ft. Nell

année 41, saison intermédiaire, jour 81

Weasel, we have a problem

Il aurait dû lui mettre une laisse. Non, mieux. Il devrait s'en carrer comme de sa première chute. Si elle disparaissait pour ne plus jamais revenir, ça lui ferait des vacances, à lui. Il s'en foutait, non ? Il était déjà pas un membre impliqué, on lui passerait cette perte dans des circonstances si exceptionnelles ? Si ça se trouve, la morveuse, elle avait juste pris la voiture et il était juste un peu trop parano. Ça lui réussissait pas l'exode en-dehors de la ville, il dirait ça, si on lui posait la question. Elle serait pas une grande perte pour le clan, ça ferait une geignarde en moins...Non, non ! Kaz, c'était un connard mais c'était pas un monstre. C'était pas non plus le genre de crevard qui n'accordait de valeur à la vie de quelqu'un qu'à la condition qu'il soit un membre accompli. Petite teigne ou pas, même Johanne ne méritait pas de crever toute seule dehors. Sauf qu'il n'en était pas encore là. Elle était pas bien grande, elle voulait probablement l'éviter et, ça le dérangeait pas ; fallait juste qu'elle reste dans son champs de vision, là où il pouvait la surveiller. Ça aurait pas du être difficile pour lui. C'était un putain de géant ! Pourquoi est-ce qu'il arrivait pas à retrouver cette grosse tête blonde ? Pourquoi est-ce qu'aujourd'hui, elle était pas foutue de provoquer un esclandre ? Ça aurait été plus facile à repérer. Heureusement pour lui, même si c'était qu'un con solitaire, il avait jamais eu de mal à demander de l'aide. Et la petite silhouette qui lui passait à côté était la personne parfaite, à ses yeux, pour lui offrir son aide. Question de gabarit. Elle était plus proche de la taille de Johanne que de la sienne. Elle voyait le même paysage. Belette, aide-moi, je crois que j'ai perdu la Jeanne. Elle allait le taper parce qu'il pouvait pas s'empêcher de lui flanquer un surnom débile mais il était prêt à encaisser cette fois. Faut la retrouver avant qu'elle mette à mal l'alliance avec les nanas empoisonnées...ou qu'elle provoque les lézards. En parlant de lézards, ça aussi, ça le rassurait. De savoir que Nell, elle restait dans sa zone. C'est pas qu'il avait pas confiance en elle mais au moins, il pourrait jauger son comportement. Il aurait pas apprécié qu'elle se sente mal à l'aise parce que des débiles de son ancien clan se la jouaient un peu trop présents.

Belette et Gros Ours

année 41 ; saison intermédiaire ; journée 81

weasel, we have a problem

J'étais encore mitigée au sujet de ce voyage, je n'avais pas eu énormément d'occasions d'en parler à qui que ce soit ou, plus exactement, je n'avais pas cherché à en parler à qui que ce soit. C'était parfois tellement compliqué de mettre des mots sur ce qui n'allait pas. Je connaissais mes compétences en tant que Membre, je passais pas mal de temps à la salle d'entraînement, réellement motivée, tous les jours pour ne pas tomber dans la lassitude et laisser une brèche à quiconque souhaiterait me faire tomber. Ce perfectionnisme et ce goût prononcé des entraînements me venait de mes parents et de cette stupide éducation Dragonne que je rejetais tellement souvent mais ça m'avait valu de ne pas trop souffrir pendant la rébellion. Quand on avait été préparé à une vie sur le territoire Nord et à une vie que des parents espéraient prestigieuse, on ne se reposait pas sur ses lauriers, on faisait son maximum pour être prêt à faire face à n'importe quoi et le psychologique suivait forcément. Quoi que personne n'était intouchable, je le savais très bien mais tout était question de paraître.

Cette expédition était également une question d'apparences. Je n'avais pourtant pas réussi à dissimuler ma surprise en reconnaissant Violette. Cette petite crevette avait poussé, beaucoup trop à mon goût et elle avait tout de l'allure Dragonne. Elle n'avait plus ce sourire et cette joie, les yeux pétillants d'ambition et de grandeur. J'avais entendu dire qu'elle était devenue Fine Lame, une grande aux yeux des Dragons. C'était sûrement ça qui l'avait perdue. A moins qu'il n'y ait eu d'autres choses encore. Rien d'étonnant, tout le monde souffrait à Paris, plus ou moins fort avec plus ou moins de courage et d'énergie pour surmonter le tout mais l'éducation Nordique n'arrangeait rien, je l'avais vu de mes propres yeux. Si j'étais tentée de lui parler, de voir si elle me reconnaissait, vaguement, je ne savais pas comment m'y prendre et de toute façon, quelqu'un avait décidé d'interférer avec ces gros, ces énormes sabots.

« Belette, aide-moi, je crois que j'ai perdu la Jeanne. » Un coup de poing dans ses côtes, juste ce qu'il fallait pour que son corps comprenne le message. De là à ce que le message fasse son chemin jusqu'au cerveau, ce n'était pas gagné. Après ça, un soupir et le visage qui se crispait. « Faut la retrouver avant qu'elle mette à mal l'alliance avec les nanas empoisonnées...ou qu'elle provoque les lézards. » Les surnoms débiles, il en donnait à tout le monde, qu'on le veuille ou non mais ça avait le don de m'horripiler. En temps normal, c'était une horreur mais dans de pareilles circonstances, c'était encore décuplé. Tout mon corps mourrait d'envie de le foutre à terre mais Roxanne allait me tirer l'oreille, que ce soit justifié ou non. « Ne m'appelle jamais plus Belette quand on est entourés de tout ce monde, Gros Ours. Je te rappelle que j'ai des antécédents avec ces stupides lézards, comme tu les surnommes. Et même sans ça, j'ai ma dignité ! » J'avais élevé la voix et tant pis si certaines personnes se retournaient sur nous. Roxanne ne pouvait pas nous surveiller et nous sermonner pour si peu. Il y avait des limites à respecter, même pour une Seconde. « Quant à l'autre blonde, c'est ton problème, pas le mien. Et évite, par pitié, de faire référence à ma petite taille et à ses bénéfices ou je te tape ailleurs et ça fera autrement plus mal. » Les menaces énoncées, il n'avait plus qu'à se tenir à carreaux. Malheureusement, je savais à qui j'avais affaire.

ft. Nell

année 41, saison intermédiaire, jour 81

Weasel, we have a problem

Il s'y était attendu à recevoir un coup, le Kaz. Ça l'empêcha pas de grimacer parce qu'elle avait beau être petite, elle avait de la poigne la Nell. Il l'avait appelée par son surnom, c'était une provocation même s'il comprenait pas trop pourquoi ça la constipait autant. Il aurait pu l'appeler petit rat, une belette au moins, c'était mieux. Elle le lui rendait bien en plus, à le flanquer d'un autre surnom animalier mais lui, il la frappait pas pour ça ! Même s'il avait rien en commun avec les ours, à part la taille....pas qu'il en ait déjà vu un en vrai. J'ai jamais dit qu'ils étaient stupides déjà. Qu'il le pensait, était une autre histoire. Il grimaça encore, se massant l'endroit qu'elle avait frappé. C'était déjà normal de se méfier des dragons. Quand on naissait jaguar, on en entendait des choses sur le clan du Nord, surtout avec cette rivalité qui divisait les deux clans depuis des générations. Nell, elle, avait d'autant plus de raison de rester sur ses gardes. Une dragonne, elle avait failli en être une. Ça avait l'air de la préoccuper un peu et il comprenait, Kaz, il imaginait pas se mettre à sa place mais ça devait remuer des choses à l'intérieur. Ils abordaient la situation différemment pourtant...parce que le grand con, lui, il pensait qu'il fallait continuer à agir le plus naturellement possible. C'était un peu une victoire pour eux sinon. C'est pas parce qu'ils sont dans le coin que tu dois devenir aussi chiante qu'eux. Qu'elle se méfie autant, ça allait pas l'aider à se rassurer quant à la disparition de la Johanne, ça. C'était une teigne au sale caractère, elle savait se défendre mais un dragon restait un dragon. Sans parler de l'environnement inconnu et sauvage qui les entourait. T'oserais pas faire ça ! Pense un peu à ces pauvres nanas que tu priverais de ma compagnie. Il avait feint d'être outré mais s'était reculé légèrement aussi par sécurité parce que...si justement...il avait besoin de Nell. T'es la seule sur qui je peux compter. J'ai pas envie que Roxanne m'enterre quelque part. La belette continuait d'avancer et à mesure qu'elle enchaînait les pas, le trouble continuait d'amplifier en lui. Bel...Nell, aide-moi. T'as la taille parfaite pour ça. Me force pas à t'afficher publiquement, tu sais que j'ai aucune réputation à perdre. Et des moyens différents pour lui mettre la honte, il en avait. Il aimait pas avoir à en arriver là et il s'attendait à un retour de bâton explosif mais il était vraiment prêt à tout. Et puis, comme ça, ça lui changerait les idées de chercher après la Johanne.

Belette et Gros Ours

année 41 ; saison intermédiaire ; journée 81

weasel, we have a problem

« J'ai jamais dit qu'ils étaient stupides déjà. » Ce n'était qu'un détail parce que je savais très bien qu'il le pensait et il le pensait très fort. Il n'avait jamais beaucoup aimé les Dragons, un peu comme beaucoup de Jaguars. C'était quelque chose que j'avais découvert en les rejoignant et ce n'était pas moi qui allais être contraire alors que je les avais fuit pour de bonnes raisons. Ce choix n'avait pas été simple parce que ma famille y vivait toujours et y resterait jusqu'au bout mais c'était le plus sain pour moi. Je haussai les épaules, non sans lui jeter un regard qui en disait long. Un petit rappel du genre je sais ce que tu penses, abruti, je suis ton amie. Répondre à cette bêtise ne servirait à rien en l'état, on s'amuserait juste à prétendre l'opposé de ce que disait l'autre, en se renvoyant la balle constamment comme des gamins, ce qui nous desservirait face à tous ces inconnus. Je ne me souciais pas tant que ça du regard des autres mais me taper l'affiche, c'était encore autre chose. Le voir se masser me fit sourire, victorieuse, mais aucune méchanceté dans l'esprit.

« C'est pas parce qu'ils sont dans le coin que tu dois devenir aussi chiante qu'eux. » Aussi chiante qu'eux, rien que ça. Il ne connaissait aucune limite, comme toujours. Dans le principe, il n'avait pas tort, je ne devais pas leur donner raison en me montrant trop méfiante et trop irritable parce qu'ils étaient dans les parages. Dans le tas des Dragons présents, je ne connaissais pas grand-monde. Maxine et Violette. « Ouais, c'est bon, je suis désolée. » Je n'étais plus aussi fière soudainement. Mon but n'était pas de l'emmerder pendant le voyage, c'était plutôt son projet. C'était comme ça qu'on fonctionnait mais ce n'était jamais sérieux.

« T'oserais pas faire ça ! Pense un peu à ces pauvres nanas que tu priverais de ma compagnie. » Je levai les yeux au ciel. Son argument était typique. Je m'en moquais bien des filles qui partageaient leurs lits avec lui et je n'allais pas être désolée pour elle si elles le perdaient. Non, je serais plutôt désolée pour moi. J'y tenais à cet abruti qui faisait des allusions au sexe.

« T'es la seule sur qui je peux compter. J'ai pas envie que Roxanne m'enterre quelque part. » L'appréhension était légitime quand on connaissait Roxanne. Elle n'avait rien de la Seconde conciliante et sympathique. Elle faisait appliquer les règles avec toute la sévérité digne de l'ancienne Fine Lame qu'elle était. Il ne valait mieux pas jouer avec ses nerfs parce que ça reviendrait à jouer avec le feu et ça fait mal parce qu'on ne gagne jamais contre les éléments de la nature. « Bel...Nell, aide-moi. T'as la taille parfaite pour ça. Me force pas à t'afficher publiquement, tu sais que j'ai aucune réputation à perdre. » Je m'étais arrêtée, consciente de l'effort qu'il avait fait et non par crainte d'être affichée. Il s'inquiétait vraiment pour cette bleue dont on parlait dans les couloirs du quartier général et dont on ne parlait pas en bien. Les rumeurs la disaient peste, imbue d'elle-même et irrespectueuse. Tout ce que je ne supportais pas réuni en une seule personne. Je pouvais bien faire des concessions à mon tour quand je le voyais se démener de la sorte pour quelqu'un que d'autres auraient jeté trop facilement. « C'est bon que c'est toi. » Je soupirai avant de me tourner plus franchement vers lui. « Quel est ton plan d'action pour la retrouver ? Tu l'as vu se tourner vers quelqu'un ou dans une direction particulière ou pas ? » Il fallait se montrer efficace avant de la perdre dans des plaines sauvages où elle n'aurait absolument pas la position dominante en tant que novice.