are you hiding other secrets ? ;

année 41- SI jour 82

La nuit dernière était comme un rêve. Ni un cauchemar, ni quelque chose de réellement plaisant. Le toucher de Violette avait été trop nostalgique. Empreint d'une douleur que Yulia avait eu du mal à avaler. Le départ de la dragonne ne l'avait laissée que plus vide et confuse. Petit à petit, la lumière se faisait sur les conséquences de ses actes. Son attitude infecte avait laissé des traces. Violette en avait fait les frais, souvent plus que d'autres. Aujourd'hui, Yulia avait honte. Le goût amer des regrets se faisait encore plus omniprésent dans sa bouche. Plus de douleur ne faisait aussi que s'insinuer avec ce qui devenait une certitude. Violette ne lui pardonnerait pas. Comment l'aurait-elle pu ?

Maussade, Yulia s'était tenue à l'écart des autres depuis que le camp avait été replié. L'idée d'avoir à se confronter à quelqu'un lui était désagréable. Elle préférait encore ruminer dans son coin. La vieille habitude ne s'envolerait pas de si tôt. Cette dernière saison avait été trop solitaire. La pause était presque venue trop tôt, la forçant à se mêler un peu plus aux autres. Même dans cette situation, avec tant de gens autour d'elle, Yulia s'était posé loin des vipères ou de personnes trop connues.

C'était sans compter Ella.

Yulia n'aurait pas dû être étonnée de la voir la rejoindre. Son attitude la bouscula par contre un peu plus. Encore une autre qui portait des traces évidentes de la phase polaire de la vipère. La voir ainsi la poussa à grimacer. Que Ella se sente encore obligée de prendre des pincettes autour d'elle était une chose déplaisante. Elle s'efforça de lui offrir un sourire pour tenter de la rassurer. Pour lui faire comprendre que sa présence n'était pas refusée. Elle devait bien à Ella de ne pas être trop fermée.
Ses questions ne l'aidaient pas, pourtant.

— Quelle fille ? avait-elle demandé en détournant le regard.

Dans la tête de Yulia, les pensées filaient. Ella aurait-elle pu savoir pour Violette ? Elle se souvenait vaguement avoir abordé le sujet, bien avant que tout ne tourne au chaos.

Son coeur manquant un battement, la vipère se rendit compte de son erreur. Quelle idiote elle faisait. Cette fille n'était pas Violette.

— La fille de mon père, tu veux dire ?

La considérer comme sa soeur était encore trop complexe. Elle commençait à peine à s'adapter à l'idée. Yulia n'aurait pas pu se résoudre non plus à prononcer son prénom. Lena. Elle en serait devenue trop réelle.

— Je ne sais pas. Peut-être. ajouta-t-elle avec un haussement des épaules. J'évite de trop penser à cette possibilité.

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année 41- SI jour 82

Yulia n'avait parlé de cette mystérieuse petite sœur qu'à deux reprises. Une fois face à Esfir, complètement bouleversée par la nouvelle. Une autre avec Ella, lorsqu'il avait fallu être sincère. Les occasions n'avaient pas manquées mais elle n'avait pas pu s'y résoudre. Son quotidien demeurait déjà assez chaotique sans relancer sa famille sur le sujet. Que pensaient-ils réellement, d'ailleurs ? Elle n'en savait rien. Thiago aurait dû être celui avec lequel elle aurait dû parler mais personne n'ignorait leurs problèmes. Ce n'était pas l'apparition soudaine d'une cousine qui allait lui donner envie de faire des efforts. Elle en était certaine. Avec ce questionnement naquit une forte bouffée d'anxiété. Avant que son esprit ne s'emballe un peu trop, Yulia se força à chasser le tout de son esprit. Elle était avec Ella, tout allait bien. Elle le savait bien qu'elle n'avait pas de crainte à avoir avec elle. Ella ne lui préférerait pas cette nouvelle arrivante, toute jaguar soit-elle.

Pendant qu'elle se perdait déjà dans ses pensées, son amie n'avait pas perdu une seconde pour établir ses propres théories. Et, bien sûr, elle avait noté sa confusion. Yulia n'avait en effet pas été très naturelle en abordant le sujet. Si la question ne la surprit pas, il lui fallut accuser le coup. Les battements de son cœur s'étaient accélérés. Ce n'était pas tous les jours qu'elle se faisait rattraper vis à vis de Violette. Elle s'était toujours appliquée à garder son existence et ses sentiments secrets. Un bel échec si on s'arrêtait sur le nombre de personnes au courant de quelques détails compromettants. Qu'aurait pensé Ella si elle avait su qu'il lui aurait suffi de questionner Maxine pour apprendre tout ce qu'il y avait à savoir ou presque ? Yulia se sentait soudainement bien coupable de ne pas avoir parlé plus tôt. Mais plus elle y pensait, plus elle songeait qu'elle ne l'aurait tout simplement pas pu. Elle avait ressenti le besoin de garder Violette pour elle car au fond elle se doutait que jamais elles ne pourraient exister à la lumière du jour. Le risque était trop grand. Peut-être qu'en parler à Ella lui aurait aussi fait voir tout ce qui n'allait pas dans les déboires traversés avec la dragonne.

Yulia se força à respirer calmement pour commencer. Un autre jour, il aurait peut-être été plus facile de nier mais pas aujourd'hui. La nuit précédente avait fait trop dégâts, fait naître bien trop de questions. Demeurait aussi la culpabilité. Malgré un certain désir de se confier, d'évoquer cette relation réduite en cendres par ses soins, elle craignait un peu le jugement d'Ella. Comme si elle ne lui avait pas déjà donné assez de raisons de la trouver détestable.

— Grey, le sage. avait-elle soufflé avec un demi-sourire.

Elle n'avait pas pu s'empêcher de le souligner. C'était un homme de bons conseils que Ella était chanceuse d'avoir. Yulia comprenait maintenant un peu mieux l'attitude du jaguar la veille. Elle ne pu s'empêcher de se demander combien de fois son cas avait été mis sur le tapis ou autrement dit, à quel point elle avait poussé Ella à s'inquiéter à son sujet.

— Il y avait quelqu'un. C'est compliqué.

Yulia était amère. Parler au passé avait été douloureux, mais il lui fallait être claire.

— Je lui ai fait du mal, Ella. Beaucoup de mal. Et maintenant elle me déteste.

Défaitiste, Yulia ravala ses larmes. Tout était de sa faute, elle n'était pas en droit de sangloter sur cet amour perdu. Mais ça faisait mal. Le simple fait d'aborder le sujet de Violette lui crevait le cœur.