just one single glance
Année 30

Tu dois te rendre à l'évidence : Ofélia t'a posé un lapin. Ce n'est pas si étonnant que ça. Les choses sont plus compliquées depuis qu'elle est Membre. Ses horaires sont moins modulables. Tu ne peux pas prétendre que te dégager du temps n'est pas devenu plus difficile aussi. Mais tu avais tenu à honorer ce rendez-vous. Trop consciente que parfois votre situation restait précaire et qu'il n'aurait pas fallu qu'un malentendu vienne vous déséquilibrer. Il vaut sans doute mieux que ce soit dans ce sens. Que ce soit elle qui ne vienne pas le contraire. Parce que tu n'as plus seize ans, que tu n'as jamais eu cette impulsivité, et que le poids de la culpabilité se trouve toujours sur tes épaules. Tu ne te leurres pas. Il t'accompagnera toujours. Tu serais plus perturbée que soulagée si tu pouvais simplement l'oublier. Ce n'est pas dans la nature des choses. Même si vous avez mis le passé derrière vous, qu'elle t'a pardonné ce qu'elle pouvait, il n'y aura que le temps pour faciliter vos échanges. Ca et la volonté de continuer dans cette direction. De faire cet effort conscient malgré tout ce que vous vous êtes infligé. Tu évites de placer une raison sur son absence. De te laisser trop de place pour te faire des idées. Pour laisser parler la petite voix si négative dans ta tête. Il y aura une prochaine fois et une raison qu'elle te donnera de vive voix. Cela ne t'empêche pas de continuer d'attendre. Espoir futile et peut-être aussi parce que tu n'as aucune envie de rentrer. Ce n'est pas tous les jours que tes arrières sont couverts de la sorte et que tu peux t'offrir un peu de temps en dehors de la vigilance maternelle. Il n'y a que le travail pour t'offrir cette tranquillité habituellement. Alors tu en profites même si tu n'es pas douée pour ça. Que tu ne te sens pas tout à fait à l'aise assise sur un muret un peu à l'écart des échoppes. Le brouhaha léger assez présent pour t'occuper un peu la tête autant que pour te mettre sur tes gardes. L'animation du centre neutre reste assez peu habituelle pour toi. Il y a donc aussi une forme d'intérêt, de curiosité. Tu observes depuis l'extérieur comme on t'a toujours appris à le faire. C'est là où est ta place. Et c'est là que tu la remarques. A cause de cette autre fois, de cette impression qu'elle t'a faite. Une impression qui ne devrait vraiment pas être positive. Il y a cette pensée particulièrement étrange. Cette forme de certitude que tu l'aurais remarquée même sans ça. Il y a quelque chose dans sa présence. Elle se détache du reste de la foule sans que tu ne comprennes réellement pourquoi. Un tel charisme ne s'explique sans doute pas. Aussi difficile soit-il à envisager vu cette personnalité qu'elle avait exposé. Te revoilà à penser trop. A te soucier inutilement de l'existence d'une Jaguar. Une rivale sans vraiment l'être. La suivre du regard est une erreur stupide. Cela devient évident lorsque cela attire son attention, prouvant au passage qu'elle ne fait pas une si mauvaise gradée si elle est consciente de ce qui l'entoure. Tout ça pour dire : vos regards se croisent. Tu as beau détourner les yeux immédiatement tu as la sensation d'être tombée dans ton propre piège. Tu relèves la tête dans un sursaut d'orgueil. Tu n'es pas censée fuir de la sorte. Tu hoches juste la tête en guise de salut. Pour rester professionnelle dira-t-on.

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you would've been the one

I guess you never know, never know and if you never bleed, you're never gonna grow and it's alright now. But we were something, don't you think so? And if my wishes came true it would've been you.

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Année 30

Oh. Oh non. Elle s'approche et pour ça tu ne peux que maudire ton excès de politesse. Pourquoi diable t'étais-tu sentie obligé de reconnaître sa présence de la sorte ? Vous n'êtes pas au Nord. Les codes sont différents. Tout Dragon un peu plus versé dans la culture des autres clans aurait sans doute pu te dire que ce n'était pas pour rien qu'on les traitait comme si ils étaient invisibles. On perdait moins à ignorer leur présence. Et toi tu viens apparemment de lui envoyer un signal similaire à un début de conversation. Quelle idiote. C'est tellement plus facile à gérer lorsque les gens essayent de te tuer. A défaut d'être plaisant tu sais au moins comment te comporter. « Je pourrais croire que tu t'es attachée à moi. Le comportement anti-Jaguar n'a pas duré longtemps. Je pensais que les Jaguars ne méritaient même pas le moindre petit regard. » Quelle entrée en matière. Est-ce qu'elle te cherche ? Tu as un froncement de sourcils assez prévisible. Partagée entre agacement, incompréhension et offense. « Il ne me semble pas avoir émis la moindre critique au sujet des Jaguars. » Le ton casse un peu. Tu aurais pu. Tu avais quelques aprioris après tout. Mais en tant que personne civilisée en pleine mission, tu les avais gardé pour toi.

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Année 30

« Alors, c'est juste ma présence qui te met mal à l'aise, l'autre fois et maintenant. » Tu ne comprends pas cette volonté de comprendre absolument. Tu n'as jamais été encouragée à faire preuve d'une telle curiosité. Du moins vis à vis des autres. On t'a poussée à trouver leurs forces, leurs faiblesses, les exploiter. Mais chercher à comprendre le raisonnement de quelqu'un d'autre n'a jamais été vu comme une priorité. Elle, semble s'en être fait une mission. Sous quel prétexte ? Ce n'est pas comme si vous alliez faire plus que vous croisez quelques fois au cours de votre service. C'était sans même prendre en compte la possibilité que ces rencontres n'aient rien de pacifiques. Ce n'est pas un problème en soi. Qu'elle cherche à te connaître ou non. Eliminer une Jaguar trop amicale ne serait pas ton pire kill. « Ma curiosité ne peut pas plaire à tout le monde. Je suppose que d'avoir réussi à m'approcher d'éléments plus sombres encore que mystérieux a déréglé mon intuition. » Elle semble partie pour rester. Tu peux difficilement te plaindre à ce sujet quand vous êtes dans le centre neutre. La rue appartient à tout le monde. « C'est quoi pour toi ? Un jeu ? » Tu te désespères un peu. Ce n'est pas comme ça que tu vas la décoller de ce mur. T'en débarrasser. Tu lui donnes l'impression de t'intéresser. Un sacré message. D'accord peut-être qu'il y a un fond d'intérêt réel. Qu'elle te perturbe un peu trop et que tu souhaites tenter de comprendre. C'est trop difficile à assumer. Trop révélateur. Le déni est plus confortable. Plus facile de prétendre que tu ne fais qu'entretenir une certaine civilité entre vous. Que c'est plus simple comme ça. Tout plutôt que d'admettre qu'elle a fait mouche. Elle te met mal à l'aise parce que tu ne sais pas quoi faire de son cas. Cela arrive. Les gens vont et viennent. Ne demandent pas tous une étiquette très claire. Mais elle te trouble à rester pour pousser contre tes murs pourtant si évidents.

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