reyna

  le début de l'attachement

J'avais bossé dans les entrepôts pendant une partie de la nuit et toute la matinée parce que les objectifs étaient loin d'être atteints et j'étais sûrement la seule assez folle que pour accepter de rappliquer à toute heure du jour et de la nuit. Ma formation et mes compétences aidaient mais ce n'était pas tout. Je n'étais pas la seule qui était capable de telles prouesses et ce n'était pas étonnant puisque nous n'étions pas rares à Orb, les coordinateurs. Après des essais éprouvants, qui m'avaient demandé énormément d'énergie parce que je devais à tout prix rester vigilante, il était légitime que je prenne une vraie pause et que je prenne un peu de temps pour moi le restant de la journée.

Si initialement je devais retrouver Ofélia, elle avait annulé le rendez-vous par téléphone et je me retrouvais à errer dans les rues, à la recherche d'un signe du ciel, une vieille croyance entretenue par les propos de ma mère. Elle prétendait qu'une sacrée bonne étoile devait veiller sur moi, c'était la seule explication plausible selon elle à ma survie actuelle. Il m'arrivait de douter de sa confiance en moi quand elle parlait comme ça, quand elle était aussi fataliste à mon propos alors que Nicky avait droit à beaucoup de compliments mais mon père me rassurait en me disant que je m'imaginais trop de choses. Elle m'aimait à sa façon. Particulière si vous vouliez mon avis. Pour reprendre encore ses propos, j'avais une manière encore plus singulière d'approcher les autres et de leur prouver mon amour. Un peu trop envahissante. Dangereuse. Intense.

Intense comme le coup que je venais de me manger. Je m'étais perdue en bavant devant une vitrine dans laquelle se trouvait des jeux vidéos qui me donnaient terriblement envie, les écouteurs dans les oreilles et j'avais réussi à bousculer une jeune femme qui n'avait pas franchement l'air à l'aise. Elle semblait coincée, perdue et un peu exaspérée aussi. « Je ne vous avais pas vue. » Elle était drôlement jolie sous ses airs trop sérieux et trop strictes. J'avais mis du temps avant de retirer un écouteur de mon oreille droite. Et puis l'oreille gauche. « Je n'ai pas beaucoup dormi à force de travailler et ce jeu vidéo à achever mon attention. Je ne vous ai pas fait mal ? » C'était précisément ce que ma mère me reprochait. Parler à un étranger comme si nous nous connaissions depuis toujours.