle que tu penses qu'elle recherche serait plus exact. « Et t'es partie. » Tu ne peux t'empêcher de répliquer. Elle t'avait laissé là après s'être moquée de toi. Laissant tout en suspend. Mais tout n'était rien et les attentes n'avaient pas lieu d'être. « Alors va pas me balancer qu'on était bizarres. » On. Comment deux pauvres lettres peuvent elles avoir autant d'impact ? Tu n'étais pas bizarre et moi non plus. C'est ce que cela signifie. Il y a cette drôle d'agitation en toi. Elle est là avec son aveu lourd et tu n'as qu'une pensée dans la tête. Ton attitude elle ne la remet pas en cause. Elle ne la rejette pas. Elle ne te rejette pas même si c'est d'une façon qui lui est très personnelle. « Faut toujours que tu ais le dernier mot. » Tu grommelles avec agacement. Tes mains tremblent un peu lorsque tu saisis son col pour la tirer vers toi et l'embrasser. C'est fiévreux. Urgent. Un besoin qui vient réveiller la frustration. Tu cèdes enfin et c'est la même satisfaction que la première fois qui éclate. Ce n'est pas elle, c'est un rassemblent de circonstances. Tu t'en convaincs car ça n'a tout simplement pas de sens. Elle n'est rien et c'est pour ça que tu peux agir comme tu le fais. Faire taire cette voix dans ta tête qui te juge sans cesse, te susurres tout le mal que tu leur fais, glisses le doute dans ton esprit. Elle la boucle car parler n'a pas de raison d'être. Tu ne l'écoutes pas. Tu existes égoïstement dans l'ombre. Insouciante avec cette fille que tu embrasses parce qu'elle est tout aussi sombre que toi.

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sawëlle
A41 SI J81 (après-midi)

I bite it so it's mine

Le reproche m'avait perturbée un instant. C'était un reproche, n'est-ce pas ? Elle n'avait jamais été particulièrement expressive et je peinais parfois à saisir les émotions des autres. Dans ce cas-ci, ça aurait été logique même si je n'aurais jamais pu penser que mon départ ait pu la toucher. Pas que j'en ai réellement quelque chose à faire. Je ne comprenais simplement pas ce que j'aurais pu faire d'autre. Nous étions en pleine zone industrielle en train de bosser. La priorité se trouvait là. Lui filer un rencard n'était pas mon genre. Si elle avait voulu que quelque chose se passe, elle n'aurait eu qu'à parler. Peut-être. Sur le moment en tout cas, j'avais cette sensation que je n'aurais pas refusé de le revoir. Qu'importe que je préférais laisser la vie faire. On se serait revues de toute façon, ça se passait comme ça depuis des années. Aujourd'hui était une preuve supplémentaire. Malgré tout, une minuscule partie de moi devait reconnaître qu'en savoir un peu plus sur elle aurait été appréciable durant la saison polaire. Peut-être que je ne serais ainsi pas restée aussi longtemps avec ces inquiétudes dérangeantes.

- Je peux te retourner-

Je n'avais pas eu le temps de finir, les mots étant comme avalés par sa bouche. Qu'elle m'embrasse n'était absolument pas dans mes plans. Bon, d'accord, peut-être n'était-ce pas si dérangeant que ça. Le contact était familier, les sensations vives et fortes. A croire qu'elle ne savait agir que dans les extrêmes. Il me fallut un instant pour réagir. Pas pour l'embrasser, non, pour lui filer un coup de boule.

- Tu m'as prise pour un Mignon toujours dispo ou quoi ?

Pour autant, j'avais à peine bougé, toujours présente dans son espace ou elle dans le mien, je n'en savais trop rien. Je passais ma manche sur mes lèvres, la fusillant des yeux. Merde. Qu'est-ce qu'elle avait à être aussi jolie lorsqu'elle se lâchait. Les pupilles un peu trop vastes et le souffle court. Et cette moue agaçante. Elle était attirante et je détestais ça. L'information n'avait pas encore eu le temps de s'imprimer dans mon esprit que je la poussais déjà vers l'arbre derrière elle, stationnant tout proche d'elle. J'avais une main accrochée à sa veste, l'autre s'attardant un instant sur le zipper avant de le descendre.

- Va pas t'imaginer des trucs.

Nous savions toutes les deux de quoi il s'agissait. Cette tension avait toujours existé, tout comme le refus de faire quoi que ce soit à ce sujet. J'étais incapable de dire ce qui avait changé désormais, mais un cap avait été passé.

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« Je peux te retourner- » C'est satisfaisant. Depuis le temps que tu rêves de lui fermer son clapet, tu ne peux nier que ce baiser n'en est que plus plaisant. Un sentiment passager qui se fait vite avaler par une toute autre émotion. Quelque chose de plus animal, une envie qui descend lentement et que tu as toujours refoulé. Ta main libre bouge vers sa hanche sans ton accord mais elle n'a pas l'occasion d'atteindre sa destination. Tes yeux claquent ouvert sous une douleur aussi vive que soudaine. « Outch. » Elle irradie au niveau de ton front que tu ne peux pas t'empêcher d'aller toucher avec prudence, complètement perdue. Qu'est-ce que-? « Tu m'as prise pour un Mignon toujours dispo ou quoi ? » Tu as beau ne pas comprendre le terme, le sens est assez logique. Elle ne pourrait pas utiliser un vocabulaire plus commun ? Une seconde. Les Vipères se livraient-elles à la prostitution ? Une question qui restera sans réponse. Il y a plus important. Tes yeux s'accrochent aux siens et tu te perds une seconde dans cette colère qui flambe au cœur de ses prunelles. Et voilà que tu as d'autres questions. La honte te chauffe aussi un peu les joues. Tu pensais pourtant avoir lu correctement votre situation et cette tension entre vous. Tu n'en es plus si sûre. Tu as déjà des excuses au bord des lèvres, prêtent à déborder avec la force de l'habitude. « Je- » C'est un runnin-gag. Va-t-elle te laisser en placer une ? Apparemment non. Ton dos heurte l'arbre bien trop proche et tu as juste l'occasion t'y appuyer une main pour assurer ton équilibre avant qu'elle ne soit à nouveau dans ton espace. Au vu de cette façon qu'elle a de s'attarder sur la fermeture de ta veste, tu ne t'es pas trompée. Ce soupire qui t'échappe et la façon qu'ont tes yeux de se soulever vers la canopée sont des réflexes. Vraiment ? Elle est insupportable. « Va pas t'imaginer des trucs. » Tu ignores tes interrogations cette fois. Le temps n'est plus à ça. Tes doigts s'accrochent derrière sa nuque et tu l'attires vers toi pour l'embrasser. Laissant l'envie t'emporter. (...) Ton souffle encore un peu haché par l'effort, tu laisses ta tête choir contre le tronc, ignorant les griffures de l'écorce dans le bas de ton dos découvert. Ta veste est encore au sol et tes vêtements sont remontés, laissant le froid picoter d'une façon plaisante ta peau surchauffée. D'ici quelques heures, tu seras sûrement mortifiée par ton attitude mais pour le moment tu n'arrives pas à t'en soucier. Ta vision manque encore un peu de clarté, les bords flous alors que tu te concentres distraitement sur sa gorge. Sur cette marque qui vire lentement vers un légère coloration violette sur sa peau trop pâle. Tu l'effleures doucement, la satisfaction étirant tes lèvres en un sourire peu coutumier pour toi. Tu ne comprends pas tout mais tu as la sensation d'être plus à l'aise autour d'elle désormais. A croire qu'il vaut mieux ne pas trop réfléchir et juste laisser les choses se faire. Accepter que c'est plus facile sans cette tension étouffante. Qu'importe ce que cela signifie pour la suite.

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sawëlle
A41 SI J81 (après-midi)

I bite it so it's mine

Conclusion : le sexe valait le coup que l'on s'y attarde une fois de temps en temps. Mon romantique de frère dirait sans doute que c'était le cas lorsque l'on était avec la bonne personne. Okay. Penser à lui après ce qu'il s'était passé était définitivement bizarre et je m'empressais de ranger tout ça loin, très loin, au fond de mes pensées. Même si je devais admettre que, romance mis à part, il n'aurait pas eu totalement tort, je n'allais pas cracher sur la compagnie. Ce moment découlait de nos multiples rencontres, plus ou moins frustrantes, avec Machin et, malgré quelques approches, je n'avais jamais ressenti l'envie d'aller aussi loin avec qui que ce soit d'autre. Je frissonnais lorsque ses doigts froids glissèrent sur ma peau et me forçais à ouvrir les yeux. Elle emplissait mon champ de vision et je me fis la réflexion que je ne l'avais vue aussi calme. J'ajustais ma position pour m'asseoir plus confortablement, légèrement appuyée contre elle.

- T'as l'air un peu con avec ce sourire.

Le plus désagréable dans cette histoire était que je ne devais pas paraître beaucoup mieux. Mes lèvres étaient étirées, bien plus que d'habitude, et, à l'instant, je n'étais pas certaine de pouvoir changer ça. Même la remarque n'avait pas son mordant coutumier. Il s'agissait plus là d'une constatation.

- C'est quoi ton nom ? J'crois que t'es la personne que je connais depuis le plus longtemps en ville, mais j'ai jamais pensé à demander.

Et je n'en avais même jamais ressenti le besoin. Que je ne connaisse rien d'elle avait toujours fait partie du charme de ma Némésis. Après tout ça, disposer au moins de cette information me paraissait logique. Et puis, encore une fois, j'aurais sans doute été bien contente de le savoir après l'attaque. Je ne me voyais plus nier qu'elle n'était pas qu'une personne lambda et que j'avais un semblant de respect pour elle. Elle était maligne et douée de ses mains. Sans mauvais jeu de mots. Et puis, elle valait le coup que je me bagarre avec elle, quelque chose qui n'avait rien d'anodin.

AVENGEDINCHAINS

DRAGONS DU NORD

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Année 41 – si (après-midi 81)

Tu n'as jamais été douée pour l'après. Il y avait eu des gens avant elle naturellement mais tu les avais quitté sans plus de fioritures. A peut-être une exception ou deux près. Trop souvent tu n'étais pas assez à l'aise avec les autres pour te laisser aller. Tu prenais et repartais aussitôt dans une attitude très dragonne. Mais aujourd'hui tu te surprends à ne pas être dérangée par sa proximité et un bras se glisse autour de sa taille, ton pouce glissant sous les vêtements pour caresser sa peau. Peut-être que ce n'est pas si surprenant. Pas la tendresse mais la confiance. Si en six ans elle ne t'avait pas butée, elle n'allait pas se lancer maintenant. « T'as l'air un peu con avec ce sourire. » Le pire c'est que tu n'en souris que plus. « Parle pour toi. Tu vas faire flipper les gens si tu continues comme ça. » Elle passait sa vie à faire la gueule sans doute qu'on ne la voyait sourire qu'à la façon d'une Fine Lame préparant un mauvais coup. « C'est quoi ton nom ? J'crois que t'es la personne que je connais depuis le plus longtemps en ville, mais j'ai jamais pensé à demander. » C'est nouveau ça. Va falloir que tu t'habitues aux changements. Aussi légers seront-ils. Tu te doutes bien qu'elle ne va pas rester aussi sympathique par la suite. Elle devait avoir un quota qui s'épuisait vite. La part la plus possessive de toi se satisfait de savoir que tu es la première même si c'est pour une raison stupide. « J'ai pas fait mieux pour le coup. Faut dire que c'était déjà assez de devoir résister à l'envie de t'étrangler. » Ne pas savoir avait aussi été une façon de ne pas trop t'impliquer. De te persuader qu'elle n'était qu'une emmerdeuse que tu rencontrais de temps en temps. Une tactique qui n'avait pas tenue bien longtemps. « C'est Sawyer. » Comme si ce n'était pas déjà assez avec tout le reste, le changement devient ici officielle. C'est comme tirer un trait sur le passé pour commencer un nouveau chapitre.

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» morgan • I have claws and I bite
» don't bury thoughts that you really want (sawëlle)
» life would suck without you — sawëlle
» lorin • this idiot is mine, walk away
» You weren't mine to lose ~{ Sawyer

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